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Commentaire de Olivier Perriet

sur Todd ou la tentation de la Prophétie


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Olivier Perriet Olivier Perriet 23 juillet 2009 13:55

J’ai lu l’ouvrage aussi, et le narcissicme que décrit Todd des nouvelles « élites universitaires de masse » semblait pour le moins s’appliquer à lui-même : le côté auto-complaisant du bouquin (moi Emmanuel Todd, qui a approché les chefs d’Etat mais qui n’a pas été écouté et qui vient faire la leçon, etc...) était un peu gonflant. Passons.

Sarkozy symptôme plutôt qu’erreur de casting, évidemment, il n’y a qu’à voir quel est le discours dominant les revendications « d’opposition » : « on voudrait des sous ! » comme l’a bien vu Patrick Sébastien.

Cependant, son analyse du système éducatif, de la « stagnation culturelle », et de « la fausse idéologie nationale républicaine » me semble critiquable :
il semble appeler de ses voeux « une extension à l’ensemble de la population de l’éducation supérieure » (p 80) afin de retrouver une homogénéité culturelle. « Qui, au Moyen-âge, aurait pu concevoir un monde globalement alphabétisé ? »
Cependant, il indique lui-même qui si la population a appris à lire, ce n’était pas à cause des lois Ferry ou Guizot, mais bien parce que lire était utile (p 73).
Or, en quoi un enseignement supérieur de masse, qui rallonge d’autant l’entrée dans la vie active et l’autonomie des jeunes, serait-il utile ?
Selon lui, et probablement a-t-il raison, si les émeutiers de novembre 2005 ont détruit des écoles, c’est parce que le chômage de masse, les bas salaires à la sortie, et la compétition scolaire renforcée leur font considérer le collège et le lycéee comme des escroqueries (p 109).

On pourrait poursuivre le raisonnement que l’auteur ne développe guère :
si l’enseignement paraît si répressif, n’est-ce pas justement parce que l’idéal d’un enseignement supérieur pour tous est inculqué aux élèves, ce qui produit frustrations et mal-être lorsque les résultats ne sont pas là ? N’est-ce pas justement cet égalitarisme qui engendre une telle haine ?
Quant à la rareté des débouchés, qui touche également les éduqués supérieurs (et ça Todd n’en parle pas autrement qu’implicitement lorsqu’il évoque la « plèbe universitaire », et la « compétition scolaire » p 83 ), n’est-ce pas la preuve que, pour l’heure, un enseignement supérieur étendu à tous n’a pas « d’utilité » ?
Lorsqu’il parle du Moyen-âge qui était incapable de penser un monde alphabétisé, cela indique implicitement que l’horizon de l’enseignement supérieur pour tous est un moyen terme, voire un (très) long terme. En attendant, on fait quoi ?

Quant à la fausse idéologie nationale républicaine, se démonstration c’est que Sarkozy est à la fois ultra libéral et républicain. Méfions-nous des démonstrations basées sur le comportement de Sarkozy, que Todd définit justement comme sans idéologie. Si le national-républicanisme professe que « tout était mieux avant( p47) » (ce qui n’est d’ailleurs pas dit par beaucoup de ces « nationaux républicains »), cela n’entraîne aucune disqualification : on ne crée rien ex-nihilo, et beaucoup d’idéologies ont trouvé leur inspiration dans le passé sans tomber dans le passéisme comme il fait semblant de le croire.


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