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Commentaire de claude

sur Le don d'organes, c'est comme les antibiotiques, c'est pas automatique !


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claude claude 24 octobre 2009 01:59
Définition médico-légale de la mort
  • Définition médico-légale de la mort

L’état de la mort semble ne pas avoir été très bien cerné par la législation. Si tout le monde reconnaît que la mort se caractérise par une décomposition du corps, il est des états menant irrémédiablement à cette décomposition sans que la décomposition soit installée ; c’est par exemple le cas de la mort cérébrale, l’activité cardiaque étant présente. Se posent alors des questions morales, voire religieuses : une personne dans cet état doit-elle être considérée comme morte, ce qui permet par exemple le prélèvement d’organe, ou bien doit-elle être considérée comme vivante, donc maintenue en vie de manière artificielle ?
(...)
En France, la médecine légale a donné une définition de la mort permettant de trancher la question. Cette définition est d’une part une définition négative : un individu est mort s’il ne présente pas de signes de vie apparents comme la respiration, la circulation sanguine, l’activité cérébrale. On s’accorde pour considérer la mort comme l’arrêt des fonctions vitales. D’autre part on trouve une définition positive qui complète la précédente : un individu est mort s’il possède au niveau de son phénotype macroscopique des signes dit positifs de la mort.

Les signes positifs de la mort sont tardifs, mais leur présence atteste d’une manière irréfutable la mort. Le sujet est tout autant délicat que la mort ne survient pas de manière généralisée sur l’ensemble du corps.

Tous les organes ne meurent pas en même temps et tout dépend du « type de décès » : lors d’un arrêt cardiaque, les organes ne meurent pas dans le même ordre que dans la cas d’un accident de voiture ayant entraîné un traumatisme crânien irréversible. Il est important de préciser que l’on distingue plusieurs types de mort : la mort cérébrale, la mort cellulaire, la mort de l’organe, la mort de l’organisme.(...)

a) les définitions scientifiques.

1. Les définitions médicales et administratives. Les médecins ont constamment changé leurs critères de la mort. Scientifiquement, on est donc amené à distinguer bien des morts : clinique, cérébrale, physiologique, biologique, fonctionnelle ...

1) la mort clinique. C’est la constatation par un médecin des premiers signes d’apparition de la mort. Il constate d’abord la disparition du regard, devenu fixe, avec la dilation da la pupille, qui devient ovale On peut parler de mort respiratoire que le médecin cherchait aux siècles derniers en mettant un miroir sur la bouche du patient pour voir s’il y avait ou non formation de buée. Puis vient la mort cardiaque par arrêt du coeur sans qu’on ait réussi à le faire battre à nouveau (massage, choc électrique, défibrilateur ...). Le médecin pratique des tests : à la fluorescéine d’Icard (1948), à l’H²S avec un papier qui noircit par élimination du soufre, ou à l’éther qui lors d’une piqure intramusculaire ressort en jet en cas de mort (1958).

2) la mort encéphalique ou cérébrale. Le problème d’une nouvelle définition de la mort est apparu en 1959 à la 23ème réunion internationale de neurologie lorsque Mollaret et Goulon ont décrit le « coma dépassé » qui survient lors des réanimation. Les intellectuels ont alors admis que l’homme est plus dans son cerveau que dans son coeur et que l’on est mort alors que tout le corps est « vivant » mais que le cerveau ne fonctionne plus. Le fondement de cette nouvelle définition est purement philosophique : la pré-éminence du cerveau. On accorde soudain plus d’importance au cerveau qu’au coeur.

c) la mort administrative. Il existe maintenant une définition officielle de la mort en France. C’est celle de la Circulaire Jeannenay n° 27 du 24/04/1968, qui, en fait, reprend mot à mot la description de Mollaret et Goulon de 1959, avec ses trois conditions :

1. la constatation des quatre signes fondamentaux : 1. abolition contrôlée de la respiration spontanée 2. abolition de toute activité des nerfs crâniens 3. perte totale de l’état de conscience, à l’exception des réflexes du tronc et des membres 4. un électroencéphalogramme plat pendant trois minutes.

2. l’élimination des étiologies simulatrices comme intoxication, hypothermie, troubles métaboliques ...

3. un délai d’observation minimum, mais variable selon l’étiologie, où ces signes sont constants.(...)

D’ailleurs une enquête récente sur les médecins préleveurs montrent qu’eux-mêmes ne parlent de mort qu’après leurs prélévements. Le plus révélateur de l’absence de définition incontestable de la mort est l’étude de l’heure du décès portée sur le certificat de décès. Selon l’enquête de France Transplant cela peut être selon les hôpitaux : l’heure d’entrée au bloc opératoire pour les prélèvements, l’heure du clampage de l’aorte ou bien l’heure du débranchement du respirateur.(...)

4) La mort physiologique, dite mort cadavérique. Puis va s’installer progressivement la mort physiologique avec le froid du cadavre et sa paleur caractéristique puis vient la paralysie et s’installe la rigidité cadavérique. Le cadavre se vide.

