@MCM
Influence des Sionistes Chrétiens sur la politique américaine
et sur le reste du monde
Les Européens, notamment les Français, connaissent mal sinon pas du
tout la force politico-religieuse que représentent les Sionistes
Chrétiens américains. De ce fait ils n’attribuent pas l’attention
nécessaire à ce mouvement, qui a pesé sur la politique intérieure et
extérieure américaine depuis des décennies.
En France, dans une tradition laïque bien implantée, y compris chez les
catholiques, on n’imagine pas qu’un mouvement qui de l’extérieur
ressemble beaucoup à une secte puisse exercer une influence quelconque
lors des élections, en favorisant des candidats pénétrés de sa doctrine
et décidés à dicter leurs choix aux gouvernements. Si les mouvements
politiques français se méfient des fondamentalismes religieux, c’est
surtout – non sans raisons d’ailleurs – des fondamentalismes
islamiques. De plus, la peur, justifiée par l’histoire, de paraître
favoriser la résurgence de l’antisémitisme, empêche de critiquer des
agitateurs qui, bien que chrétiens (évangélique) affichent ouvertement
leur « amour » d’Israël et leur volonté de défendre par tous les moyens
son existence. Ceci même alors que beaucoup d’Israéliens modérés
souhaiterait se distinguer d’alliés aussi encombrants et aussi
dangereux.
On trouve dans Wikipedia une analyse du phénomène qui nous parait assez
mesurée (bien que sans doute en partie inspirée des idées du réseau
Voltaire de Thierry Meyssan)
(
http://fr.wikipedia.org/wiki/Sionisme_chr%C3%A9tien). Reprenons ici le
début de cette présentation, à laquelle nous renvoyons le lecteur. Le
sionisme chrétien est le nom donné à la croyance d’un certain nombre de
chrétiens, en particulier de protestants fondamentalistes, selon
laquelle la création de l’État d’Israël en 1948 est en accord avec les
prophéties bibliques, et prépare ainsi le retour de Jésus sur Terre
comme Christ triomphant de l’Apocalypse.
Cette croyance se distingue du sionisme juif par son ancrage dans une
vision religieuse et non politique du monde. Les sionistes chrétiens
sont persuadés que le retour de Jésus provoquera la conversion des
Juifs. Ce sionisme se marie donc paradoxalement avec une certaine forme
d’antijudaïsme. Cette croyance se distingue aussi du soutien
traditionnel et non-messianique au sionisme de nombreux chrétiens
n’ayant pas volonté de convertir les juifs à terme. Il s’agit pour eux
d’un engagement moral et politique, et non évangélique.
Le terme « Sionisme chrétien » rassemble donc un ensemble de groupes
ultra fondamentalistes, croyant que la judaïsation de la Palestine
historique (Israël et les territoires palestiniens) est une obligation
divine qui ramènera Jésus sur terre, fera définitivement de lui le
Christ ou messie et assurera le triomphe du christianisme lors de
l’apocalypse.
Les racines du sionisme chrétien se trouvent dans plusieurs livres de
la Bible, en particuliers dans les visions apocalyptiques du livre de
Daniel, et du livre d’Ézéchiel, ainsi que dans l’Apocalypse du Nouveau
Testament. Les visions uniquement spirituelles et poétiques pour la
majorité des croyants sont interprétées par ces sionistes chrétiens en
réalité géopolitique.
Comme tous les protestants, ces fondamentalistes accordent une grande
importance à l’Ancien Testament mais en font une lecture littéraliste.
Ils n’admettent pas la critique historique des textes qu’ils lisent,
textes qu’ils interprètent dans une perspective messianique et
apocalyptique. Pour eux, les évènements historiques sont à lire suivant
un scénario qui conduit obligatoirement à la fin des temps et à la
rédemption. Politiquement, ils gèrent des sommes considérables,
mobilisent des millions de fidèles et utilisent systématiquement les
techniques les plus modernes pour hisser les fidèles jusqu’à l’extase
et recruter de nouveaux adeptes dans tous les milieux. Ils n’hésitent
pas à s’immiscer, y compris par la force, dans les pays à l’équilibre
politique fragile, sans crainte de provoquer des séismes qui, comme
indiqué ci-dessus, leur donnent la certitude rassurante qu’ils hâtent
l’Armagedon.
