Azzedine Chabane
Annoncé recemment, le double message du président Jacques Chirac au président Abdelaziz Bouteflika, sur les relations bilatérales et sur l’initiative Unitaid, intervient dans un contexte international troublé et à un moment où les rencontres politiques entre l’Algérie et la France sont quelque peu taries.
Depuis le tumultueux débat sur la loi du 23 février portant glorification du colonialisme et vigoureusement condamnée par le chef de l’Etat qui a rappelé le génocide commis en Algérie par la puissance coloniale et exigé un acte de repentance, seul à même d’apaiser la douleur de la mémoire collective, un silence lourd de sous-entendus est tombé sur le partenariat d’exception censé devoir sceller l’amitié retrouvée entre les deux peuples.
Le président Chirac a voulu précisément rappeler dans son message son « engagement à mener à bien le rapprochement historique » entre les deux pays car « les liens qui unissent nos deux peuples sont, à bien des égards, exceptionnels » et cela « à travers la construction d’un partenariat d’exception », qui doit être construit « dans l’esprit de dialogue et de coopération » énoncé dans la Déclaration d’Alger de mars 2003.
Cela étant, la situation qui a prévalu au moment où l’Assemblée nationale française votait triomphalement la loi inique du 23 février n’a pas varié d’un iota. L’UMP est toujours la formation dominante sur la scène politique et le courant revanchard des nostalgiques de « l’Algérie des colonies » demeure aussi résolu que jamais.
A cela s’ajoute un contexte global qui fait que l’amalgame entre islam et terrorisme est devenu un acte banal au point que l’opinion publique voit dans tout musulman et, particulièrement, dans tout Algérien un terroriste en puissance.
Les récents propos du pape Benoît sont significatifs du malaise ambiant qui caractérise les sociétés européennes, en général, et la société française, en particulier.
M. Chirac, qui s’est réjoui des « avancées » dans le dialogue mené entre l’Union européenne et l’Algérie, a exprimé « l’appui de la France » afin de « donner toute sa vigueur au processus de Barcelone qui vise à faire de l’espace euro-méditerranéen une zone de prospérité, de sécurité et de stabilité accrues ». Il aurait, sans doute davantage, aimé se réjouir de l’avancée qualitative du partenariat entre Paris et Alger, n’eussent été les manoeuvres et les coups de Jarnac de certains lobbies, résolument hostiles à une relation franco-algérienne apaisée, fructueuse et exemplaire quant à l’amorce d’une véritable coopération fondée sur le respect et l’intérêt réciproques.
Malheureusement, les faits sont têtus qui révèlent la fracture encore douloureuse d’une histoire dont on dit qu’elle est commune pour transcender pudiquement les aspects les plus barbares comme la torture, les charniers, les déportations, l’asservissement d’une population entière devenue taillable et corvéable à merci.
Au fait, l’Assemblée française vient d’adopter une nouvelle loi qui pénalise la négation du génocide arménien, histoire de dire clairement à la Turquie qu’elle peut attendre encore longtemps aux portes de l’Union européenne.
Mais pourquoi le génocide arménien ? Sans doute que le pape, défenseur irréductible de l’identité chrétienne de l’Europe, connaît la réponse.