Je ne crois pas que Bayrou ait jamais voulu être dans l’opposition systématique. Il s’est trouvé que pendant un bon bout de temps il a été le seul à l’ouvrir (la gauche ne faisait pas le boulot). Et on peut considérer que la sortie de son livre « abus de pouvoir », trop proche des élections européennes, a brouillé le message. Le travail programmatique existe bel et bien, mais il n’est pas médiatiquement sexy, comme le démontre la campagne des régionales, durant laquelle pratiquement aucune mesure ou proposition (de qui que ce soit) n’a été présentée, critiquée ou débattue...
Sur le reste, les voix de Bayrou aux présidentielles dépassaient très largement les UDF et leurs sympathisants. Pour ceux qui avaient effectivement écouté son discours de campagne, la stratégie d’indépendance affirmée au soir du premier tour était totalement cohérente. Elle n’obérait en rien la possibilité de coopérer, en toute indépendance, avec le gouvernement à venir, dont tout le monde savait bien qu’il serait UMP. Un centre libre, indépendant et pouvant peser était sur le point de se mettre en place. Mais là, patatras, certains ont eu la trouille ou n’ont pas pu attendre, et se sont enfuis pour créer un faux nez de l’UMP, dans des conditions dégradantes (voter tous les budgets, la confiance, les lois de financement de la sécu, jamais la censure), donnant ainsi à N. Sarkozy des moyens conséquents pour évacuer Bayrou du paysage politique, comme il avait annoncé vouloir le faire.
Les résultats qu’a connu le Mouvement Démocrate sont en partie la conséquence de cette défection initiale. En face de cela, en deux ans et quelques, les nouveaux centristes ont il pesé sur la politique mise en œuvre ? Si peu. Sont-ils parvenus à faire apprécier des électeurs leur vocation de tâcherons du pouvoir, peut-être force de proposition mais indiscutablement inféodés ? Manifestement pas. Vont-ils être digérés ? C’est déjà fait. Ont-ils endommagé la possibilité de faire émerger un centre indépendant ? Sans aucun doute. Pardonnez moi si j’ai du mal à pleurer sur leur sort.