Bonjour Monsieur Thirion,
Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage
Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage,
Ou comme cestuy-là qui conquit la toison,
Et puis est retourné, plein d’usage et raison,
Vivre entre ses parents le reste de son âge !
Quand reverrai-je, hélas, de mon petit village
Fumer la cheminée, et en quelle saison
Reverrai-je le clos de ma pauvre maison,
Qui m’est une province, et beaucoup davantage ?
Plus me plaît le séjour qu’ont bâti mes aïeux,
Que des palais Romains le front audacieux,
Plus que le marbre dur me plaît l’ardoise fine :
Plus mon Loir gaulois, que le Tibre latin,
Plus mon petit Liré, que le mont Palatin,
Et plus que l’air marin la doulceur angevine.
Voici ce texte pour illustrer votre propos que vous m’adressez ici.... En effet, il est bon de se sentir de quelque part. Je suis d’accord avec vous.
Il faut bien que je l’avoue, je fais parfois bien le provocateur et le diablotin afin de provoquer du débat. Et je dois ajouter que je le fis le diablotin suite à votre article précédent et de quelque manière à la suite de celui-ci.
Plus bas dans ce fil de discussion, ZEN, a déposé une intervention qui vont dans le sens de mes petites extravagances et je le remercie de venir à ma rescousse et de montrer ainsi qu’il a saisi la manière de mon agitation.
Liégeois, je ne le suis pas, même si ma famille paternelle est d’origine mosane et de l’ancienne province de Liège.
Je ne puis bien comprendre la rage ubuesque de mes compatriotes à détricoter la pays Belgique, cette attitude de morcelement d’un pays formé de terroirs comme vous l’avez si bien signalé donne soudain l’image étrange que tout un chacun est prince dans son village.
Soudainement, alors qu’en moins de 12 ans la situation géopolitique mondiale à profondément changé et que la mondialisation (ou encore, mondialisme, dépeçage géographique, re-composition territoriale ou encore découpage économique et zones d’influences déterminées par des impératifs purement de politiques favorables au marché économique ), la Belgique se paye une enième crise qui annonce , à mon sens, la mort certaine de la Culture européenne et de sa richesse. Car, la Belgique a le triste privilège d’être le laboratoire des expériences européennes depuis bien longtemps même avant qu’elle ne porta le nom de Belgique.
Lorsque vous écrivez que les français sont comme pour nous des frères (je ne crois pas me tromper), vous employez le même langage que les nationalistes flamands dans les années 20 -30 du siècle passé. Je crains donc que l’amour immodéré de ce qui font nos racines conduisent à l’aveuglement alors que le morcelment annoncé des pays européens ne servent pas uniquement le désir légitime de liberté des régions mais bien d’autres funestes entreprises.
Lorsque je m’en prends à nos amis français qui ici regardent avec un gentil sourire les extravagances belges, je m’agace ....Croire que la situation belge est amusante, c’est faux et ce n’est pas une enième blague belge....car c’est qui attend les français, les espagnols enfin presque toute l’europe lorsque un fédéralisme européen aura pris place au détriment de ce que l’histoire a douloureusement construit et que ce morcelment sera tout aussi douloureux que le fut la création des états-nations appuyés par le capitalisme naissant ensuite.
La crainte du chaos, écrivez-vous. Oui, nous pouvons craindre ce chaos s’il n’est pas nécessaire. Et ce d’autant plus qu’il y a un manque réel de "lisibilité" des vrais enjeux, une disparition du sens que nous pouvons donner à nos sociétés, une disparition du projet de nos sociétés et surtout l’oubli que ce sont les partages , la solidarité et les destins communs face aux dangers qui font la grandeur des Hommes.
Vous êtes, Monsieur Thirion plus âgé que moi, votre génération connu la guerre, la génération de vos parents aussi . Alors qu’enfin, en europe depuis 60 ans nous émergions du chaos organisé par les élites, que nous pouvions repenser l’avenir européen , reprendre racine en nos lieux et quoique livré aux facéties de nos sauveurs les EU d’Amérique, nous voilà retombés dans les querelles de clocher, là où le Prince découvre que son père est nu (si j’ose cette expression presque psychanalytique).
Nous devrions tous en Europe nous demander :" Où allons-nous, où veut-on nous mener, que voulons nous ?" Si toutefois , il soit possible que nous nous interrogions et si toutefois nous pouvions être entendus ?
Le défi est partout, au terroir aussi mais plus encore dans les tentatives d’homogénéisation, de standardisations et d’intégration qui sont vous le savez les contraires des différences.
Je crains donc que l’exploitation du souci légitime des populations et des nations à propos de leur valeurs, identités servent d’autres buts.
Je vous devais cette réponse après vous avoir quelque peu chahuté.
Je vous souhaite un bon dimanche et espère que vos articles seront l’occasion de débats concernant notre avenir de belges ,de liégeois et de flamands mais aussi d’européens et s’il fallait parler de fraternité dans le sens le plus plénier, il s’agirait alors de la fraternité tous ceux et celles qui aimeraient que l’Europe retrouve sa place en paix avec les autres peuples tout en se disant que nous la trouverons d’abord avec nous-mêmes et nos voisins.