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Commentaire de alterego

sur La Servitude Climatique : un livre qui tombe à pic


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alterego 18 décembre 2009 00:31


Pour l’auteur et sa réponse à mon commentaire :

Merci d’avoir pris le temps de répondre à mon message.

 

Je suppose que les chiffres que vous avancez sont tirés du livre de Jean-Michel Bélouve.

 

C’est intéressant et très instructif.

C’est l’occasion de voir comment, à partir d’informations exactes, il est possible de construire un raisonnement apparemment juste mais conduisant à un scénario invalide.

Depuis le début du siècle dernier, l’espérance de vie n’a cessé d’augmenter ; faut-il en déduire que l’homme deviendra un jour immortel ? Évidemment non ! Cette observation n’est valable que pour une période limitée dans le temps. La prolongation de la courbe conduirait à un résultat biologiquement aberrant.

 

Le petit historique des prévisions erronées qui soutient votre thèse, curieusement, ne prend pas en compte l’histoire des découvertes et de l’exploitation des nappes pétrolifères ni leur évolution respective. Par ce seul fait, le raisonnement apparemment juste devient incorrect.

 

Au cours du XXème siècle, il n’y avait rien d’étonnant à ce que les prévisions, du fait du manque de recul historique, aient pu être entachées d’erreurs. La prospection était incomplète et en pleine évolution. Les nouvelles découvertes et les progrès techniques d’extraction invalidaient régulièrement les estimations des réserves récupérables (techniquement extractibles).

 

Petite histoire des découvertes :

L’observation de la courbe des découvertes (en moyenne mobile sur 5 ans) publiée par Exxon Mobil en 2002 explique très bien les chiffres alarmistes que vous donnez. On voit que de 1900 à 1910 la courbe oscille à un niveau relativement faible de l’ordre de 1 à 2 milliards de tonnes, 1 tonne =+ou – 7,3 barils (les besoins étaient encore très faibles aussi), Puis, suit un creux jusqu‘en 1925, d’où l’alarme donnée en 1914.

Suivent ensuite 4 pics ; autour de 1930 (20 milliards de T), 1940 (36 milliards), 1950 (42 milliards), 1965 (58 milliards).

Entre ces pics, dégringolades à des niveaux en dessous de 10 milliards. C’est précisément dans ces intervalles que les alarmes sont lancées. Jusque là, tout va bien, y a pas à s’en faire ; on découvre toujours à temps de nouveaux gisements. Les faits donnent raison aux optimistes.

Après 1965, patatras ! C’est la dégringolade. Encore un pic à 38 milliards vers 1975, un petit 18 milliards peu après 2000 et depuis rien ou presque.

On a beau faire trois fois le tour de la planète, avec tous les moyens de haute technologie les plus pointus jamais utilisés en prospection, hormis quelques gouttes, de ci, de là, on ne trouve plus grand chose d’exploitable.

 

Ah si ! Miracle,  3 ou 4 milliards de…barils (soit 550 Millions de tonnes !) au Brésil ! Ça représente grossièrement 3 pour mille (!) des réserves actuelles. Et à des profondeurs et dans des conditions qui nécessiteront des techniques et des technologies qui restent à développer et dont le coût économique se répercutera mécaniquement sur le prix du baril.

 

Et puis, comme vous dites, « on commence aussi à rêver sur les immenses réserves que recèle le grand Nord… »

 Je rêve … je rêve moi aussi, d’en " trouver parfois dans les endroits les plus inattendus, sans même le chercher"… au fond de mon jardin par exemple  !

Trêve de plaisanterie.


Tout ceci est à rapprocher de l’historique de la consommation mondiale. Et là, on ne rêve plus.

On a déjà consommé ½ ou 1/3 des réserves (suivant les estimations hautes ou basses) selon la courbe ci-dessous en barils par jour ! :

(Source : groupe TOTAL 2006)

 

Avant 1950   des broutilles

Année 1950  10

  1960  20

  1970  58

1980  62

  1990  62 après rémission à 58 entre 1980 et 1990 due au choc pétrolier.

2000  77

2010  84 estimée

2020  98 estimée

 

Jusqu’à présent, la courbe de production suivait la courbe de consommation.

Là on atteint la capacité maximum de production des puits en exploitation possible, actuels et futurs, qui vont successivement aller vers l’épuisement chacun à leur tour.

La courbe de capacité de production d’après TOTAL se poursuit ainsi :

 

Année 2010  86 à 87 possibles

Année 2020  98  maxi techniquement possible

  2030  85  idem

  2040  80

2050  40

 

Il est certain que le problème n’est pas que nous manquerons de réserves mais que nous aurons de plus en plus de mal à faire sortir ce foutu pétrole à un flux compatible avec la demande. Demande qui n’a cessé d’augmenter dans les pays industrialisés, en dehors des crises ou des guerres, et qui s’amplifie du fait de l’émergence de pays qui ont légitimement le désir d’augmenter leur niveau de vie.

 

Ces chiffres ne sont pas ceux d’écolos bobos ou ayatollahs, mais de ceux qui sont au plus près de la réalité mathématique imposée par la géologique ; les géologues et ingénieurs des compagnies pétrolières, comme TOTAL, EXXON MOBIL, SHELL, etc… qui prospectent, extraient, transforment et raffinent le pétrole brut pour les besoins de toutes sortes d’activités industrielles et privées.

 

Vous ajouter une autre courbe pour la bonne compréhension des enjeux, celle de la population.

 

 Année 1700  650 Millions d’hab.

    1800  1 Milliard

   1930  2 Milliards

   1960  3 Milliards

   1975  4 Milliards

   1987  5 Milliards

   2000  6 Milliards

 

En deux siècles, voilà la croissance du nombre de consommateurs qui ont tous besoln de pétrole pour assurer leur développement avec lesquels il nous faudra bien partager une part d’un gâteau qui va en décroissant par habitant, en dépit d’hypothétiques nouvelles découvertes.

 

Vous ne voyez toujours pas où est le problème si on ne change pas de stratégie pour gérer les richesses de la planète ?

 

Je vais me répéter :

La méconnaissance des ordres de grandeur et des échelles de temps sur le sujet est, en général, la source de tous les malentendus.

 

Désolé d’avoir été si long, mais ce n’est qu’une toute petite partie de ce qui est essentiel de connaître pour se faire une opinion valide sur le sujet.

 

Nous souhaitons tous entendre des paroles rassurantes. C’est humain, mais parfois, il faut bien se résoudre à faire face à la réalité et à l’inflexible rigueur des maths et des lois physiques y compris en géologie.

 

Merci de m’avoir lu.

 


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