Est-il légitime, justement, de différencier « racisme » et « islamophobie » ? Le débat est certes complexe, raison pour laquelle Dewinter s’infiltre dans les ambiguïtés qu’il charrie avec intelligence. Le MRAX et KIF KIF répondent en distinguant deux éléments : la critique légitime d’une religion en tant que telle d’une part, et l’exploitation des peurs des individus au détriment des pratiquants de cette religion d’autre part.
En effet, nul ne peut contester, aujourd’hui, le droit de critiquer une religion, en ce compris le « droit de blasphèmer » : dans une société démocratique, il est permis de critiquer une religion, dans tous ses aspects. Soutenir ou défendre le contraire constituerait une grave entorse à la liberté de pensée, de conscience et de religion. L’Islam n’échappe pas à la règle. Il n’y a aucune raison pour que cette religion ne puisse être critiquée dans ses aspects négatifs, comme toute autre conviction religieuse ou philosophique d’ailleurs.
En revanche, se servir d’une religion comme média pour atteindre un groupe de population déterminé à des fins haineuses ou discriminatoires est illégitime et même condamnable. C’est cela, l’islamophobie en réalité : utiliser les préjugés ou la peur, représentés par l’altérité d’une religion, l’Islam, pour attiser la haine, susciter le rejet ou stimuler des réflexes ou pratiques discriminatoires contre les citoyens musulmans. La comparaison permet véritablement d’en prendre la mesure : en effet, d’aucuns, même pas les « ultra laïques », ne se sont jamais qualifiés de « christianophobes », et pour cause, puisqu’ils ont toujours eu pour souci de critiquer la religion chrétienne seulement, et non de discriminer les citoyens chrétiens.
L’opinion publique ne doit donc pas être dupe : l’islamophobie, telle que la prêche et la pratique Filip Dewinter, constitue bel et bien une forme de racisme et d’incitation à la haine raciste. D’ailleurs, même si l’interview ne vise qu’une religion et pas une communauté, il est cependant clair que, dans les faits, la communauté musulmane en Europe et plus précisément en Belgique a, dans son ensemble, une origine étrangère (essentiellement marocaine, mais également turque, pakistanaise, albanaise, etc.), de telle sorte que, sous prétexte de phobie contre une religion déterminée, les populations avec des origines ethniques ou nationales étrangères sont également visées, au travers de leur religion islamique.