Cette affaire est à peine croyable, et en même temps significative :
nous sommes nombreux à annoncer un « nouveau moyen-âge »,
avec l’impression d’employer là une formule-choc dont nous espérons
qu’elle ne sera pas tout à fait vraie. Mais la réalité dépasse
ici les pires craintes : cela fait cinq siècles que "ceux qui
savent", ou le prétendent, n’avaient plus osé en appeler au
pouvoir pour faire taire les voix divergentes. Très exactement
depuis Galilée. On croyait que cela n’arriverait jamais plus, on
avait tort.
A l’époque le vrai pouvoir était religieux, ou plus
exactement mêlait intimement religion et politique. Aujourd’hui, les
détenteurs de l’opinion obligatoire s’adressent au ministre, et
font pression sur les media. Le plus grave est que ça ne semble pas
du tout les gêner, ce qui est l’indice d’une effrayante certitude
d’avoir en fait déjà le pouvoir. Car c’est de cela qu’il s’agit :
quand des scientifiques réclament aux autorités de faire taire les
contradicteurs, il ne peut y avoir à cela que deux raisons (cumulables ! ) :
1/
ils sont beaucoup moins sûr de leur savoir qu’ils ne l’affirment
2/
ce qu’ils attendent du savoir c’est la reconnaissance sociale, des
moyens, des postes. Dans ce contexte, la recherche, ou plutôt les
années de début de carrière passées à faire son trou dans
l’institution, ne sont qu’une étape sur le chemin du pouvoir et en
premier lieu de l’emploi à vie, quels que soient les résultats du
travail (s’il y en a un au delà de la déclinaison à l’infini des
premières publications).
Il est normal que ce soit dans la France du
CNRS qu’apparaisse en premier cet indice de féodalisation du savoir,
car c’est probablement, depuis la fin de l’empire soviétique, le
pays où l’étatisation de la recherche est la plus poussée, et la
plus caricaturale : une fois qu’on a acheté sa charge par les
premiers travaux, le plus souvent au service d’un mandarin déjà en
place, il n’y a plus rien à prouver. Ça laisse le temps d’écrire
aux journaux et au ministre.
Il
y a quand-même un autre endroit, sinon un autre pays, où le statut
des « experts » est le même : l’O.N.U et ses instances aussi
coûteuses que variées. Là aussi les postes sont distribués par
les gouvernements. C’est précisément le statut du GIEC. Ce n’est
pas un hasard. Quand cette baudruche se sera effondrée, gageons que
la France sera le seul pays où on ne s’en apercevra pas avant des
lustres, et que comme l’écrivait Maurice Druon dans un livre
clairvoyant, on y sera longtemps encore "aux ordres d’un
cadavre".