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Commentaire de François-Ferdinand De la Friche en Souche

sur Tahar ben Jelloun ou comment un « intellectuel » maghrébin fausse le discours sur l'immigration


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M. Ben Jelloun est bien plus un écrivain qu’un intellectuel : dés lors, il sera naturellement enclin à la subjectivité plus qu’à l’objectivité et considérant ses origines et les sujets principaux et récurrents de ses romans : la mémoire, l’exil, etc… il me semble plus pêcher par anachronisme qu’autre chose.

 

Je dirai qu’il se trompe de génération dans sa lecture ou analyse : si effectivement, la douleur de l’exil ou celle de l’arrachement affecte ou a affecté les premières générations, les chibanis  : les nouvelles générations elles l’ont soit intériorisé soit sublimé soit en s’intégrant à ce qui est leur pays soit dans la haine/mépris et du pays d’accueil/de naissance et du pays d’origine. Etant ici perçus comme d’éternels immigrés et là-bas comme des étrangers (le terme usuel et commun au Maghreb étant de les appeler khalijinn (les arabophones excuseront ma retranscription sans doute imparfaite) : bref ils sont Autre où qu’ils soient.

 

Un autre élément à prendre en compte est effectivement l’aspect complètement apolitique, sans assise idéologique de ces fameuses émeutes et cela n’est pas un hasard : il faut se rappeler que les premières générations issues d’Afrique ou du Maghreb n’avaient aucunement connu les luttes politiques, idéologiques, syndicales, etc…que par exemple les immigrés venus d’Italie ou Espagne avaient connu : certainement l’immigré italien ou espagnol lambda ne fut pas concerné directement mais il n’en demeure pas moins qu’existaient pour eux des figures-icônes du socialisme, communisme, syndicalisme, mouvement ouvrier,etc…et que cela a sans doute aussi joué un rôle dans l’intégration plus rapide de notre système et modèle : l’immigration afro-maghrébine a dans son Imaginaire collectif uniquement ou principalement les figures des luttes d’indépendance et donc de lutte contre le colonisateur qui depuis est devenu le pays d’accueil : la fin de la colonisation ayant produit principalement des dictatures ou régimes autoritaires : aucune figure démocratique, syndicaliste, etc… n’a pu s’imposer comme référence : de là : il y a dés le départ un déficit en matière de développement de la conscience politique que l’éducation parentale supporte généralement avant que l’individu n’opère ces propres choix. On rappelle souvent la volonté pour le Patronat d’un nivellement par le bas des salaires avec le choix de cette immigration mais le fait d’avoir des salariés sans bagage idéologique ou syndicale est à prendre en considération.

 

De là, le problème des banlieues se doit d’être conçu dans une perspective plus globale : à savoir la disparition progressive de tout référent collectif : Nation, communauté humaine (nationale, culturelle, religieuse,etc..) conjointe avec la dissolution progressive de toute forme de lien social transcendant ou dépassant les différences de classe, catégorielles, culturelles, etc…bref la disparition de ce qui en partie définissait non seulement notre société mais aussi nos référents.

 

A cela s’ajoute que toue référence à ces concepts tels que nation, communauté humaine (nationale, culturelle, religieuse,etc…) renvoie d’emblée son utilisateur dans les catégories : réac, raciste, intégriste, obscurantiste, etc…puisque nos élites mcworldistes martèlent sans cesse qu’elles sont de nature proto-fasciste : ce qui à l’évidence n’est qu’une diversion : le but étant d’accélerer la dissolution des Etats-Nations et celle conjointe ou conséquente des frontières autant nationales que culturelles, etc…

 

Quel rapport avec nos banlieues ? d’un, ces sauvageons ou caillera sont les purs produits de ce système : comme déjà énoncé ils sont Autre et donc naturellement les plus fragiles : sans référent que ce soit ici (pays d’accueil où le référent national disparaît en même temps que toute aspiration collective derrière les revendications particulières, catégorielles, etc… de notre société devenu un patchwork de communautés particulières coexistant et ne vivant plus ensemble : donc plus d’Universel/Collectif ne reste que le Particulier) ou que ce soit là-bas (pays d’origine qui subissent de plein fouet les conséquences de la dite mondialisation économique engendrant toujours plus de misère mais aussi d’intégrisme en réaction) : et bien naturellement ils se retrouveront à adopter les nouveaux référents universels ou plutôt globaux  : principalement marqués par l’absence de toute éthique ou morale : fondé autant sur l’Avoir que l’Apparence ; et bien entendu sur la satisfaction immédiate des désirs.

 

Bref : ils sont parfaitement adaptés à la nouvelle donne et à l’évolution de nos sociétés : quant à ces banlieues elles ne sont que le visage de notre futur : où d’un certains vivront dans ces zones de non-droit/no man’s land dont l’étendue ne fera qu’augmenter jusqu’à englober la plus grande partie du territoire lorsque les classes moyennes auront définitivement disparues du paysage social et d’un autre côté ces espaces sécurisés, climatisés, etc..ou serres où évolueront les castes dominantes.

Ce qui nous permet d’arriver à cette question centrale aujourd’hui : Sécurité ou plutôt insécurité : dans la perspective énoncée ci-dessus : la protection des serres est la priorité de nos dits politiques qui de fait n’en sont plus : le pacte démocratique ayant été rompu depuis longtemps entre les citoyens-souverains et leurs délégués/représentants et non cette caste de carriéristes opportunistes : ainsi donc anticipant la montée toujours plus importante de la contestation à ce nouveau modèle socioéconomique, l’accroissement exponentiel de toutes formes d’insécurité pour M. et Mme Lambda : se voit rendu nécessaire le développement de la société de Contrôle et Surveillance des exclus actuels et futurs potentiels : bref l’insécurité est donc maintenue et toutes les mesures prétendant lutter contre ne servent qu’à renforcer et Contrôle et Surveillance.

 

A-t-on jamais vu une caméra empêcher un crime ? rien qu’un exemple…

 

Donc poser le problème banlieue en dehors de toute perspective incluant et situation locale et situation globale : car cette dynamique d’exclusion/fragmentation opère autant à l’échelle locale que globale : ainsi les flux migratoires ne feront que se renforcer de même que les contestations face au Happy McWorld : contestations qui seront aussi dénuées d’assise idéologique ou politique que nos émeutes de banlieue.

 

 

 


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