L’idéologie de la privatisation à tout va laisse en effet un bilan mitigé. Elle aura en tout cas permis aux hommes politiques de se déresponsabiliser (« je ne peux rien faire, c’est du ressort du privé »), ce qui n’a pas peu contribué à la désaffection du politique. Au niveau démocratique, le contrôle par l’Etat (lui-même contrôlé par les électeurs) fait place à des instantces non démocratiques (à moins de cautionner le terme de démocratie actionnariale). Tout n’était certes pas parfait dans l’ancien modèle (poids des syndicats, manque de transparence à l’égard des citoyens...). Une solution alternative à la privatisation aurait pu être l’européanisation de certains secteurs.
En tout cas, au niveau de l’efficacité, le remplacement d’un monopole publique par un monopole de fait privé n’est pas un progrès. Même en absence d’un tel monopole privé, les résultats ne sont pas garantis. Ainsi, le black-out énergétique, en provenance de l’Allemagne, pays ayant fortement privatisé son secteur énergétique, sonne comme un rappel de la fameuse crise californienne. De toute façon, si on admet que la gestion du privé peut être bien plus efficiente sur le court terme, notamment en ce qui concerne l’attribution de dividendes, sera-ce le cas sur le très long terme (investissements massifs dans le secteur de l’énergie) ?
Quelque part, il faut être bien naïf pour considérer que la compétition entre entreprises puisse déboucher systématiquement sur la satisfaction de l’intérêt général. De manière plus générale, la finalité de l’entreprise privée est la maximalisation du profit, et tous les moyens seront bons : corruption, entente illicite, création artificielle d’un besoin par un marketing agressif et non respectueux de l’environnement (prospectus), produits à courte période de vie...