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Commentaire de phil2nim

sur Onfray ? Fallait pas l'inviter !


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phil2nim phil2nim 24 janvier 2009 03:53

Peut-être faut-il réarticuler les affirmations synthétiques du discours de Michel Onfray.
La civilisation occidentale commence avec la fin de l’Empire romain,( le point de bascule à mon sens est le Concile de Trente qui fige la doctrine catholique), et s’achève avec la Révolution française :

- Prolégomène : la domination capitaliste du monde trouve son origine ontologique dans la doctrine que la Terre est donnée à l’homme pour qu’il s’en serve. La contrepartie en est de "répendre la ’bonne nouvelle’" christique, que les biens de ce monde n’ont pas de valeur comparés au royaume des cieux.

- Corolaire : les biens matériels sont utilisables "ad majorem gloriam deo", pour la gloire de dieu, ce qui jusifie le pillage des conquis, et des ressources naturelles.
Jusqu’à la Renaissance, le monde occidental s’oppose à l’Ottoman et à l’islam naissant, au nom du tombeau de Jerusalem.


- Réforme et matérialisme. C’est la Réforme qui va introduire la valorisation de l’homme par les bien matériels, le
déculpabiliser de s’intéresser aux choses terrestres : les biens accumulés sont la récompense de la piété. Les biens
matériels peuvent être privatisés, individualisés ; alors que dans la première phase, ils étaient propriété des rois
ou du clergé. C’est une accumulation de biens non productive.
Avec ce mouvement, qui s’accompagne des débuts de la banque aux Pays Bas, des grandes découvertes, le régionalisme va exploser.
Dès lors, on passe à l’échelle planétaire, on dispose d’une doctrine d’oppression, et de l’ingénérie financière capitaliste.
Les politiques européennes bellicistes des XVIe, XVIIe et XVIIIe S vont pousser les royaumes à s’endetter auprès des banquiers, souvent juifs (c’est la seule profession autorisée), pour une autre raison dogmatique qui est que l’usure est prohibée par les Chrétiens. Ce tabou est également transgressé par les Protestants.

Que sont les Lumières dans ce contexte ?

- La Révolution copernicienne : on assiste à un véritable renversement du paradigme, avec l’idée que la Terre
est un ensemble fini et connaissable et l’apparition de la raison cartésienne. L’idée que le réel est analysable en tant que tel et non seulement un effet du discours mythique ; le décrochage avec l’obligation de suivre les règles artistotéliciennes permet dès lors une démarche scientifique, dont la trace est à trouver dans l’Encyclpédie. Ebahissement, volonté de rendre compte et de comprendre.
La compréhension mathématique des phémomènes permet le développement technologique et le dépassement de l’imitation de la nature. C’est aussi la sanctification du progrès en tant que but pour l’humanité.

C’est la façon dont j’interprète le bornage proposé par Onfray.

On peut considérer que la période qui suit la Révolution française est la consolidation de la structure, que l’ère industrielle n’est que l’extension de cette logique d’appropriation et de domination, qui la mène à sa perfection qui est aussi sa perte.

- La deuxième révolution capitaliste : en 1776, le banquier Rothschild invente la création de capital négative : fondée sur le crédit, la méthode permet de générer plus de valeur et d’intérêts que la simple usure ; la confiance devient un maître mot qui perdure aujourd’hui comme condition indispensable au fonctionnement du système.
 Avec ces pratiques, la Bourgeoisie accumule du capital, mais n’a pas le pouvoir. La domination du pouvoir royal sur les marchands, les banquiers devient de plus en plus intenable : les Etats sont ruinés et les particuliers riches.
 L’aspiration de ces derniers au pouvoir va être dopée par la conquète de l’Amérique, qui actualise la possiblité d’un pouvoir non absolutiste, rendant la monarchie insupportable.
 Le dogme de la sacralité divine du roi est mise à mal. La coupure d’avec le Tiers Etat fait de l’aristocratie et du
 clergé des despotes incompétents, gras dans des pays faméliques.
 Si sa fin est marquée par une tête royale roulant dans la sciure, la civilisation occidentale serait donc
 cette construction accrochée au divin, fondamentalement féodale.
 
Je pense pour ma part que les XIXe et XXe sont inclus, car le plus fondamental à mes yeux n’est pas l’accrochage divin du pouvoir, mais le dogme de la domination et la possession autorisées de la nature, recommandées par Dieu, qui sous tend encore aujourd’hui la mystique étasunienne.

La structure décrite plus haut se retrouve en partie de nos jours : le capitalisme triomphant de la société du spectacle est coupé d’une part grandissante de la réalité sociale, le marché absorbant automatiquement toute subversion, qui se traduit, comme le souligne Onfray, par un besoin de spiritualité, par un écoeurement du matérialisme que traduisent fort bien les conversions au bouddhisme et à l’islam, ainsi que le retour de Benoît XVI à plus de mystique et de tradition dans le catholiscisme, et le poids grandissant des évangélistes.

Certes le capitalisme aveugle continue de transformer en monnaie les forêts primaires, les enfants du tiers monde et le travail de tous... Mais l’esclave n’a plus le coeur à l’ouvrage.
Pour reprendre Hegel, la relation du maitre à l’esclave suppose une contrepartie. Celle-ci s’amenuise avec le progrès technologique. En 1880, Godin fondait sa cité ouvrière fourièriste pour donner des conditions de vie décentes à ses ouvriers. Aujourd’hui, les patrons se contentent fort bien d’employés jetables qui dorment dans leur voiture.
Le social n’est plus le sujet. Les employés sont les serviteurs des machines qui font la productivité. Encore une
décennie et les machines seront parfaitement autonomes, l’internet des objets naissant leur aura donné leur autonomie.

Le seul problème résiduel étant que sans redistribution de la richesse, pas de consommation, pas de marché.
Le système court à son blocage comme nous le voyons aujourd’hui, les ruses de l’ingénérie financière (fausse monnaie) trouvant leurs limites...

Je ne partage pas le point de vue de Onfray sur l’usage de la violence. D’une part parce qu’il est démontré que l’on
fait plus d’efforts pour posséder une chose que l’on convoite que pour défendre quelque chose dont on a joui.
(On ne mourra certes pas pour un canapé), d’autre part car la confiscation et le monopole de l’usage de la force
par les Etats sont pratiquement complets, du moins en Europe et en Asie, un peu moins aux USA. Mais en revanche, la puissance de
ces Etats est tellement énorme que, sous peine de scandale, elle ne peut être utilisée (voir Gaza), et si elle doit
l’être, elle peut être définitive (imaginons que Dobeuliou ait eu l’idée de vitrifier l’Afghanistan, il en a les
moyens.)
Les extrémistes ne sont dangereux que tant que l’Occident ne sort pas l’attirail barbare.Sinon leurs secondes sont comptées...
Le danger actuel, c’est que la disparition de la masse monétaire ne s’accompagne de la disparition des populations correspondantes pour rétablir la parité antérieure, et que les think tanks d’Obama décrètent que les bénéfices seraient supérieurs aux inconvénients... "we are ready to lead once more..." dit Obama dans son discours inaugural.
Les années qui viennent seront passionnantes comme la fin de l’Empire...


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