Le monde selon monsieur Lallement ; extrait :
L’ancien ministre Alain Peyrefitte l’avait déjà exposé : parmi les sociétés, il y en a certaines, que nous appellerons
sociétés de défiance ou sociétés antilibérales. Dans ces sociétés, on admet que lors d’un échange, l’une des
parties s’enrichit et l’autre s’appauvrit. Les riches y sont très mal vus, car on s’imagine qu’ils se sont enrichis au
détriment des autres. On considère que la loi doit intervenir dans tout contrat pour protéger la partie réputée faible
et, plus généralement, intervenir en toute circonstance pour protéger les gens contre eux-mêmes, c’est-à-dire les
empêcher de faire leurs propres choix. Tel est le cas de la France d’aujourd’hui.
Les autres sociétés sont des sociétés de confiance ou sociétés libérales. On y admet que dans un échange
librement consenti, chaque partie s’enrichit nécessairement. Les riches y sont très bien vus car on reconnaît dans
leur richesse la preuve qu’ils ont aidé les autres citoyens à s’enrichir. On y considère que toute loi conçue pour
protéger un individu contre les décisions qu’il serait susceptible de prendre a pour effet non de le protéger mais de
l’opprimer. Tels sont les pays prospères et telle sera la France dont je veux. À noter que même dans une société
de confiance, il y a des gens qui s’enrichissent honteusement : ce sont ceux qui usent de l’échange forcé, du vol,
du racket, de l’impôt.
Moi, quand un trader encaisse des bonus de 10 millions, je suis vachement heureux, parce que je sais qu’il m’a aidé à m’enrichir ; bon, ça met un peu de temps à venir, c’est pas évident sur mon compte en banque, mais j’ai vachement confiance, et, surtout, j’ai pas envie de l’opprimer...