Il y a une chose qu’il faut que vous compreniez : Le capitalisme n’a pas de père comme le marxisme. Il ne nous a été imposé par personne en particulier. Il s’est imposé spontanément comme un ordre naturel des choses. Si les hommes étaient naturellement enclins au don de soi, s’ils aspiraient par nature à ce modèle gratuit que vous décrivez, eh bien vous ne seriez pas en train de vous demander comment lui donner vie, car c’est lui et non pas le capitalisme qui se serait spontanément imposé.
Le but de la vie en société est d’amener les individus à travailler pour leurs semblables (en société, on est pas censé vivre comme des lions chacun dans son coin). Mais pour amener les hommes à travailler pour leurs semblables, eh bien ce n’est pas pas simple ! Car l’homme est une créature intelligente qui ne fait jamais rien sans raison. Or il n’existe que deux raisons qui puissent l’amener à travailler pour autrui : c’est l’amour de son prochain ou l’amour de lui-même. Dans une société régie par l’économie de marché, le boulanger ne fait pas du bon pain par amour d’autrui, mais par amour de lui-même. En effet, si son pain est exécrable, ses clients iront voir ailleurs et lui n’aura plus un sou.
Alors, si vous voulez concevoir un nouveau modèle de société, vous devez garder à l’esprit qu’il faut nécessairement commencer par imaginer un nouveau moyen d’utiliser l’égoïsme, la propension de l’homme à agir dans son propre intérêt , ceci afin de l’amener à agir dans l’intérêt d’autrui. Vous pouvez bien sûr préférer vous appuyer sur l’altruisme pour soutenir l’action de l’homme, mais dites-vous bien que l’amour que l’homme pourrait porter à ses semblables n’équivaudra jamais celui qu’il porte à sa propre existence et l’action qui découlera de l’altruisme n’aura jamais la même ampleur que celle qui découlera de l’égoïsme. Un exemple : Par égoïsme, l’homme bâtit des empires économiques colossaux. Par altruisme, l’homme offre de maigres soupes aux SDF en hiver.
Donc, si vous choisissiez l’altruisme pour unique soutien à l’activité dans votre société idéale, préparez-vous à vivre dans un monde de pénuries.