5) la mort biologique. Enfin arrive la mort biologique qui suit avec l’explosion des cellules et des tissus, la liquéfaction, la putréfaction avec émission de méthane et d’odeurs nauséabondes, enfin les chairs qui se détachent des os. Mais ceci ne se produit pas toujours et ne résout pas encore les problèmes des corps incorruptibles, myroblytes, des cadavres parfumés, etc. Ils ont été étudiés en particulier par le Dr. Larcher dans La mémoire du soleil (Désiris, 1990).

6) la mort fonctionnelle. Mais cela n’est pas suffisant car il reste la mort fonctionnelle : toutes les fonctions ne sont pas encore abolies et sur des cadavres la barbe et les ongles peuvent encore continuer à pousser.

2. Le mourir. Nous concluons donc qu’il faut remplacer « la mort » ( l’acte instantané) par « le processus du mourir », ou transformation progressive avec bien des étapes successives. La mort n’existe pas en tant qu’état soudain et instantané : vivant ou mort, en un instant on serait passé de l’un à l’autre. Ce qui existe à sa place c’est « le processus du mourir », un long et lent processus avec bien des étapes qui font que l’on est de plus en plus mort. Ceci est conforme à la définition de Bichat : la vie est "l’ensemble des fonctions qui résistent à la mort".


Léon Schwartzenberg
Source
 : Léon Schwartzenberg, Requiem pour la vie, Paris, Le Pré aux Clercs, 1985, p. 226-229 (extraits).

Texte
Un individu est considéré comme mort, il est décrété « mort » lorsque son cerveau est arrêté, lorsque ses cellules cérébrales n’émettent plus d’ondes électriques capables d’impressionner l’électo-encéphalogramme. Le sang peut circuler, le coeur battre, les poumons respirer, cet individu est mort puisque sa conscience est abolie et que tout porte à croire, après vingt-quatre heures de silence électrique, qu’elle ne renaîtra plus. C’est la mort du cerveau, de la conscience, qui signe et définit la mort. [...]

La nouvelle définition de la mort est d’ordre métaphysique, La mort d’un être humain est différente de toutes les autres espèces vivantes. S’il ne continue à vivre que biologiquement, dépourvu de conscience, il est considéré comme mort, parce qu’il est mort à l’espèce humaine. [...] Un être humain privé de sa conscience est considéré comme mort, alors même que son enveloppe charnelle vit encore.


 
  • Thèse : La définition de la mort

    Directeur de thèse : Gayon, Jeana

    Inscription : 2003 à Paris 1

    Axe de recherche : Philosophie de la biologie et de la médecine

    Résumé : Le projet de ce travail est la définition de la mort et l‚évolution des idées depuis 1800, avec Bichat, jusqu‚à nos jours. Notre thème s’articulera autour de quatre axes de recherche principaux :

    • un axe médical, de l’arrêt cardio-respiratoire du 19ème siècle à l’arrêt cardio-circulatoire du milieu du 20ème siècle, la description du coma dépassé (Goulon, 1959) jusqu’à l’époque actuelle, avec la redéfinition médicale de l’état de mort constatée.

    • un axe médico-légal, de l’arrêté de 1947 à la loi de 1978, reprise par le décret de 1996, qui fixe les critères stricts de constatation de la mort encéphalique.

    • un axe philosophique et scientifique
      , de Bichat qui décrit les différentes étapes de la mort et l’enchaînement des phénomènes déclenchés par la destruction cérébrale, en passant par Claude Debru, qui analyse très finement le processus de la mort décrit par Bichat, d’abord localisé puis qui se généralise. Pour François Dagognet, qui note que la mort ne survient que très rarement d’un seul coup, les tissus cessant de vivre à des moments différents, celle-ci mérite d’être repensée et même décortiquée. Pour Canguilhem, l’individu est un « imprévisible quoique déterminé ». De même la mort est déterminée, dans le sens où la duplication nucléotidique a des limites, où la cellule est réceptrice à des signaux qui induisent sa mort, par l’apoptose entres autres. Cependant, la mort peut aussi être floue, d’où l’exigence de critères très stricts de mort encéphalique. Mais, comment caractériser ce processus irréversible conduisant à la déstructuration de l’organisme ? Quand et où commence-t-il réellement ?
    • un axe éthique, où se posent avec acuité des questions sur le moment de la mort, depuis la possibilité de transplantation d’organe et sur la notion d’assistance au mourant. En ce qui concerne l’être vivant quelle est la frontière entre foetus et embryon ? Est-elle d’ordre moral ou biologique ? Considère-t-on un ovocyte fécondé comme un être vivant unique dont il a toutes les potentialités (Canguilhem) ? La réponse actuelle est d’ordre légal mais le questionnement éthique subsiste.

      L’on peut, en conclusion, dire que la mort ne peut être réduite à un instant. Elle est progressive et ce processus réclame de la part des vivants une attention, un accompagnement, une inquiétude de l’autre à l’égard du mourant et jusqu’à l’irréversibilité, le maintien d’une qualité de vie et d’un respect qui la transforment en une qualité de la mort.

    Fiche mise à jour le Lundi 08 septembre 2008


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