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Commentaire de Albéric

sur La mémoire contre la raison


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Albéric (---.---.91.133) 17 octobre 2006 13:44

franchise et civisme contre les extrémismes envoyé à l’éditeur de Max Gallo le 12 octobre 2006 à [email protected]

Monsieur, Lecteur de plusieurs de vos romans historiques et de votre essai « Fier d’être Français » ainsi que du roman-pamphlet « Les fanatiques », je me permets de vous écrire pour saluer la qualité et l’abondance de votre oeuvre et votre attachement à notre héritage Républicain. Je me dois aussi, au nom même de ce patriotisme et civisme salutaire, de vous encourager dans la voie du discernement et de la mise en perspective de la profondeur historique, au service d’un devenir dans lequel la France aura fait émerger une culture musulmane pudique, laïque, compatible et enrichie par l’héritage vivant de trois mille ans de civilisation Européenne. Alors que l’Assemblée Nationale a voté aujourd’hui une loi réprimant pénalement la négation du génocide des Arméniens par les Ottomans, il serait pertinent de recenser les crimes de l’histoire « Chrétienne », et de préparer des dignes cérémonies expiatoires (même si Jean-Paul II a déjà commencé la démarche expiatrice, elle semble avoir déjà été oubliée par les musulmans et il faut donc réfléchir à l’institutionnalisation « dans le marbre » à l’échelle européenne et avec des représentants symboliques pertinents d’une expiation libératrice), puis de proposer sur la place publique un recensement parallèle de tous les crimes de l’histoire Islamique en laissant apparaître l’absence d’expiation de ce côté (faute peut-être d’instances de communauté de mémoire qui puisse l’assumer). Il semble que les Turcs qui ont cru devoir attaquer le « génocide » des Algériens par les Français et inviter la France à méditer son propre passé, soient totalement ignorants de la saturation des colloques, publications, expositions, déclarations gouvernementales, qui ne parlent que de la culpabilité coloniale Française depuis des années. La conquête de l’Algérie fut extrêmement meurtrière, mais n’était-ce pas aussi une guerre contre les précédents colonisateurs Turcs ? Les Nations d’Europe sont pour la plupart des Empires Repliés qui ont perdu leurs territoires mais ont gardé une partie des populations de ces terres perdues, ce qui les obligent positivement à bâtir une nouvelle mémoire (le film « Indigènes » invite les autochtones-fils-de-vaincus et fils-de-maquisards-qui-ont-intégré-l’armée-d’Afrique en 1944 à partager la gloire des fils des libérateurs venus de l’Empire - et en même temps les nouveaux venus doivent partager l’héritage national complexe fait de fiertés et de hontes à assumer aussi, non en rampant devant les victimes présumées mais avec une certaine humilité qui est en vérité la condition de la dignité précédant la partie légitime de la fierté). Le président Jacques Chirac a condamné les massacres coloniaux Français, et si le Président Bouteflika n’insultait pas la France chaque semaine, Chirac ferait précéder la signature d’un désormais hypothétique Traité d’Amitié Franco-Algérien de condamnations des crimes coloniaux Français (on pourrait même espérer une demande de pardon personnelle puisqu’il était officier et a participé à la répression des mouvements indépendantistes dans les années 1960). Le travail de mémoire est loin d’être fini mais il a au moins commencé. La Turquie ne peut pas entrer dans le cercle civilisationnel Européen si elle refuse d’adopter cette attitude critique sur son propre passé, qui constitue effectivement un élément crucial de l’identité politique de l’Union Européenne. Or non seulement elle refuse de partager un certain souci de vérité et de vigilance, mais le premier ministre Erdogan a choisi de célébrer cet été en pleine guerre du Liban, l’invasion de Chypre par les troupes Turques il y a trente ans. Il a donné un signe positif aux partisans de l’expansion armée islamiste ou islamisante : ceci suffit pour l’exclure de l’Europe. Erdogan premier ministre ne doit pas signer de traité d’adhésion à l’UE. Au-delà de l’actualité, qui risque de nous faire dire (à la radio par exemple) des choses qui risquent de blesser telle ou telle sensibilité, l’Histoire devrait être envisagée comme un « réservoir pour les âges nouveaux » comme dirait Péguy. En effet, dans la