Appel de juristes contre
les « lois mémorielles »
NOUVELOBS.COM | 21.11.06
Un texte signé par 56 juristes demande l’abrogation des « dispositions visant, soit à interdire la manifestation d’opinions, soit à écrire l’Histoire et à rendre la version ainsi affirmée incontestable ».
Un appel à l’abrogation des « lois mémorielles », qualifiée d’« abus de pouvoir du législateur » et accusée de violer « à plus d’un titre la Constitution », a été lancé mardi 21 novembre 2006 par 56 juristes.
Le texte, lancé notamment par Bertrand Mathieu, directeur du Centre de recherche de droit constitutionnel, dénonce la « liste déjà longue de dispositions visant, soit à interdire la manifestation d’opinions, soit à écrire l’Histoire et à rendre la version ainsi affirmée incontestable » comme les textes sur le génocide juif (loi Gayssot), l’esclavage (loi Taubira) ou la colonisation.
« Sous couvert du caractère incontestablement odieux du crime ainsi reconnu, le législateur se substitue à l’historien pour dire ce qu’est la réalité historique et assortir cette affirmation de sanctions pénales » en cas de négation, ajoute l’appel.
« Ces lois, que les autorités compétentes se gardent bien de soumettre au Conseil constitutionnel, violent à plus d’un titre la Constitution », estiment ces juristes.
Ainsi, elles « s’inscrivent dans une logique communautariste » alors que la Constitution « s’oppose à ce que soient reconnus des droits collectifs à quelque groupe que ce soit, défini par une communauté d’origine, de culture, de langue ou de croyance ».
« Elles violent également le principe d’égalité en opérant une démarche spécifique à certains génocides et en ignorant d’autres », ainsi que « la liberté d’expression, de manière disproportionnée, mais aussi et surtout la liberté de la recherche ».
Enfin, la nature de l’infraction fait preuve d’une trop grande « imprécision ».
« Les historiens se sont légitimement insurgés contre de tels textes », estiment les juristes, alors que le mois dernier, l’association « Liberté pour l’Histoire », présidée par René Rémond, avait accusé l’Assemblée nationale de vouloir « soumettre la recherche et les enseignants » aux « vérités officielles qu’elle édicte ».