Monsieur Villach a pris la sale habitude de parler des choses, a priori, sans les avoir vues.
Cet article, sous des formes alambiquées et boursouflées, aurait pu être écrit par n’importe quel critique d’art réactionnaire, il y a 50 ans.
Qu’il le soit aujourd’hui, démontre que, décidément, l’art provoque toujours les mêmes résistances des béotiens ; ceux qui confondront toujours la peinture avec la représentation fidèle de la réalité, l’art pictural avec la photographie.
On aurait pu penser qu’un peu de chemin avait été parcouru, depuis que les toiles des impressionnistes étaient refusées au concours général, et que les turiferaires de l’art pompier dictaient leur loi rétrograde à toute évolution ; eh bien, non, il s’en trouve encore de nos jours, comme monsieur Villach, pour continuer à l’évaluer, le nez dans le guidon de leurs représentations figées au XIXème siècle.
Entre les brèves de comptoir du Café du commerce, et les jugements les plus beaufs de ceux pour qui l’art de la représentation se limite aux tapisseries brodées représentant des biches dans un sous-bois aux ocres rutilants, ce sont toujours les mêmes voix qui s’élèvent, comme si, depuis des siècles, la peinture était restée figée à ses manifestations les plus rétrogrades.
Monsieur Villach n’est certes pas un artiste, mais, de plus, il fait partie de ceux qui auraient empêché Giotto de représenter la perspective, Cezanne d’inventer l’impressionnisme, Kandinsky l’art abstrait, Modigliani d’intégrer l’art africain à sa peinture, et condamné probablement Francis Bacon à l’hérésie et ses oeuvres aux autodafés.
Avec des gens comme monsieur Villach, l’art ne serait qu’un musée poussiéreux, et les artistes condamnés à représenter, ad vitam aeternam, une vision "réaliste" et figée des choses telles que la photographie les donne à voir.
Monsieur Villach passe à côté d’un siècle d’évolution de l’art pictural, et se targue, à l’aune de son aveuglement satisfait, de juger l’oeuvre d’un artiste qui aura engendré l’art moderne.
Que vous ne compreniez rien à l’art, monsieur Villach, n’est pas bien grave ; un tas de gens vivent comme vous dans l’ignorance d’un tas de choses, sans que, ma foi, celà puisse leur porter préjudice dans la vie de tous les jours. Mais que vous vous permettiez, dans cet état d’ignorance et d’inculture, de commettre un article en traitant, donne le degré de votre cuistrerie et de votre insondable prétention.
Vous demandez, monsieur Villach, si l’art de Picasso résistera à la confrontation avec les grands maîtres ; j’ai le regret de vous faire savoir que, loin de répondre à cette question, qui est largement au dessus de vos facultés de jugement, la seule chose que votre article donne à comprendre, est que votre position, elle, ne résiste pas au ridicule de votre inculture et de votre sidérante vanité de porter un jugement définitif sur des choses qui vous échappent totalement.
Désolé pour vous.