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Commentaire de Vincent Perrier-Trudov

sur La révolution, maintenant !


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Vincent Perrier-Trudov Vincent Perrier-Trudov 5 novembre 2008 12:47

Bonjour,

Vous admettrez que cela fait beaucoup de questions, et que chacune d’entre elles pourraient faire l’objet d’un article. Je vais essayer d’y répondre de manière brève mais claire.

Tout d’abord, ma réponse ne traite pas de la question de l’humanisme, mais de la confusion de Bayrou entre capitalisme et libéralisme, et de la conclusion contradictoire à laquelle il parvient.

C’est un peu comme si on disait, "les chênes, ce sont des roches, il y a trop de chênes en France, la solution, ce serait d’avoir plus d’arbres".

Et lorsque je fais remarquer l’énormité de la contradiction dans ce discours, qui est du même niveau pour un économiste que de parler de "frontière irako-pakistanaise" pour un géographe, la seule réponse que j’obtiens est "Si vous préférez : "Le capitalisme, dans sa forme d’avatar du libéralisme, a échoué".

C’est ce qui s’appelle s’enfoncer.

Le libéralisme est une des formes d’organisation du capitalisme, et non pas l’inverse.

Je faisais remarquer qu’il s’agit là des limites de la répétition bête et méchante des phrases venues d’un leader consacré infaillible, en l’absence de tout esprit critique.

Sur la manière de sortir de la situation où nous a mis l’absence totale de régulation des marchés financiers, la répartition des profits toujours plus à l’avantage du capital qu’au travail et à l’investissement, il y a beaucoup à faire.

La première chose, c’est d’être "plus forts que les marchés". Vu les sommes en jeu, ce n’est pas forcément évident, on le voit bien avec les diverses interventions des banques centrales, et les sommes colossales de crédit à court terme qui ont été accordées afin que l’économie mondiale ne s’écroule pas.

Il s’agit bien là de crédits - de prêts accordés aux banques - et non de subventions. La distinction est d’importance, pour éviter de tomber dans les travers de raccourcis faciles et démagogiques.

"Etre plus forts que les marchés", c’est en premier lieu renforcer l’Europe. Il y a de cela un an, lorsque je participais à différents débats, on me disait "c’est la faute de l’euro, il faut sortir de l’euro". Ce à quoi je répondais que si on était en dehors de l’euro, on serait beaucoup plus faibles et fragiles.

Je vous invite à interroger les hongrois et les islandais sur ce qu’ils pensent de la non-participation de leur pays à l’Union Monétaire. La preuve est aujourd’hui faite que les marchés ne sont pas en mesure de faire "tomber" les pays qui sont dans la zone euro, contrairement à ce qui a pu se passer en France en 1992 et aujourd’hui en Hongrie ou en Islande.

Etre plus forts, c’est imposer les règles au marché. Et seule l’Europe est en mesure de le faire. Il faudrait une agence européenne de notation, pour éviter que la notation des titres soit faite par des entreprises privées, qui parallèlement facturent des prestations à ceux qu’ils notent. Le bon vieux principe de séparation des juges et des parties.

Enfin, la prise de participation que le Royaume-Uni a mené au sein des banques et que la France n’a pas choisi me semble la meilleure solution pour influer directement sur le mode de management des banques. Encore faut-il avoir la volonté réelle d’influer ce management pour qu’il soit plus juste.

En ce qui concerne la meilleure manière de faire entendre la voix du Nouveau Centre au sein de la majorité actuelle, il n’y a pas 36 solutions. Il n’y en a qu’une seule. Se présenter face aux électeurs, avec un programme qui soit le nôtre, avec des candidats qui soient les nôtres, et convaincre les français que notre courant de pensée est celui qui doit le peser le plus possible en France.

Et après on fera les comptes. Plus nous aurons de voix, plus nous pourront peser, au sein de la majorité présidentielle, pour que les réformes soient plus justes socialement, que les aides soient moins tournées vers les grosses entreprises et plus vers les PME, que l’on fasse des efforts encore plus grands pour réduire le déficit public qui menace notre Etat de faillite - alors même que les prélèvements obligatoires sont parmi les plus élevés d’Europe.

Alors, bien sûr, aujourd’hui nous ne pesons pas énormément. Mais nous avons quand même réussi à obtenir un certain nombre de choses. Je trouve même que, compte tenu du poids électoral que nous avons actuellement, nous avons obtenu beaucoup beaucoup de choses.

Sur les niches fiscales, par exemple. Cela fait des années que Charles de Courson se bat contre ces niches, et cherche à faire passer un amendement de plafonnement global. Nous n’avons pas été entendu l’année dernière - il n’était question que de plafonnement de certaines niches, sans exclure l’accumulation des avantages fiscaux. Cette année, nous avons été entendus. Certes, l’UMP et Daubresse se sont empressés de s’octroyer cette idée, mais la vérité, c’est que c’est nous qui avons imposé cette idée.

Si nous n’avions pas eu notre propre groupe parlementaire à l’Assemblée nationale, je peux vous assurer qu’il ne serait même pas question de règle d’or budgétaire dans la Constitution. Bien entendu, cette règle n’est pas aussi ambitieuse que nous l’aurions souhaité, mais elle existe, et c’est déjà un premier pas.

Dites vous bien qu’il vaut mieux une petite avancée, un petit progrès, que pas de progrès du tout. Forcément, cela ne fait pas rêver les gens, les batailles sur des amendements techniques, les petites victoires qu’il faut longtemps pour expliquer lorsqu’on n’est pas dans le bain de la politique, mais ces choses là ne sont pas neutres. C’est pour cela qu’on se bat, et on se dit qu’un jour, les français finiront bien par savoir ce qu’on a fait, et ce qu’on défend. Ce n’est qu’une question de temps et de travail.

Quant à votre dernière question, je vais vous y répondre beaucoup plus rapidement : si les français ont été moins protégés qu’ils n’auraient pu l’être, c’est à la fois à cause des bêtises faites depuis 1981 par tous les gouvernements sans exception, et qui fait que nous nous retrouvons avec un endettement considérable, un déficit public récurrent monstrueux, qui nous enlève toute marge de manoeuvre par rapport à la crise actuelle.


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