La mission de l’université n’est pas simplement de proposer des formations professionnelles pointues. Même si le patronat français, un des plus bêtes au monde, insiste bien souvent là-dessus. Au Japon ou aux USA vous pouvez travailler dans le commercial avec un diplôme de philo. Et si vous vous donnez la peine d’interroger les étudiants, ils ne veulent surtout pas de formations qui se dévaluent d’une année sur l’autre, de diplômes trop spécialisés, de filières qui à peine crées ne conviennent plus au marché de l’emploi. Ils sont demandeurs de culture générale aussi, de cours qui les font réfléchir, qui leur ouvrent les horizons. Et j’en parle en connaissance de cause, travaillant dans une région qui est loin d’être privilégiée.
Contrairement à ce que vous insinuez, la demande de culture est très grande, et souvent de la part des étudiants les moins aisés.
Avez-vous essayé de décrypter le jargon qu’on nous impose actuellement pour définir et évaluer les formations en termes de ’compétence’ ?
Quant aux mandarins, le reconnais qu’on pourrait se demander quelle est la différence entre la dictature exercée par quelques facs parisiennes qui trustent le instances comme le CNU, les jurys de concours, et la dictature annoncée des présidents de fac. Je trouve les deux détestables.
Il existe un rapport sénatorial, vieux d’il y a dix ans, qui pointait les faiblesses des facs. Dans sa ligne de mire, notamment, le recrutement qui se fait à la suite de l’examen d’un dossier et d’un entretien d’une quinzaine de minutes. Si peu pour obtenir un poste à vie. Mais je constate que rien n’est prévu pour y rémédier (entretiens durant toute une journée, rencontre avec tous les collègues éventuels, faire un cours, etc.) Et ce rapport, sérieux et sensé, a été ignoré.
Au lieu de maintenir ce fonctionnement dictatorial, on aurait pu introduire plus de collégialité. Savez-vous à quel point les décisions dans les facs américaines, citées souvent en exemple, doivent tenir compte de tous les contrepouvoirs ?
Dans la loi LRU on a combiné l’obsession de l’évaluation bureaucratique à l’anglaise et la précarité et la concentration des pouvoirs à l’italienne.