Depuis Cro-Magnon, les hommes n’ont rêvé que de progrès matériel, sans que jamais ne les quitte l’idée d’un paradis à la fois immatériel (parceque dans l’avenir ) et matérialiste, où toutes les misères matérielles seraient résolues. Messie et Monde futur. Le matérialisme philosophique est la transposition moderne de ce rêve.Il est donc, lui aussi, une forme de spiritualité.
A force d’appliquer leur intelligence à perfectionner leur outillage, certes il leur est arrivé, de temps en temps, de croire qu’ils avaient atteint un sommet de perfectionnement : il faut bien profiter un peu de ses acquis en se reposant sur ses lauriers, mais le rêve continuait tout seul,et ils finissaient par croire que là était la voie ; la vie, la vérité, vers la synthèse dialectique esprit/ matière, tout au bout du progrès matériel continuel, incessant, lancinant. A chaque époque, ce ne fut jamais qu’un début, on continuait le combat.
Et le fait est que, matériellement parlant, seule l’augmentation (parfaitement capitaliste en son procès)constante de possibilités matérielles permettait celle d’une relative généralisation du mieux-être. D’ où que le Monde Futur, dernière phase avant le grand soir, ne pourrait advenir, selon son dernier prophète K.Marx,
que dans un pays industriellement avancé, ce qui correspondait bien à l’idée que tout le monde s’en faisait
à l’époque.
On sentait bien, pourtant, que cette progression ne suffirait pas toujours, et qu’il y aurait un moment où il faudrait un virage brutal, qu’on a appelé révolution, parce que, finalement ça ne résolvait pas tout.
Le matériel progressait, mais n’ apportait tout ce qu’on en avait attendu. Alors, il fallait la révolution !
C’était parfaitement pensé,sans doute ! Alors, on l’a fait ! Mais ce n’était pas celle-là qu’il fallait faire !
La synthèse dialectique n’est pas possible. On ne peut pas avoir le beurre et l’argent du beurre, c’est bien connu, n’est-ce pas ? On ne peut surtout pas "servir deux maitres à la fois", hein !
On peut encore moins monter deux chevaux à la fois (ou courir deux lièvres), surtout s’ils ne vont pas dans la même direction.
Ca, c’est la prétention moderne. On a voulu à la fois être curé (et qu’est-ce qu’il se débite comme moraline !)
et chef d’entreprise (moderne conquérant, le kshatrya d’ aujourd’ hui), un rôle de travesti au théâtre.
Mais qui vous dit que tout le monde aurait envie de devenir spiritualiste ? Il faut de tout pour faire un monde,
et, dans le domaine de l’esprit, "il y aura beaucoup d’ appelés mais peu d’élus", on sait ça aussi, ou on devrait s’en rappeler.
C’est vrai, ce que dit Hiéronymus, que René Guénon ne mène pas si loin que ça : après avoir convaincu ses lecteurs que "chacun pouvait trouver dans sa propre tradition la voie de la vérité ", voilà , ce dont Pierre Dac s’est bien retenu, qu’ il se fait schleuh !