suite de votre trilogie sur les Chrétiens, vous pourriez écrire sur les invasions Musulmanes en Europe aux VII et VIIIème siècles. La première invasion de l’Espagne fut peut-être initialement vécue comme une libération contre le tyran Wisigoth, mais l’occupation Musulmane fut-elle tout le temps et pour tous un « paradis » comme l’idéalise tout Musulman ?N’y-a-t-il pas eu des esclaves autochtones Ibériques, ou des conversions de force ? Les phénomènes de l’obscurantisme chrétien de l’Inquisition mais aussi de la guerre de libération de la Reconquista (qui sont si prégnants dans la culture européenne, comme en témoigne « Le Cid » de Corneille) n’ont-ils pas débouché sur un transfert de revanche tardif et une idéologie dominatrice contre les Amérindiens puis les Noirs par l’Espagne triomphante puis le Portugal et les autres puissances, de manière peut-être comparable au transfert de revanche des Israéliens sur les Arabes aujourd’hui ? Les Amérindiens ne furent pas plus responsables de l’humiliation et l’occupation de l’Espagne par les Arabes que les Arabes ne le sont de l’humiliation et extermination des Juifs en Europe. L’expansion coloniale de 1830 en France fait suite à l’humiliation de 1815 et après les défaites de 1870 et 1940 il y eut aussi des développements coloniaux qui semblent avoir servi de revanche. Vaincu par plus fort que soi, on se venge sur plus faible. Deuxièmement il serait intéressant d’étudier la guerre défensive victorieuse de Charles Martel et le duc Eudes contre Abdel Rahman à Poitiers : cela serait bien dans la continuité de votre roman sur Saint Martin puisque ce sont les richesses du monastère de Tour qui étaient convoitées par l’envahisseur, et le sanctuaire réveilla la foi Chrétienne. Mais plus intéressant encore est l’engagement d’un chef Kabyle, installé dans le sud de la France, aux côtés des Francs contre les Arabes. Aujourd’hui tout Musulman Français doit s’engager aux côtés de la France contre l’Islamisme, jusques et y compris dans l’armée Française contre les Talibans Afghans, et beaucoup plus immédiatement et quotidiennement en désamorçant la propagation au sein de notre société de tout sectarisme violent et négateur. Mais c’est avec enthousiasme et en assumant pleinement le meilleur de leurs identités harmonieusement superposées et mutuellement enrichies (mais libres aussi de rejeter en partie leur culture d’origine et de critiquer modérément une partie de leur culture d’accueil) grâce à un clair discernement entre ce qui est compatible et la petite partie de l’héritage Musulman qui doit être tronquée, que les Musulmans et Agnostiques d’origine Musulmane doivent adhérer au projet de la République Laïque de France elle-même en construction. Les réactions hystériques du monde Musulman à telle ou telle déclaration du Pape , doivent susciter chez nous une déception amicale, la déception de ceux qui attendent mieux de personnes pour qui ils ont de l’estime. Il est parfaitement légitime que le monde moderne apaisé attende du monde musulman qu’il fasse le même travail que fit le monde chrétien entre la Réforme et la Révolution Française et que des autorités théologiques musulmanes imposent une interprétation métaphorique non littérale des versets guerriers de leur texte sacré (pour lequel vous avez tort Monsieur Gallo, d’exprimer de la fascination et de l’effroi - le respect suffit qui n’interdit pas la critique). Il est légitime de poursuivre intelligement mais si possible dans un climat serein la controverse Papale de Ratisbonne, qui était une invitation à l’émulation théologique pour purifier le mysticisme authentique de la pathologie du martyre guerrier-suicidaire. Napoléon disait qu’un suicidaire est un déserteur, mais un suicidaire-tueur est non seulement un déserteur mais un criminel qui déshonore les siens, qui pollue la conscience de l’humanité, et qui profane le sacré et toute transcendance. Or la violence existe aussi à l’intérieur des communautés : la destruction de la Mosquée de Samara en Iraq par des Iraqiens n’est pas moins tragique pour l’humanité que la destructions des Boudhas de Bamian par les Talibans d’Afghanistan. C’est en témoignant d’un grand respect laïque, un très sincère et profond respect qui reste sur le seuil de la foi, et en même temps une exigence intransigeante sur les principes de la Liberté, qu’on pourra aider les Musulmans, parmi lesquels les Musulmans d’Europe ont un