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Commentaire de Zawgyi

sur Le Christ : la grande confusion


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Zawgyi 24 septembre 2008 17:11

Je partage à la fois votre point de vue... et à la fois pas. Je m’explique : il est vrai que nous avons tendance bien souvent à nous attacher à la forme que prenne les religions, plutôt qu’au fond. Dans le fond, si l’on ne retient que l’essence même du message, il serait difficile de critiquer n’importe laquelle des grandes religions, dès lors qu’il s’agit d’un message de paix, d’amour, etc. Une sagesse, une morale qui ne peut qu’inspirer. Malheureusement, on est obligé de retomber dans la philosophie de Socrate : ce que vous décrivez ici n’est que le monde des idées. Comme l’on dit : "la perfection des hommes n’est jamais dans leurs actions, mais dans leurs intentions". Car finalement, si l’on suit votre raisonnement éthéré, on pourrait dire la même chose de bien des idéologies politiques, sans avoir besoin d’introduire la dimension de sacré et de divinité, pour trouver une spiritualité qui nous permette de vivre moralement, dans l’amour et dans la paix. C’est ce que j’essaie de faire à titre personnel en me raccrochant à l’essence du message des siècles des Lumières et de la Déclaration des Droits de l’Homme. Personnellement, la Déclaration d’indépendance américaine par exemple me fait tout autant vibrer qu’une révélation divine pour un croyant. On n’entend plus les hommes politiques s’exprimer ainsi de nos jours. On pourrait même dire finalement que dans son essence même le communisme est une excellente idée... On sait pourtant où cela à conduit : à plus de morts que le nazisme.

Ainsi, je partage votre point de vue sur l’attachement que nous devons avoir vis-à-vis du fond du message. Mais n’oublions pas que les religions ont la prétention de détenir un message de vérité absolue et d’orienter la vie des hommes dans ce qu’elle a de plus quotidien, de plus privé même. N’oublions pas que les religions, dès lors qu’elles nécessitent une interprétation du message par le biais d’un medium, d’un shaman, d’un imam ou d’un prêtre, s’appuient sur une organisation humaine chargée de transmettre et de faire appliquer le message divin. Dès lors que ces hommes sont avant tout humains, même si un faible nombre d’entre eux deviennent des saints, les dérives sont inévitables. Ainsi, le religion, en ce qu’elle propose aux croyants de se regrouper autour d’un même dogme est porteuse de ses propres germes d’intolérance, d’exclusion, de violence, d’extrêmisme, dont elle ne peut se départir. C’est un peu comme la logique du Yin et du Yang : l’un ne va pas sans l’autre. Sauf qu’au lieu de chercher un équilibre entre l’humain et l’ascète qui sont en nous, le but de la religion est de faire pencher la balance uniquement d’un seul côté, celui de l’ascète. En cela elle est vouée à l’échec dès le départ : ceux qui y parviendront deviendront nécessairement des extrêmistes coupés du reste de leur congénères, considérés alors comme des hérétiques. Ceux qui échoueront devront malgré tout subir le joux de ces quelques extrêmistes, et ainsi nait la violence.

C’est justement ce qu’avait appris Siddharta avant de devenir Bouddha : l’extrême est malsain, l’absolu n’existe pas, tout est relatif. Le mal est tout simplement ce qui apporte de la souffrance et non pas un pêcher que l’on ajoute ou que l’on enlève à une liste selon les époques.

Je dois avouer être assez choqué de voir un théologien comme Benoît XVI détouner allègrement le message qui est au fondement même du christianisme tout en faisant le thème même de sa première concorde : l’amour. Jésus a toujours parlé de l’amour de manière absolue, sans limite, sans exclusion. Condamner l’homosexualité est par conséquent une aberration. De même que refuser le sacrement aux remariés. Jésus n’a jamais parlé d’une séparation du rôle des hommes et des femmes dans la société (il est vrai qu’à son époque machiste, cela coulait de source, il n’avait pas besoin d’en rajouter une couche). Quoiqu’il en soit, le refus perpétuel d’accorder la prêtrise aux femmes est là-encore une aberration si l’on s’en tient au message même.

Bref, c’est pour cela que je suis athée. Partant du principe que l’on peut faire le bien, être moral et spirituel sans forcément avoir besoin de la religion. Nous n’avons pas besoin de Dieu. L’idée de Dieu nous infantilise (c’est pas pour rien qu’on l’appelle Notre Père), nous attendons un commandement pour agir sur le monde comme notre intelligence devrait nous pousser à le faire. Nous sommes des enfants gâtés, incapables de nous auto-déterminer mais certains de notre supériorité sur le reste de la "création", de la nature. C’est pourtant elle qui nous a engendré (et non pas créés). Et nous attendons un buisson ardent pour la sauver, pour nous sauver. Pourtant notre intelligence, à l’inverse de ce que nous font croire les religions monothétistes, ne nous donne pas plus de droits, mais plus de responsabilités vis-à-vis du monde qui nous entoure. Ce n’est pas à la planète de prendre soin de nous, ce n’est pas un self-service. C’est à nous, du fait des capacités que nous possédons, de nous comporter en adultes et de prendre notre destin en main, de sauver les autres espèces qui n’ont pas comme nous la capacité d’inventer les moyens de leur propre survie.

Mais au lieu de retrousser nos manches en adultes responsables, nous regardons le ciel comme des enfants, soi-disant faits à l’image d’un Dieu tout-puissant (rien de ce que je vois autour de moi ne me conforte dans cette idée) attendant un message divin pour nous sauver. Tant nous sommes certains que nous valons la peine de l’être. Mais en orphelins que nous sommes, nous apprendrons bien vite que l’univers n’a que faire de nous .

C’est pour cela que je suis athée. Nous n’avons pas besoin de Dieu pour mettre en place une société morale et pacifiste. Nous n’avons pas besoin de Dieu pour nous sauver ou sauver le monde. Nous n’avons pas besoin de Dieu pour être spirituel, pour méditer face à la beauté et aux mystères du monde. Et lorsque nous aurons réussi à faire cela par nous-même, s’il y a finalement vraiment un Dieu, je suis certain qu’il saura reconnaître les siens.

PS : pour revenir à votre analogie entre le Christ et Bouddha, je trouve que c’est une méconnaissance de la notion d’illumination pour les Bouddhistes. L’illumination c’est la révélation que rien n’existe, que rien n’est permanent, pas même ce que Freud appellerait le moi et le soi. Tout est impermanent. Et en rompant ainsi le cycle du Karma, le Samsara, on cesse d’exister, on ne se réincarne plus et on atteint le Nirvana, qui n’est pas un lieu ou un paradis, mais un état de non-être. Ainsi, Jésus et la vie éternelle n’ont pas grand chose avec le bouddhisme.


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