Petit travail de synthèse :
La Corée du Nord vient de lancer son V-2 amélioré, surnommé le Paektusan (du nom du sommet le plus élevé du pays), et n’a donc plus que 64 ans de retard en recherche astronautique sur les allemands, devenus dés 1945 américains ou russes, comme nous avons déjà pu le spécifier ici naguère pour les premiers. Glouchko est resté dans l’ombre de Korolev (sinon davantage encore, car il a connu le goulag !) et n’a eu droit qu’à des honneurs posthumes, lui aussi, c’est pourquoi nous allons profiter du lancement de cette fusée nord-coréenne pour le saluer davantage, lui à qui on doit le véhicule le plus efficace et en même temps le plus rustique jamais créé, j’ai nommé la R-7, la fusée qui a lancé aussi bien le Spoutnik, premier satellite de tous les temps et les vaisseaux Vostok, Voskhod et Soyouz.
Depuis, des tuyères orientables ont été élaborées, mais elles nécessitent des technologies bien plus sophistiquées, essentiellement liées aux canalisations, qui, à un endroit au moins doivent être souples, ce qui n’est pas une mince affaire quand on connaît le comburant. Les A-4 (V-2) capturées étaient devenues en URSS des RD-1 : les russes en lancèrent onze avant de réussir à contrôler leur tuyère efficacement. l’Arabie Saoudite en 1980, alors que ce pays avait entre temps largement contribué financièrement à la réalisation de la bombe pakistanaise (et donc de l’obtenir en échange, à tout parier). eux aussi...Israël !
Au Etats-unis, c’est le Redstone datant de 1953 ( !) qui lui est comparable, et qui lui ressemble comme deux gouttes d’eau, lui aussi est directement issu des V-2. Von Braun s’en servira pour venger l’affront soviétique et lancer le premier satellite US et pour lancer les deux premiers cosmonautes US, Shepard et Grissom, qui n’orbiteront pas. Comme propergols, c’étaient en ce qui les concerne de l’acide nitrique et du kérosène, plus faciles à produire et à stocker que l’oxygène liquide. L’engin volait lui aussi dès 1953. En Iran, le lance-satellite Shahab est visiblement dans la droite ligne des engins de Glouchko ou de Makeev. Dans un engin bien exigu de 1300 kg seulement en orbite. La fusée volera, mais toujours de guingois. Quatre modèles de cette fusée monstrueuse en feront les frais et seront détruites en altitude ou après quelques secondes de vol seulement.
La technologie nord-coréenne, comme l’iranienne est donc passablement dépassée dès sa naissance. Les fusées à propergols liquides ne peuvent raisonnablement pas devenir des menaces sérieuses : seules les fusées à propergols solides le sont : elles peuvent rester pendant des années au même endroit et être tirées en quelques heures voire quelques minutes. Or, aujourd’hui, la Corée a pris le chemin le plus traditionnel et le plus simple pour fabriquer des fusées : celui des engins à propergols liquides, justement. Le seul danger potentiel de la Corée du Nord et sa technologie primitive réside dans le contrôle de la fabrication d’étages de fusée à poudre.
L’événement coréen, que l’on peut trouver surmédiatisé dans le sens d’effrayer les populations pour condamner une nouvelle fois le pays et son régime, est donc à remettre à sa place exacte, celle d’un gargarisme de dictateur ; celle d’un homme éperdu de pouvoir cherchant encore une fois à se lustrer le poil en annonçant à sa population qu’un satellite tourne autour de la terre en chantant des hymnes à sa gloire, alors qu’il gît au fond du pacifique, collé au troisième étage de la fusée qui n’a pas réussi à tenir toutes ses promesses.
Non, décidement, en astronautique, on en revient partout aux bonnes vieilles recettes, et la Corée du Nord n’échappe pas à la règle.