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Commentaire de Kalki

sur Le capitalisme est-il face à une mutation ?


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Kalki Kalki 4 mai 2009 12:39

Extrait de « La liberté, pour quoi faire ? » (titre du livre de bernanos, et citation de lénine)

J’ai plusieurs fois désigné ce monde devant lequel l’humanité hésite encore, se demandant si nous nous y engagerons ou non, car il ne ressemble guère à celui que nous lui avons promis, sous le nom de Monde Nouveau. C’est là une expression inexacte, une espèce de licence de vocabulaire, analogue à celle qui nous fait dire que le soleil monte ou descend dans le ciel. Car ce monde n’est pas nouveau. Capitaliste ou marxiste, libéral ou totalitaire, il n’a cessé d’évoluer vers la centralisation et la dictature. Le régime des trusts ne saurait nullement s’opposer au collectivisme d’État, puisqu’il n’est qu’une phase de l’évolution que je dénonce. Autant vaudrait dire alors que le tétard s’oppose à la grenouille. Les trusts ont concentré peu à peu la richesse et la puissance autrefois réparties entre un très grand nombre d’entreprises, pour que l’État moderne, le moment venu, distendant sa gueule énorme, puisse tout engloutir d’un seul coup, devenant ainsi le Trust des Trusts, le Trust-Roi, le Trust-Dieu... Non, ce monde n’est pas nouveau. Il est devenu possible dès que la déspiritualisation de l’homme -et particulièrement de l’homme d’Europe- s’est trouvé atteindre un certain degré de gravité, comme un pauvre diable, par exemple, ne présente les symptômes du scorbut qu’au moment où sa dévitaminisation est trop profonde. Nous ne nous trouvons pas en présence d’une civilisation nouvelle, apparue brusquement dans l’histoire, c’est la civilisation humaine sortie de sa route grâce à des circonstances exceptionnelles, et engagée dans une voie sans issue. Je ne puis m’empêcher de dire qu’on se paie notre tête lorsqu’on s’efforce de nous faire croire que cette contre-civilisation de la bombe atomique est une fatalité de l’histoire. Il était fatal, en effet, que l’homme construisît des machines, et d’ailleurs il en a toujours construit. Il n’était nullement fatal que l’humanité consacrât toute son intelligence et toute son activité à la construction des mécaniques, que la planète entière devînt une immense machinerie et l’homme une sorte d’insecte industrieux. Qu’on comprenne bien ma pensée ! Nul ne songe à dénier aux hommes d’aujourd’hui le droit de fabriquer des machines, mais on leur refuse celui de sacrifier, par avance, à la machinerie universelle la liberté des hommes de demain, dans l’illusion imbécile qu’on ne peut se sauver des machines que par les machines. À quoi bon multiplier les machines si l’énergie nécessaire à leur fonctionnement se trouve étroitement contrôlée, jour et nuit, par un petit nombre de techniciens ? L’abaissement d’un simple levier au fond d’une centrale électrique ne suffit-il pas pour priver de lumière et de chaleur des millions d’hommes ? Dans ces conditions, avouez qu’il est comique d’entendre les imposteurs parler des machines avec une dévotion religieuse. Jamais une société n’aura été pourvue de moyens aussi efficaces pour les contraindre et, au besoin, les anéantir. À la fameuse devise jacobine : « La Liberté ou la mort », le monde totalitaire et concentrationnaire pourra bientôt répondre : "La servitude ou la mort".


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