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Commentaire de armand

sur Défense de l'identité de la France : honnie hier, chérie aujourd'hui


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armand (---.---.35.183) 23 octobre 2006 13:58

Merci Anthony pour ces interrogations pleines de bon sens et de sincérité.

Je ne vois pas ce en quoi une identité se résume à la bouffe, et les MacDo, restaus chinois, couscous font désormais partie du mode de vie français, comme les Starbucks d’ailleurs. La société française a toujours suivi des modes de consommation pris à droite et à gauche : les premiers « fast-food » ou déjeuners « à la fourchette »s’ouvrirent sur les boulevards dans les années 1840, le Chinatown du XIIIe arrondissement et la Goutte d’Or du XVIIIe à Paris font tout autant partie du patrimoine parisien que St Germain des Prés (influencé par les caves de jazz des années ’50, d’ailleurs). Et je n’ai pas besoin d’évoquer l’anglomanie des pubs et la germanophilie des brasseries, là encore « parisiennes » depuis plus de cent ans. Au début du XIXe siècle, la cuisine française c’était essentiellement des ragoûts parfumés à l’oseille, servis dans des auberges dont la saleté épouvantait les voyageurs britanniques, et quelques nouveaux restaurants,qui accouchaient de ce qui allait devenir la cuisine bourgeoise. Tous ces apports se sont mélangés harmonieusement : je ne suis pas un fan des Starbucks, mais il vaut mieux un Starbucks qu’une nième boutique de fringues, sociabilité oblige.

Etre franças, il me semble, c’est une affaire d’« esprit de groupe », le terme inventé par l’historien maghrébin Ibn Khaldoun (merci Aïcha, où que tu sois, et malgré nos différends, de m’avoir soufflé le mot arabe, « Assabiya »). C’est le sentiment d’un devenir et d’un héritage communs, et surtout, d’une cohésion nationale. A cela l’éducation joue un rôle indispensable, et je pense que c’est là que le bât blesse.

En effet, prof en fac, je vois arriver des quantités d’étudiants qui ne savent rien de l’histoire de France, des changements de régime, ne situent plus la Commune, Louis-Philippe ou la IIIème République. En littérature, tous les grands auteurs du XIXe sont à la trappe, même les romantiques qui enchantaient ls jeunes quand j’étais lycéen. Oh, ils ont tous eu à étudier Céline, dont l’écriture abjecte est à la mesure de sa soumission aux nazis... Or, s’il n’y a pas un héritage culture susceptible d’être transmis avec souplesse mais sans faiblesse, comment assimiler les nouveaux-venus ? A titre d’exemple, j’ai fait traduire en thème un extrait des « Désenchantées » de Pierre Loti : tout y est, la rupture du jeûne du Ramadan, les jeunes femmes en tcharchaf tiraillées entre la tradition et la modernité, le tout présenté avec respect et émotion. Mais, je sais, Pierre Loti est ringard, et mes étudiants n’en avaient jamais entendu parler.Pourtant, cet auteur francissime (officier de marine de son état) les a passionnés. Pour finir, je crois que la trahison des élites, et de l’Etat surtout, porte une lourde responsabilité dans cet état de fait. A se contenter de gérer la « gouvernance », en abdiquant tout pouvoir de décision face aux insurrections larvées des banlieues, face à la dictature des marchés financiers apatrides au dehors (les deux étant liés), nos politiques nous offrent un piètre exemple de patriotisme.


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