Chère Vivi,
Une fois de plus vous n’expliquez rien mais vous assénez vos « vérités » dont je pourrais moi aussi juger qu’elles ne valent même pas les « trois sous » que vous m’accordez généreusement.
J’écris effectivement que les faux témoignages et les subornations de témoins sont monnaie courante et je le maintiens parce que c’est une réalité.
Que vous ne le voyiez pas ou que vous fassiez semblant de ne pas le voir revient à peu près au même.
J’écris que les faux témoignages et les subornations de témoins sont monnaie courante mais je pourrais aussi bien écrire que la Corse crève de la violence et qu’elle est une des régions européennes où les meurtres et les assassinats ( près de 400 restés impunis depuis le début des années 90 ) sont les plus fréquents…
23 en 1991.
42 en 1992.
37 en 1993.
40 en 1994.
61 en 1995…
Voulez-vous, pour votre gouverne, que je continue cette liste jusqu’en 2009 ?
Je pourrais tout aussi bien écrire que « l’Etat colonial » a bien moins tué que les guerres intestines entre nationalistes.
Pour étayer mon propos, je pourrais citer la guerre de 1990, pendant la période d’éclatement du FLNC.
Ou celle de 1993, lorsque l’assassinat de Sozzi déclencha des meurtres en série.
Ou encore celle de 1995-1996, lorsque les affrontements nationalo-nationalistes précipitèrent dans la mort un bonne vingtaine d’anciens « fratelli di lotta ».
Pareil en 1999, lors de nouvelles divisions internes…
Voulez-vous que je vous donne des noms, des faits, des dates, des lieux ou me croyez-vous sur parole ?
Je pourrais écrire aussi que depuis 1985, sans discontinuer, les deux départements corses sont parmi ceux qui détiennent le record du nombre de morts par accidents de la route. Refus du port de la ceinture de sécurité. Vitesse excessive. Non respect du code de la route. Incivilités en tous genre. Sentiment d’impunité.
Et je pourrais ajouter que 60 % des victimes de ces accidents ont entre 18 et 30 ans… Vous avez certainement vu ces stèles et ces petits bouquets le long de nos routes…
Je pourrais citer le drame de Furiani qui demeure sans doute, à vos yeux énamourés, un signe de vitalité de la société corse.
Je pourrais vous parler de cette majorité silencieuse (rassurez-vous, vous n’en faites apparemment pas partie) qui vit dans la peur et qui condamne officieusement parce qu’elle a compris que la violence n’est plus circonscrite à des cercles restreints mais qu’elle peut atteindre n’importe qui de plein fouet.
Je pourrais vous citer tel maire bien corse d’un village bien corse qui déclare : « Il ne faut plus parler de code d’honneur ou de loi du silence. Ce qui domine aujourd’hui, c’est la trouille. »
Et je pourrais ajouter que lorsqu’une société aussi fragile que la société corse crève de peur, c’est qu’elle ne va pas tarder à crever tout court.
Je pourrais vous raconter ces gosses complètement paumés qui n’imaginent pas sortir sans arme parce qu’ils ont grandi dans ce climat de violence où le plastiqueur, le racketteur, l’assassin sont tenus pour des héros.
Je pourrais vous entretenir de tel dirigeant « clandestin » qui fit grassement son beurre en vendant le stock d’armes de guerre de son mouvement aux adolescents de Lupino et de Montesoro à la seule condition qu’ils se tiennent prêts à agir le jour où « on » le leur demanderait.
Bien droite dans vos « scarpi grossi », chère Vivi, vous préférez penser que je suis mal dans ma peau, que je m’adonne à je ne sais quel business inavouable et que, Corse mais renégat, je dénigre quand je ne fais que décrire une réalité que vous ne voyez même plus parce que vous aimez mieux votre aveuglement qu’un début de prise de conscience.
C’est cette cécité qui vous fais écrire « que le Corse est bon, il est juste et courageux, il a le sens des valeurs, celui de l’honneur… » ce qui est à peu près aussi vain et creux que de dire que le Chinois est fourbe et cruel, l’Arabe sale et voleur et le Juif avare et malhonnête.
« Je suis libre jusque dans mon âme, » écrivez-vous de manière un peu grandiloquente.
Pour ma part j’ignore si l’âme existe et puisque vous vous sentez libre, je vous laisse donc libre de soutenir Colonna ou un autre.
On a les héros que l’on peut et je vous abandonne très volontiers ceux que vous vous êtes choisis.
Quoi que vous en pensiez, j’aime la Corse.
Par dessus tout mais d’un amour qui, fort heureusement, ne ressemble pas au vôtre.
Et c’est parce que je l’aime par dessus tout que je souffre de la voir aux mains de gens qui, comme vous, l’étouffent en prétendant l’étreindre.