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Commentaire de italiasempre

sur Championnat de Farces de la Pizza connexion


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italiasempre 28 juillet 2008 22:20

@demos



Lisez ce qui suit et prenez-en de la graine




Anthropologie. La chercheuse Sylvie Sanchez retrace l’histoire du palt napolitain devenu star.
Et la pizza conquit l’Amérique ...
Par Catherine MALLAVAL
QUOTIDIEN : vendredi 13 avril 2007
 
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Un jour de 1995, Sylvie Sanchez, Varoise fraîchement débarquée dans la capitale, a un choc. Mais quoi, que sont-ce là que ces choses boursouflées offertes à la concupiscence des passants par un certain Pizza Hut ? « Je n’en avais jamais vu des comme ça. Et pourtant, il s’agissait bien de pizzas, même si elles me paraissaient peu ragoûtantes. » Les questions se bousculent dans la tête de celle qui va devenir anthropologue, chercheur associé du CNRS (à l’Institut interdisciplinaire d’anthropologie du contemporain). Comment les objets en général, et les pizzas en particulier, circulent-ils ? Comment sont-ils appropriés ou rejetés par certaines populations ? Vertigineux. Au moins autant qu’une pizza hawaïenne (celle qui a de l’ananas en plus). Au point que Sylvie Sanchez a fait de la pizza et de ses tribulations une thèse (soutenue à l’Ecole des hautes études en sciences sociales). Remaniée, elle sort aujourd’hui sous la forme d’un livre au titre alléchant : Pizza connexion, Une séduction transculturelle (1). Entretien autour d’un mets aux racines archaïques qui a su devenir l’étendard d’une modernité, mondialement englouti : on consomme 30 milliards de pizzas sur terre tous les ans, sans compter ce que s’enfilent les tortues Ninja. Avec de fortes pointes en France, 10 kilos en moyenne par habitant tous les ans, et carrément 13 aux Etats-Unis, alors que les Italiens n’en grignotent que cinq kilos annuels (2). Entretien.
En quoi la pizza est-elle une originale ? 
La pizza est la plus exportable, la plus transculturelle de toutes les préparations culinaires, et pourtant elle n’y perd pas son identité. Qu’elle soit couverte de haricots rouges (la marque Heinz, l’a fait !), de frites ou de spaghettis, comme on en mange aux Etats-Unis, ou servie en brochettes au Japon, où l’on répugne à toucher directement les aliments, on la reconnaît toujours. Mieux, elle s’adapte à toutes les confessions. Il en est des végétariennes et des superlativement animales, des casher et des halal. Là où elle prend toute son envergure, d’autres y perdent leur âme. Un hamburger hindou sans steak ne devient-il pas l’ombre de lui-même ?
Au fond, c’est quoi une pizza ? 
Simplement de la farine, de l’eau, du sel, du levain, plus des ingrédients, le tout cuit ensemble.
Avez-vous trouvé la pizza originelle ? 
Le mot a précédé l’objet : il apparaît en 997, en latin médiéval, sur un document d’archives de la cathédrale de Gaète en Italie, et signifie alors « fouace », « galette ». L’origine de notre pizza se situe, elle, à Naples. C’est une sorte de pain de garde que l’on trouve mentionné dans des contes en dialecte napolitain du xviie siècle. Les livres de cuisine de l’époque n’en parlent pas. C’est normal, ils ne s’intéressent qu’aux mets de la bourgeoisie, alors que la pizza est plébéienne, c’est un matefaim ambulatoire. La tomate, longtemps considérée comme un poison, ne devient un ingrédient de la pizza qu’au xviiie. Ainsi naît la pizza rossa qui cohabite désormais avec la pizza bianca dont le support est enduit de saindoux avant d’être agrémenté de fromage et de basilic. Les Napolitains, qui sont alors le jardin à légumes de Rome, tentent d’y exporter leur pizza. En vain. Ce mets est très dévalorisé. Il faut attendre 1870, et un déplacement d’Umberto Ier à Naples dans le souci de rallier les Napolitains récalcitrants à l’unité italienne, pour que la pizza s’élève.
Comment ? 
Sa femme, Margherita, choisit une pizza qui porte les couleurs du drapeau italien : rouge (la tomate), blanc (la mozzarella), et vert (le basilic). Voilà d’où vient la pizza Margherita.
Comme si la pizza faisait de la politique ! 
Oui, la pizza Margherita va devenir une sorte d’étendard du patriotisme. Entre la fin du xixe et le début du xxe, 26 millions d’Italiens poussés par la faim s’expatrient à travers le monde. Les Napolitains fuient massivement vers Marseille ou les Etats-Unis. A New York se forme une communauté pour qui cette pizza devient une réponse aux programmes d’intégration très contraignants du gouvernement (il faut manger américain, prendre des cours de langue...). En France, en revanche, où depuis la Révolution on met en avant les spécificités culinaires de chacun et non la gastronomie du roi, la pizza est servie sous différentes formes dans les cantines des travailleurs italiens... Elle est tantôt agrémentée de pandelottes (des tomates provençales), tantôt d’anchois par les Siciliens, ou reste simplement blanche aux herbes. C’est une synthèse des différentes communautés.
Quand la pizza s’affranchit-elle de sa communauté d’origine ? 
Elle sort du quartier italien de Marseille et de Little Italy à New York dans les années 30. Les Américains, marqués par le végétarisme et l’hygiénisme du xixe siècle, ne veulent pas de saveurs trop fortes, comme l’ail qui, croient-ils, pourrait exciter le corps. Alors, ils adaptent la pizza en forçant sur le fromage. A l’époque, la pizza se vend dans la rue, pliée en portefeuille, elle se mange en marchant. Il faut attendre les années 40 pour qu’elle devienne un plat principal. Voici venue la Chicago Style Pizza, une sorte de pie , avec une série de couches d’ingrédients, notamment de la viande. Trop épaisse, elle ne peut plus être cuite rapidement au feu de bois. Elle s’industrialise. Et ouvre la voie à son futur développement en fast-food.
Et en France ?
A Marseille, les pizzas font leur apparition en premier plat dans les petits restos tenus par les Siciliens, tandis que des Marseillais commencent à la servir en plat principal accompagnée de Chianti qu’ils importent. Pendant la guerre, beaucoup de restaurants soumis aux tickets de rationnement doivent fermer. Comme la pizza ne coûte pas cher à fabriquer, seules les pizzérias restent ouvertes et deviennent des enclaves un peu joyeuses. Au lendemain de la guerre, cela donne l’idée aux migrants italiens, qui hors les Napolitains sont nombreux à découvrir la pizza en France ­ elle n’arrivera à Milan que dans les années 60 ­, d’ouvrir des pizzerias à Paris. La première est inaugurée en 1950. Très vite, partout où il y a des Napolitains, il y a des pizzas, alors que l’on ne trouve pas de crêperie partout où il y a des Bretons. A l’heure où l’on parle d’américanisation de la planète, la pizza donne l’exemple contraire : c’est elle qui a influencé l’Amérique.
(1) CNRS Editions, 22 euros. (2) www.casa-pizza.com
  Waglioni Madeleine
 
 

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