• AgoraVox sur Twitter
  • RSS
  • Agoravox TV
  • Agoravox Mobile


Commentaire de Gazi BORAT

sur Hannah Arendt et la banalité du mal


Voir l'intégralité des commentaires de cet article

Gazi BORAT 1er juillet 2008 07:05

@ Roland Verhille

 

Je relève, dans vos propos, une description de processus qui relèvent, selon moi de phénomènes de « dérive des appareils ». C’est une loi souvent constatée que toute construction de type bureaucratique, crée dans un but particulier, n’ait à terme plus pour but que de se perpétuer elle-même.

 

Voyez les syndicats. Créés dans le but de défendre les travailleurs, comme des outils de lutte sociale, ils finissent plus tard par n’avoir plus comme objectifs de combat que de défendre leur existence même, les préoccupations des Travailleurs devenant alors secondaires.

 

Que devient un mouvement à l’origine révolutionnaire quand, au bout de plusieurs années d’existence, il n’a pas réalisé son programme, s’est accommodé peu à peu, sous couvert de « stratégie réaliste » d’un système défini pourtant comme son ennemi et finalement, a trouvé son compte dans cette situation qu’il s’est construite peu à peu ?

 

Ce fut le reproche fait au Parti Communiste Français, dans les années soixante-dix, par les « gauchistes ». Le Parti qui, selon le dogme marxiste, devait être l’outil d’émancipation des masses, s’était peu à peu accomodé en nos contrées d’une perspective révolutionnaire sans cesse repoussée, gérait l’acquisition d’avantages sociaux « raisonnables » pour son électorat « au jour le jour », tout en maintenant toutefois un discours de contestation de la société bourgeoise de moins en moins agressif.

 

C’est alors qu’il fut qualifié de « révisionniste » par une génération plus dynamique. On l’oublie souvent mais, durant la période dans lequel éclatèrent les évènements de Mai 68, les adversaires quotidiens des « gauchistes » étaient tout autant la direction des usines que les militants de la CGT, qu’ils accusaient « d’alliance objective » avec le patronat en bridant « l’énergie révolutionnaire » du prolétariat.

 

 Ce qu’ils dénonçaient, c’était la bureaucratisation d’un appareil construit pour la prise de pouvoir et qui peu à peu, y avait renoncé, d’une volonté révolutionnaire initiale devenue réformisme pragmatique.

 

Ces jeunes mouvements, qui avaient pris pour modèle l’alors dynamique République Populaire de Chine en place de l’URSS agissaient alors à leur insu dans le cadre d’une stratégie générale visant au démantèlement des structures issues de l’historique mouvement ouvrier.

 

La pensée d’Hannah Arendt a servi pour une part d’outil idéologique dans cette stratégie. C’est la raison pour laquelle j’ai mentionné sa surprenante indulgence vis à vis de la Chine maoïste dont le moins que l’on puisse dire, et surtout à cette époque, correspondait à ce qu’elle avait défini comme société totalitaire. N’oublions pas que se mettait en place la stratégie menée par Kissinger de rapprochement USA/Chine Populaire, entre la timide stratégie du ping-pong (cela commença par ce sport et les échanges entre équipes nationales chinoises et américaines) pour finir par des accords dont l’URSS fit les frais.

 

Curieusement, on observe aujourd’hui que nombre de penseurs qualifiés par certains de « néo conservateurs » et qui, souvent se réfèrent à Hannah Arendt, furent maoïstes avant de devenir des partisans du libéralisme économique.

 

Pour en revenir aux liens « capitalisme-totalitarisme », celui-ci ne vaut que pour les systèmes de type « fascistes » et non pour l’URSS stalinienne. Le grand capital allemand et italien renonça provisoirement à une économie libérale tout comme Lénine, durant la NEP, renonça provisoirement à une économie de type socialiste et tout comme la Chine, aujourd’hui encore officiellement socialiste, est entrée en partie dans le jeu de l’économie de marché.

 

 Le bénéfice pour le Capital était, dans les régimes de type fascistes, le démantèlement rapide des structures de lutte (partis, syndicats) du monde ouvrier et la promesse de commandes de la part des Etats allemands et italiens grâce à un programme de militarisation agressif et coûteux mais dont une partie des coûts était contrôlé grâce à l’anihilation de la contestation syndicale.

 

Et les petites structures de production, les PME-PMI ; qu’en est-il dans tout cela me direz-vous ? Elles sont manipulées tout comme les masses et un discours approprié est mis à leur disposition. Structures fragiles, on joue alors la peur de leurs dirigeants pour le désordre, préjudiciable à leur activité, on leur fait miroiter un retour à un ordre ancien mythique (et, disons-le réactionnaire) pour obtenir leur adhésion au nouveau régime mais, disons-le, dans un tel système, elles sont les dindons de la farce tout autant que les masses ouvrières..

 

Le fascisme est un phénomène ambigu qui mêle des éléments « révolutionnaires » pour séduire les masse, conservateurs (pour les classes moyennes) mais qui ne profite finalement qu’aux élites économiques..

Je vous rejoint sur la nécessité d’une élévation de conscience des masses, rempart idéal contre les manipulation par la subversion du langage..

 

gAZi bORAt


Voir ce commentaire dans son contexte





Palmarès