Vous faites une critique tous azimuts.
D’une part la critique de l’image, de sa fabrication, de sa construction.
D’autre part une critique de la Fondation Abbé Pierre, et à travers elle une critique de la société, de l’appel à l’aide humanitaire, du voyeurisme et du sentiment de culpabilité qu’il engendre.
Je souhaite m’en tenir à la seule critique de l’image qui pose à mes yeux le problème suivant :
A-t-on ou non le droit de mettre en scène la misère ? Peut-on dépenser du temps et de l’argent pour recréer de toutes pièces une misère, existant bien trop fréquemment au naturel, mais moins "esthétique", moins bien cadrée, moins lisible.
Poser la question c’est presque déjà y répondre.
Pour moi un artiste (ici le photographe qui compose le tableau, cadre, éclaire) a ce droit d’interprétation.
Je trouve cette ’’image’’ forte, bien construite, dérangeante (c’est un des buts recherchés)
Le seul espace vital de cette famille non encombré d’objets est occupé par le message.
L’angle de prise de vue et sa perspective obligent le spectateur à y prêter une grande attention pour pouvoir la lire et la décrypter.
Le spectateur se trouve en position dominante, il écrase presque du regard cette scène.
Cette photo ne verse d’ailleurs pas dans un misérabilisme exacerbé mais semble être un simple constat, froid et lucide. assez détaché. A chaque spectateur d’en tirer sa conclusion.
C’est une ’’belle illustration’’ du message à faire passer, et c’est peut-être ce qui est le plus dérangeant.