Les nombres données par l’OMS sont-ils
fiables ? C’est une question posée.
La polio ne peut se comparer au cancer
en terme de dépistage car une paralysie se repère immédiatement.
Les chiffres de l’OMS sont les cas notifiés et non pas les cas réels
qui pourraient être plus important, on ne peut l’exclure a priori.
En réalité, on part des cas de PFA (paralysies flasques aiguës)
qui sont assez faciles à repérer puisque la personne est paralysée.
Pour plus de 80% des cas de PFA, 2 échantillons de selles doivent
être recueillis à plus de 24h d’intervalle et dans les 14 jours qui
suivent le début de la paralysie. Ces échantillons sont ensuite
expédiés dans de la glace à un laboratoire agrée auquel ils
doivent parvenir en bon état. Le laboratoire détermine alors la
nature du virus en cause.
Je pense qu’on peut dire de façon
certaine que tous les cas déclarés à polio à virus sauvage de
type 3 par exemple sont bien de ce type. De même pour ceux qui
dérivent d’une souche vaccinale de type 2 comme au Nigeria.
Les cas sont-ils tous connus ? En fait,
la définition de l’élimination du virus dans une région est assez
inattendue : il est considéré comme éliminé quand on ne le
rencontre plus chez les malades ET que le système de surveillance
est capable de dépister chaque année au moins 2 cas de PFA non
poliomyélitique pour 100 000 enfants de moins de 15 ans. Autrement
dit, pour pouvoir affirmer qu’il n’y a plus de polio il faut trouver
suffisamment d’enfants paralysés comme le ferait la polio mais sans
que ce soit un virus polio ! Cette condition vise à mesurer
l’efficacité du système de surveillance : si celui-ci ne fonctionne
pas, il pourrait ne trouver aucun cas de polio mais cela ne
prouverait rien quant à sa disparition.
Le nombre de doses reçues par les
victimes est sans doute plus difficile à évaluer avec certitude
mais l’OMS n’a pas de raison particulière de majorer ce nombre, bien
au contraire, dans ses publications officielles. Elle nous a
suffisamment habitué à faire preuve de discrétion sur les cas
vaccinés et de tapage sur les non vaccinés pour douter du
contraire. Quand de nombreux cas de polio dérivés de souche
vaccinale de type 2 étaient apparus au Nigeria en 2007 elle avait
d’abord envisagé de n’en rien dire et n’avait révélé l’affaire
que de nombreux mois après. Ces révélations assez inattendues sur
le nombre considérable de doses reçues par un nombre très
important de victimes sont faites au moment où la situation est
devenue meilleure en Inde et où de nouvelles stratégies laissent
quelques espoirs à l’OMS.
L’OMS a sans doute aussi pris
conscience que l’éradication de la polio ce n’est pas pour demain et
que pour pouvoir maintenir encore longtemps à bout de bras son
programme d’éradication il fallait lâcher une partie de la vérité.
Car là aussi l’OMS nous a habitué à quelques manipulations : en
novembre 2002 elle affirmait que l’élimination du virus polio
sauvage était réalisable pour janvier 2003 à condition de disposer
de tant de millions de dollars et que si ces sommes n’étaient pas
immédiatement trouvées elle serait repoussée à Pâques 2003 et
couterait beaucoup plus cher. Pâques, la Trinité...ça rappelle une
chanson ! En fait l’OMS savait.. Mais que ne fait-on pas pour avoir
des fonds...
Bernard Guennebaud