« Pourquoi dites vous que les lycées professionnels sont des voies de garage ? Avez vous des chiffres pour étayer votre affirmation ? », m’interroge Cathy30.
A partir d’un article qui met en cause la fiabilité des chiffres, je ne répondrai pas par d’autres chiffres, mais parlerai d’expérience.
J’ai enseigné en Lycée Professionnel dans différentes académies, et partout j’ai fait le même constat. Les élèves y sont orientés par défaut, en fonction des lacunes qui ne leur donnent pas accès au lycée général. Et dans un système qui reproduit les inégalités sociales, il s’agit le plus souvent des plus modestes. Il arrive que la situation soit caricaturale. Senlis, dans l’Oise, est une ville bourgeoise. Son Lycée Professionnel n’accueille que les déshérités des cités alentour (Creil, notamment) ; les senlisiens, eux, vont au lycée général. Même constat en Franche-Comté ou en Corse. J’en profite pour dire que les problèmes liés à l’échec scolaire ne se rencontrent pas qu’en banlieue parisienne, contrairement à une idée reçue. La différence se situe plus au niveau des types d’établissements et des types de filières. Il existe dans le Val-de-Marne (94) une cité scolaire qui juxtapose un lycée général et un Lycée Professionnel. Le premier ressemble à n’importe quel lycée général de province, le second est classé ZEP et comprenait en novembre 2005 quelques incendiaires. Nicolas Sarkozy y a fait une visite « surprise » voilà quelques jours. Evidemment, le chef d’établissement lui a présenté les élèves « présentables » du côté général, pas les autres...
Ne voyez du reste aucun mépris de ma part concernant les élèves qui se trouvent en CAP, en BEP ou en Bac Pro (je ne leur consacrerais pas une partie de mon temps sinon). C’est un simple constat. Un regret aussi : le fait que des démagogues comme Karg Se (plus haut) se servent du leurre du collège dit « unique » pour faire comme si tous les élèves étaient amenés au même niveau. C’est complètement faux : les inégalités sociales perdurent, et la sélection est faite par discrimination entre orientation en lycée général et pseudo-orientation en Lycée Professionnel.
Je salue au passage Paul Villach pour sa contribution, et ne peux que recommander la lecture de ses articles, tous d’une grande qualité.