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Commentaire de D.

sur Politesse et prétexte, ou l'art de parler de la police en général pour éviter de parler des délinquants en détail


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D. (---.---.7.151) 21 octobre 2006 05:43

“Je vous demande de ne pas me faire de procès d’intentions. Ce que je dis d’une forme précise de délinquance urbaine ne permet pas de préjuger de ce que je pourrais dire sur d’autres formes de délinquance.”

L’article se mêle - et se noye - dans la masse de ceux presque servis au jour le jour depuis l’an dernier. Il n’est pas question de prétendre savoir ce que vous diriez d’autres formes de délinquance, mais de souligner, si ce n’était pas encore fait, que vous vous focalisez sur une seule et semblez être plus intolérant envers celle de l’article qu’envers les autres.

“C’est pour l’instant là que les fonctionnaires de police sont régulièrement pris pour cible. Ca ne veut pas dire que tout est parfait ailleurs, ça veut dire qu’il y a là un problème manifeste.”

Ce que tout le monde voit aux journaux de TF1, ce n’est pas bien compliqué à répéter, quand bien même vous y mettez du style et tenter d’aller plus en profondeur. Personne ne nie qu’il se passe ce dont vous parlez, et c’est effectivement un problème, sauf que là où une partie de la population fait erreur, c’est dans sa demande à propos façon de traiter le sujet, car on n’a jamais rien résolu en provocant et en pratiquant le tout répressif. Une rage que l’on essaye de faire taire par la force, elle finit toujours par ressortir, par la force aussi.

“Le nombre ne fait pas la verité. Quoi qu’il soit, je ne suis pas grand amateur personnellement de Nicolas Sarkozy, mais je refuse l’idée absurde que les problèmes auxquels la France doit faire face découlent de sa personne. Ils n’ont pas attendu sa présence pour se faire jour.”

Si le nombre ne fait pas la vérité, alors là, nous aurions presque pu être d’accord... sauf qu’il ne s’agit en aucune façon d’annoncer détenir une vérité mais d’une vision de la réalité, médiatiquement bien trop transfigurée pour qu’elle paraisse crédible à ceux qui vivent en cité.

“Je ne crois pas que tous les adolescents brûlent quotidiennement des voitures et attentent à la vie de serviteurs de la Nation. On est loin de Cercle des Poètes Disparus. Il faut que jeunesse se fasse, c’est le propre de l’adolescence que de contester, parfois de manière très stupide. C’est le devoir des adultes de ne pas jouer aux adolescent attardés. Et c’est le devoir de la société de faire que l’adolescence, les gesticulations existencielles des adultes en devenir, ne nuisent pas trop aux citoyens.”

Il faut chercher le rapport entre demander un peu de compréhension, d’approche et de dialogue, et le fait d’apparaître comme adolescent attardé. Je vous remercie d’à nouveau prouver votre capacité à généraliser : je n’ai pas un seul instant dit que “tous les adolescents” commettent des délits, mais de Désir de dépasser une limite imposée. Si vous ne voyez pas la nuance, ce n’est pas grave.

“On a osé parler de « sentiment d’insécurité » pendant trop longtemps, a croire que tout n’était que question de sentiments.”

Renseignez-vous peut-être quelque peu sur les peurs globales et les diverses façons dont elles sont mises en place.

“Je ne me souviens plus d’émeutes dans les années 1980 qui aurait duré plusieurs mois. Quoi qu’il en soit, ce qui compte n’est pas tant le passé que le présent et l’avenir. En bref, que l’insécurité soit neuve ou ancienne ne change rien au fait que les citoyens méritent la sécurité, le droit de vivre dans un état de droit.”

Le passé a pourtant amené le présent qui lui même découlera sur l’avenir. Bien sûr que les citoyens méritent la sécurité, mais il serait bien d’éviter ces discours paranoïaque, un peu. On dirait vraiment que le danger est à chaque coin de rue, alors que ce n’est pas vraiment le cas. Ca ne l’est que pour ceux qui préparent une “expédition” en cité comme d’autres préparent un safari...

“Mais les élements factuels qui nuisent à l’image de ces zones sont bien des faits de délinquance ou de criminalité. Doit on cesser de parler de ces faits, pour faire chic ? Le nom Tarterets est pour le moment célèbre. Aurait-on du taire ce nom, mettre la tête dans le sable, dans l’espoir que le silence améliore les choses ?”

La principale chose qui nuit à l’image de “ces zones” (on a particulièrement l’impression que vous n’y vivez pas, sur ce coup, mais on peut se tromper), c’est le regard et l’à-priori négatif au possible de la part de ceux qui n’y vivent pas. Alors quand en plus, ces personnes sont influentes d’une façon ou d’une autre, l’objet, le lieu visé, ne s’en voit que terni.

“Qu’est-ce qu’on dit quand on brûle la voiture de son voisin ou l’école du quartier ? A mon sens, ce faisant, on hurle qu’on est un ennemi de la société, un individu nuisible à écarter de la société pour le bien être de tous les citoyens environnants. On le doit aux citoyens. Pourquoi parlez-vous toujours des racailles qui cassent et jamais des victimes ? Croyez-vous que les gens sont heureux de ne pas avoir d’école, de transports en commun, doivent attendre les pompiers longtemps parce que ces derniers attendent d’être protégés par la police ?”

Il y a toujours un message, et quand on refuse de tenter de le décoder, on s’éloigne de plus en plus d’une résolution du problème. Je ne dis pas que chaque pyromane en herbe a un message à faire entendre, souvent c’est pour épater la galerie de copains et ces sortes de considérations stériles. Mais il y a tout de même un message en sous-jacence.