Nous avons déjà montré que ce catastrophisme apocalyptique a inspiré et
continue d’inspirer nombres de positions diplomatiques et militaires
dont en Europe l’on s’étonne qu’elles puissent être prises par un
gouvernement raisonnable, à la tête d’un grand pays scientifique. Les
erreurs imputées aux néoconservateurs ou à des gouvernants tels Bush et
Cheyney ne sont pas à leurs yeux des erreurs, même la guerre en Irak,
même les provocation à l’égard de l’Iran, de la Russie et de la Chine.
Il s’agit de processus indispensables pour hâter le chaos final.
Relations israëlo-américaines
Mais c’est plus particulièrement dans le cadre des relations
israélo-américaines que le lobby Sioniste Chrétien a fait et continue
de faire le plus de dégâts. S’appuyant sur une majorité d’Israéliens
désespérément à la recherche d’alliés, ils ont pratiquement bloqué
toutes les tentatives de négociations entre les Palestiniens et les
Israéliens. Ils ont également saboté les interventions médiatrices des
Européens ou des Etats arabes modérés. Leur influence ne fait que
croître et on ne voit pas qu’elle puisse diminuer, attisée il est vrai
par les menaces d’Amadinedjab et du Hamas qui prétendent vouloir
détruire Israël.
Nous ne pouvons traiter ici plus en détail la question très importante
de l’influence croissante des Sionistes Chrétiens sur la politique
intérieure et extérieure des Etats-Unis, comme sur l’avenir des
relations entre Israël et les Palestiniens. On trouvera dans le livre
de John Mearsheimer et Stephen Walt, The Israël Lobby and US Foreign
Policy, Farrar, Strauss and Giroux 2007 une analyse détaillée de
l’histoire du lobby juif et de sa composante le lobby Sioniste
Chrétien. Les deux ne se recouvrent pas entièrement mais disposent de
fortes adhérences.
Notons cependant que le livre The Israël Lobby a été contesté par Alan Dershowitz, un des collègues de Stephen Walt à Harvard
(
http://www.hks.harvard.edu/research/working_papers/abstract_dersh1.htm .
Quoiqu’il en soit, une vidéo qui nous parait acceptable sous réserve
d’un regard critique, précise le rôle politique des Sionistes
Chrétiens (à la date de 2005/2006).
Quelques questions
Sans endosser toutes ces positions, nous nous bornerons ici à poser quelques questions :
- Que sera l’influence du lobby Sioniste Chrétien sur les élections
américaines. Ce lobby aura beaucoup de moyens pour influencer d’abord
les votes et surtout, ensuite, les positions du candidat élu. A cet
égard, comment ses thèses seront-elles reçues par un McCain (on peut
s’en douter) et surtout par Hillary Clinton et Barack Obama ?
- Le lobby Sioniste Chrétien américain contribue-t-il aux
initiatives de Washington destinées à affaiblir l’Europe, empêcher
qu’elle puisse s’unir sur ses propres ressources économiques et
militaires, choisir librement ses alliées et sa politique extérieure.
- Le lobby Sioniste Chrétien influence-t-il, et comment, la
politique de certains Etats européens (la Grande Bretagne ?) ou de
l’Union européenne ? Il agit de l’extérieur, via le Département d’Etat
ou via la représentation américaine à l’Otan. Mais il agit aussi de
l’intérieur, par l’intermédiaire des sympathisants « atlantistes »
recrutés dans tous les Etats européens.
Enfin, pour changer de registre, que peut-on en Europe attendre du
Vatican qui, manifestement, n’apprécie guère les menées conquérantes
des églises évangéliques et de leurs composantes Sionistes
Chrétiennes ? Le Pape ne s’est pas encore semble-t-il clairement engagé
contre elles en son nom propre. Mais il semble que l’affaire inquiète
beaucoup la Curie. On notera que l’Eglise catholique d’Orient, l’Eglise
orthodoxe, l’Eglise épiscopale et l’Eglise évangélique luthérienne, par
la voix de leurs responsables locaux, ont publié le 22 août 2006 un
document œcuménique, la « Déclaration de Jérusalem sur le sionisme
chrétien » rejetant cette doctrine : « Le sionisme chrétien est un
mouvement politique théologique moderne qui adopte les positions
idéologiques les plus extrêmes du sionisme, nuisant ainsi à
l’établissement d’une paix juste entre la Palestine et Israël. [...]
Dans sa forme extrême, il met l’accent sur des évènements
apocalyptiques conduisant à la fin de l’histoire plutôt qu’au vécu
actuel de l’amour du Christ et de la justice »..