L’État d’Israël devait apporter une sécurité aux Juifs ; il a créé un piège dont les habitants vivent sous la menace d’un danger constant, état de fait qui n’est vécu par aucune autre communauté juive. L’État d’Israël devait réduire en poussière les murs du ghetto ; il a dorénavant édifié le plus vaste ghetto de toute l’histoire juive.
L’État d’Israël devait être une démocratie ; il a instauré une structure coloniale combinant les éléments évidents de l’apartheid avec l’arbitraire d’une occupation militaire illégale. Israël, en 2008, est un État dans l’impasse. Soixante ans après sa création - en dépit de ses nombreuses réalisations dans les domaines de l’agriculture, de la science et de la technologie, et malgré une puissance militaire importante équipée d’armes dignes du Jugement dernier - nombre de ses citoyens ont la mort dans l’âme, préoccupés par leurs inquiétudes existentielles et la crainte face à leur avenir.
Depuis sa création, Israël a vécu par l’épée. Une suite incessante de "représailles", d’opérations militaires et de guerres est devenue la drogue essentielle à la survie des Juifs israéliens. Maintenant, près de huit années après le début de la seconde Intifada palestinienne, Israël est enfoncé jusqu’au cou dans le bourbier de l’occupation et de l’oppression, tout en poursuivant l’expansion des colonies et la multiplication des avant-postes, se répétant ad nauseam à lui-même que "nous n’avons pas de partenaire pour la paix".
Quinze ans après les Accords d’Oslo, nous vivons dans une réalité coloniale aveugle. Quarante ans après la conquête par Israël des derniers territoires palestiniens en Cisjordanie et dans la Bande de Gaza, plusieurs millions de Palestiniens sont cloîtrés dans leurs villes et villages. Le terme "État palestinien" - qui, pendant des années, incarnait l’option pacifique - est utilisé par nombre de politiciens israéliens comme phrase mirage, un tournant dans la réalité de l’occupation : "Dans le futur", chuchotent-ils avec un clin d’oeil, "l’entité palestinienne dans les Territoires pourra être appelée un "État"". Entre temps, Israël amplifie la dévastation en Cisjordanie et dans la Bande de Gaza, semblant déterminé à réduire en poussière le peuple palestinien.
Face au large camp des Israéliens qui soutiennent le Mur de séparation - ceux qui, tant à droite qu’à gauche, sont terrifiés par les démons de la démographie, comptant sans cesse la population afin de savoir combien de Juifs et d’Arabes sont nés et sont morts chaque semaine, combien de Juifs et d’Arabes vivent dans le pays et dans chacune de ses régions - il est vital de proposer une perspective différente, basée sur les principes suivants :
La coexistence des peuples de ce pays, basée sur une reconnaissance mutuelle, un partenariat d’égal à égal et l’application d’une justice historique.
Nous sommes unis dans une critique du sionisme puisqu’il est basé sur le refus de reconnaître le peuple indigène de ce pays et sur la négation de leurs droits, leur dépossession et sur l’adoption d’une séparation en tant que principe fondamental et mode de vie. Ajoutant l’insulte à l’injure, Israël persiste dans son refus d’assumer la moindre part de responsabilité dans ses méfaits, de l’expulsion de la majorité des Palestiniens il y a plus d’un demi-siècle, à la présente transformation en ghetto des villes et villages de la Cisjordanie. Ainsi , où qu’ils soient, une frontière est dessinée entre les Juifs et les Arabes, afin de distinguer et séparer les élus et les damnés.
La reconnaissance du Droit au retour fait partie intégrante de nos principes. Corriger l’injustice continue infligée aux réfugiés palestiniens , ce n’est qu’ainsi que nous cesserons d’être affligés par les démons du passé et les damnations, et que nous pourrons nous sentir à demeure dans notre patrie commune. Depuis plusieurs années déjà, les dirigeants israéliens se sont employés à dépeindre les Palestiniens comme des sous-humains. Leurs efforts ont été secondés et appuyés par des membres de l’élite culturelle, des barons des médias, des fonctionnaires vaniteux et des auteurs médiocres, à gauche comme à droite. C’est avec dégoût que nous rejetons cette arrogance raciste, sachant que les Palestiniens, comme tous les autres peuples, ne sont ni des démons ni des anges, mais simplement comme nous, c’est-à-dire des humains, créés sans distinctions.
Nous sommes convaincus que si nous abordons la paix et la réconciliation avec les Palestiniens avec l’esprit ouvert et la volonté, nous trouverons en eux ce avec quoi nous les aborderons : un esprit ouvert et une volonté. Nous sommes des frères et soeurs et non pas des ennemis éternels comme le professent les empoisonneurs de puits.
Existe t-il une autre solution pour ces peuples que vivre perpétuellement en guerre ?