Je ne parle ni des “racailles” (car je n’appele personne comme ça), ni des victimes. Je réagis à une article qui surfe sur la vague de la masse d’articles déjà écrits sur ce sujet, qui tend à laisser s’établir l’incompréhension et la distance, toujours en faveur de la répression abrupte. Si l’article s’était focalisé sur les victimes, au vu de la façon dont vous analysez les choses, je n’aurais peut-être rien dit. Simplement parce que l’on serait peut-être d’accord sur le fait qu’il vaut mieux une bonne prévention plutôt qu’une inondation de sanction. Quand la sanction est là, c’est parce qu’il y a déjà une victime, lieu commun certes mais à rappeler tout de même. Voilà à quoi la police de proximité aurait pu servir, sur le long terme.

“A vous lire, on croirait qu’il n’y a en banlieue que les racailles et les services publics.”

J’ai réagi à votre article parce que vous donniez cette impression, n’inversez pas...

“Lorsque vous parlez de « l’intolérance policière », vous ne parlez certainement pas d’un phénomène quantifiable comme plus de 60 voitures brûlées par jour.”

C’est assez stupéfiant de lire qu’une bavure policière sur un être humain est quantifiable en regard d’un objet matériel ! Est-ce parce que ce n’est pas aussi fréquent que ça ne peut pas être à considérer dans l’étendue de la hargne que certains peuvent avoir dans cités méconnues de vous autres ?

“Pour ma part, si je suis confronté à une victime de viol ou d’un simple vol avec violence, je n’ai pas le culot d’attendre de sa part qu’elle respecte son agresseur.”

On ne parle alors pas de la même chose. Car sur ce sujet je suis du même avis. Je disais cela à propos de tous ceux qui souffrent d’une stigmatisation, alors qu’ils ne sont responsables de rien. Croyez-vous qu’il est agréable, ou tout simplement supportable, de voir son identité être régulièrement contrôlée, simplement parce que l’on est originaire d’Afrique du Nord ? Ne pensez-vous pas que rien que ce fait porte déjà atteinte à une forme de respect mutuel nécessaire ? Ainsi, alors que l’on n’est responsable de rien, et à force de subir ces contrôles, voire ces suspicions, on peut devenir plus arrogant, et peut-être finir par être agressif envers ladite police. Ne dites pas non si vous n’avez jamais été confronté à la situation...

“Je persiste à vous dire que je n’adhère pas un seul instant à l’idée que les policiers devraient jouer à ami-ami avec les délinquants. Le respect viendra des citoyens lorsqu’ils pourront vivre dans un état de droit. C’est à dire quand on cessera de détruire leurs biens, quand on cessera de les menacer ou de les agresser.”

Une police de proximité n’est pas là pour faire ami-ami avec les délinquants, ou alors c’est que vous n’aviez pas confiance en cette police de proximité-là, et insinuez presque une forme de complicité. Vous savez, à propos d’avoir attendu ou non, il n’y avait pas besoin d’un service de proximité, pour qu’il y ait des complicités : les ripoux ne datent pas d’hier, et les arrangements divers pour obtenir des informations non plus.

“Vous disiez-vous même que cela fait au moins 10 ans que la délinquance dont nous parlons croit. Pourquoi dites-vous que la police de proximité fonctionnait bien alors que rien ne permet un tel constat ?”

Car ça ne pouvait pas être du jour au lendemain, ni d’une année sur l’autre. On n’a pas laissé le temps de voir si ça fonctionnait ou pas : un avide a voulu faire du chiffre, et on a effectivement du chiffre. Si ce n’est qu’il semble que les plaintes sont moins enregistrées qu’avant...

“Les racailles ne sont pas des dizaines de milliers de gens. Leurs victimes quotidiennes oui. Quant aux stigmates, je crois que c’est aussi leurs victimes quotidiennes qui les portent. Mais apparemment ces gens là ne vous intéressent pas, sauf pour les insulter pour leurs choix électoraux certes malheureux.”

Merci pour la nouvelle généralité : ainsi, il n’y a que ceux que vous traitez de “racailles” qui pouvaient, non, qui Devaient se sentir visés par ces provocations ? Désolé, mais nombreux sont ceux qui comme moi se sont senti visés par cette haine subite indirectement déversée à l’encontre de tous les gens (hormis ceux qui réclamaient qu’on “supprime la racaille”, c’est à dire la droite extrême et affilités) qui vivent en cité. A propos de l’intérêt enfin, cessez de considérer que parce que l’on réagit lorsqu’on cible exagérément une partie de la population, on ne se soucie forcément pas des victimes. Si vous vouliez des preuves que l’on s’intéresse aussi aux victimes, il fallait en parler dès votre article, et non pas quand l’usure argumentaire pointe son nez. Les victimes ne sont pas des poupées vaudou à agiter devant le désir de répression, elles sont celles qui subissent en premier lieu le manque crucial de prévention, d’écoute, d’aide, de compréhension, de respect, bref de main tendue. Mais vous ne pourriez comprendre ce que c’est qu’être vu comme systématiquement suspect (non ça n’autorise pas de faire payer ça à des innocents, n’en comprenez pas des choses qui n’ont aucun rapport), presque dès que vous mettez un pied dehors (image, d’où le « presque »)... Il y a bien des êtres plutôt négatifs au fond d’eux mêmes, oui, mais ils ne le sont pas moins que ceux qui en appellent à des bûchers contemporains pour sanctionner les vilaines sorcières...


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