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Commentaire de sisyphe

sur Castration chimique : Justice Fast-food


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sisyphe sisyphe 27 octobre 2009 04:22

Armand,


"La seule justification de l’Etat c’est la protection qu’il offre aux administrés, en échange de laquelle ils ont abdiqué leur droit de se faire justice eux-mêmes. C’est ce que les philosophes décrivent dans le passage de l’état de nature à l’état de société. Mais seulement à condition que l’Etat remplisse ce rôle. Or il ne le remplit pas s’il revient sur des peines d’emprisonnement, relâchant avant terme des criminels dangereux.« 

Oui ; seulement à condition que l’état remplisse ce rôle.
Or ; et d’une, dans une démocratie digne de ce nom, le pouvoir judiciaire est séparé du pouvoir législatif ; ce qui permet d’avoir une justice indépendante, et sereine, ce qui n’est plus le cas dans notre petite autocratie ; d’où des jugements évidemment favorables aux »gros« , et impitoyables pour les »petits« , comme tu le dis toi-même.

- et de deux ; le rôle de la prison (là, nous ne sommes plus dans le domaine de la justice, mais dans celui de l’état), est, en même temps, l’accomplissement de la peine, ET les mesures de réinsertion ; rôle où l’état français est totalement défaillant. Et ce n’est pas anecdotique ; ça conduit, justement, une fois la peine accomplie, à relâcher des prévenus toujours en proie aux mêmes pathologies, quand les conditions de détention ne les aggravent pas.
Chacun sait que, telle qu’elle existe aujourd’hui en France, la prison est beaucoup plus un terreau de la délinquance et de la criminalité, qu’un passage de réadaptation et de réinsertion.

Et si la loi sur la castration chimique passe, je ne me fais aucune illusion, sur l’impunité des »gros«  ; adeptes, par exemple, du tourisme sexuel (plus pratique à l’étranger, évidemment), de passer à travers les mailles, quand les malades (car il s’agit bien de malades) eux, en place de mesures thérapeutiques, se verront ainsi condamnés.

Par ailleurs, comme le dit 1984, ce qui est en cause, dans le comportement de la déviance sexuelle, »l’arme", comme tu dis, ce n’est pas le sexe, mais bien le cerveau. Un castré chimique pourra toujours céder à ses pulsions, sous l’emprise de pulsions incontrôlables.

Quand à la castration organique, alors là, on est dans un retour à la barbarie, à l’effacement de siècles de civilisation, carrément hallucinant.

Tout ça, pour UN cas de récidiviste.
Tu raisonnes comme si on était entouré de détraqués sexuels, avec une contagion exceptionnelle de cas, alors que ce n’est absolument pas la réalité ; regarde les statistiques ; elles sont tout à fait parlantes.
(extrait :

Cinq ans après une libération, le taux de retour en prison d’anciens détenus, tous délits et crimes confondus, est en moyenne de 41 %. Mais en ce qui concerne les homicides, le chiffre tombe à moins de 0,5 %, et pour les agressions sexuelles sur mineur à 1 %. L’information prend le contre-pied les déclarations de Nicolas Sarkozy qui, durant la campagne présidentielle, avait dénoncé un taux de récidive « considérable ».

« La probabilité que son enfant soit agressé par un récidiviste est quasi nulle »

«  Forcément, cela influence la population, regrette Pierre Tournier. Je me rappelle avoir écouté une émission radio, après le meurtre de la petite Julie pour lequel le multirécidiviste Pierre Bodein avait été condamné en première instance. À l’antenne, un père de famille témoignait du fait qu’il ne laisserait plus sortir sa fille seule. Si, à chaud, sa réaction est normale, elle est déraisonnable et disproportionnée. La probabilité que son enfant soit agressé par un récidiviste est quasi nulle. »

Les statistiques du chercheur n’appellent pas de contestation de la part de la chancellerie, dont les propres chiffres confirment la rareté de la récidive criminelle, même à partir d’une autre approche. Dans son bulletin Infostat, le ministère de la justice publiait ainsi en 2004 une étude démontrant que seuls 2,2 % des condamnés pour homicide et 1,3 % des violeurs avaient déjà un antécédent criminel.

Il faut cesser, sous couvert de protéger la population, d’agiter l’épouvantail et le spectre des sanguinaires à la porte de chacun de nos foyers, de faire voter des lois de plus en plus régressives et liberticides ; punition, bien sûr, sans laxisme, mais également prévention, et mesures de réinsertion, sont les bases d’une société où la justice, la même pour tous, est dans son rôle, et l’état dans le sien.

Je te renvoie également à cet excellent article d’ Henry Moreigne, paru sur AVox voici moins d’un mois.

La civilisation, c’est la protection des citoyens, certainement pas la loi de la jungle, ni celle du talion.


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