rôle éminent à jouer, à réussir la mue de leur doctrine au service de la paix (la paix comme un projet et non la suspension de la guerre). Le rôle des intellectuels Européens est de fouiller dans l’Histoire et dans la géographie de la culture pour extirper des exemples de liberté, de rationalité, de tolérance y compris chez l’autre (n’y eut-il pas des poètes et philosophes persans qui seraient condamnés par le régime Iranien actuel et qui exaltèrent la liberté en leurs temps ?). Mais compte tenu du déséquilibre entre la saturation mémorielle européenne et singulièrement française et les mémoires musulmanes, il peut être utile également de recenser les crimes des musulmans. J’ai trop entendu des musulmans dire que l’expansion du christianisme est dû à l’Empire Romain pour ne pas souhaiter que des historiens rétablissent la vérité des martyrs chrétiens (comme l’évangélisateur de la Gaule, le Grec Saint-Denis qui donne son nom au département Français qui accueille probablement le plus de Musulmans) tués par les Romains : les martyrs « Gandhiens » du premier et deuxième siècle n’ont-ils pas fait plus pour l’enracinement du christianisme en particulier en France que la conversion de l’Empereur Constantin (qui ne fut pas suivie par tous ses successeurs) ? C’est d’abord contre Rome que le Christianisme s’est développé, exactement à l’inverse de l’Islam qui doit son expansion à des guerres et des conversions forcées, dès Mahomet. Il est nécessaire également pour assumer l’intégralité de l’héritage chrétien et couper net à tout rêve de révolution islamique en France, de rappeler que ce sont les Gaulois Romanisés Christianisés qui se sont choisi leurs maîtres Francs (et non Huns ou Wisigoths) et les ont obligés à adopter leur religion. Ce ne sont pas les Francs qui ont converti les Gaulois au Christianisme mais ce sont bien les Gaulois Romains qui ont projeté, à l’instar de Geneviève et Rémi, un horizon du devenir à partir de la langue du vainqueur Romain et de la religion du vaincu Chrétien, achevant de se débarrasser de tout particularisme celte ou germain pour marcher vers l’universel, et aujourd’hui c’est aux nouveaux venus d’adopter notre civilisation des droits de l’homme (et non aux « gaulois » de se plier à la charia qui empêcherait de toute façon l’épanouissement des musulmans Français, y compris de leur foi authentique). Saint-Denis, s’il mérite d’être considéré comme un martyr qui témoigne pour sa foi, n’interdit-il pas d’utiliser ce même mot de martyr pour désigner des criminels-déserteurs ? Le petit-fils de Mohandas Gandhi, Arun, a tenté d’expliquer aux Palestiniens qu’ils ont besoin de non-violence comme arme de guerre dans leur combat légitime pour leur Etat. C’est par leur exemplarité qu’ils forceront le retrait Israélien, mais leur violence ne fait que prolonger et renforcer l’occupation. La méthode choisie peut disqualifier la cause ou au contraire faire valoir sa justesse. Ainsi, comme vous le faites dans vos livres et à la radio, c’est par la franchise qu’on pourra faire reculer les fascismes verts mais aussi les fascismes blancs et l’anarchie violente qui est inévitablement exploitée comme mercenaire pour les uns ou les autres. Il faut exprimer une égale colère contre les fanatiques qui menacent de mort Robert Redeker, contre Le Pen qui croit engranger la colère en la transformant en xénophobie primaire qui nie les fondements de notre Civilisation des Droits de l’Homme (ce faisant il se fait en réalité l’allié des islamistes qui attendent l’arrivée au pouvoir du FN pour lancer une vraie guerre civile et tenter de mettre à bas deux siècles d’effort pour construire la République), et contre chaque criminel et chaque délinquant qui agresse un policier (la colère des citoyens doit l’isoler du reste des gens de son quartier et de sa communauté afin de sauver la majorité des honnêtes gens). Le civisme est donc aussi nécessaire que la franchise qui doit trancher avec précision , sans faire de « victime collatérale », grâce au souci de la vérité et de la justice, qui permet d’éviter de se laisser contaminer par la violence de l’agresseur. Confiant que vous poursuivrez votre oeuvre de romancier et d’historien dans ce sens, et en m’excusant de la longueur de ce mél, je vous prie d’agréer, Monsieur Gallo, les salutations reconnaissantes et admiratives d’un de vos fidèles lecteurs.


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