Il est difficile de résumer en quelques mots un ouvrage d’une telle densité, d’autant que Généreux a le souci de la nuance et évite de tomber dans la caricature ou le manichéisme.
Je fais donc de mon mieux :
L’idée principale est que l’édifice néolibéral repose sur une vision erronée de l’homme, que Généreux va longuement réfuter : c’est celle d’un individu autonome qui s’épanouirait dans la lutte pour son seul intérêt et qui n’entre en société que dans un but utilitaire.
Cette vision d’un individu entièrement indépendant des autres est démentie par les récentes découvertes des sciences de l’homme et de la nature, qui confirment que l’homme aspire tout autant à « être soi et pour soi » qu’à « être avec et pour les autres ».
Pourtant, c’est seulement la première de ces deux aspirations que retient la vision néolibérale, et qu’elle exacerbe en plaçant chaque individu en situation de rivalité avec les autres, et en exaltant l’autonomie, la responsabilité individuelle. Cette « dissociété », d’abord organisée par des choix politiques (ceux que vous évoquez au début de votre article) est un processus autoréalisateur : plus la rivalité se généralise, plus notre moi devient fragile, et moins nous sommes capables de résistance.
On transforme peu à peu chaque personne en individu atomisé, en « guerrier actif ou résigné, avide de biens pour lui-même et peu soucieux d’autrui » : les individus sont alors « dressés (dans tous les sens du terme) les uns contre les autres ». Le déficit de liens sociaux crée un manque que nous compensons tant bien que mal par un comportement "consommane", jamais satisfait, qui profite à la société de marché et nous place dans une situation de servitude volontaire.Dès lors, s’éloignent les chances de toute action collective : même si, pour la plupart, nous savons intimement que la société qu’on nous prépare n’est pas souhaitable, nous nous y résignons.
Généreux nous invite à réfléchir à une société de progrès humain, opposée à la dissociété néolibérale, qui tiendrait compte des deux « aspirations ontogénétiques » de l’être humain.