@ Foufouille
dans un article précédent de Cabanel, j’avais exprimé mon intérêt et mes doutes sur le géothermique profond. Comme Cabanel est opaque au moindre soupçon de raisonnement et de débat, je vous recopie mes posts, si l’envie vous vient d’argumenter.
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je cite des documents sur le site web de Soultz :
"La durée d’exploitation d’une centrale de production comme celle
développée à Soultz-sous-Forêts est estimée à plus 20 ans. En cas
d’exploitation trop intensive, il faudra envisager de laisser le
gisement se réchauffer ou l’exploiter plus lentement, en alimentant un
réseau de chaleur par exemple. En pareil cas, pour continuer à produire
de l’électricité, il faudra soit approfondir les forages existants pour y
trouver une température plus élevée ou réaliser d’autres forages dans
le voisinage."
Grossièrement, la ressource géothermique s’épuise
plus vite qu’elle ne se renouvelle : c’est exactement la raison qui
fait dire que le pétrole ou le charbon ne sont pas renouvelables. La
géothermie n’est pas renouvelable, et pour qu’elle le soit, il faut que
la puissance thermique extraite du sol soit équivalente au flux
thermique provenant du centre de la terre ==> je vous renvoie donc à
mon argument là-haut.
"Si un débit de production de 70-100 l/s est atteint,
correspondant à une production thermique maximale d’environ 50 MW
thermiques, la centrale pourra fournir environ 5 MW d’électricité."
Grossièrement,
les centrales ont un rendement de 10%. Vous devez donc multiplier par
10 l’estimation que je vous ai faites plus haut. Et encore il n’est pas
précisé si c’est uniquement le rendement du cycle thermique (« basse »
température du fluide, faible différence de température) ou s’ils
comptent le rendement des pompes et des ventilateurs (source froide).
Ils ont un problème de source froide, je cite : "Étant donné qu’il
n’existe aucune source froide (aquifère, rivière) facilement accessible
autour du site géothermique, un système de refroidissement par air
s’est avéré nécessaire". C’est normal, c’est une machine
thermodynamique. Un source froide, c’est une rivière, une mer (quoique
les sites les plus intéressants semblent loin des mers, non ?), ou des
tours réfrigérantes (oui comme celle des centrales nucléaires).
J’imagine que maintenant vous ne nous resservirez plus le « problème »
représenté par les centrales nucléaire à ce sujet, non ?
La micro-sismicité : "La conséquence directe de la stimulation
hydraulique est une micro-séismicité induite qui peut avoir un impact
négatif sur la populationdans la mesure où certaines des secousses de
grande amplitude (habituellement supérieure à 2) peuvent
être
ressenties dans les environs.". En plus cette micro-sismicité n’a
pas été utile : "Les résultats des stimulations hydrauliques n’ayant
pas permis d’atteindre les performances escomptées, [...] nous avons
procédé à plusieurs stimulations chimiques. Par conséquent, des composés
chimiques (acides faibles par exemple) sont ajoutés en petite quantité à
l’eau injectée." Et même ca n’a pas suffit. C’est écolo ?
J’imagine
que si les bâtiments alentours subissent régulièrement des secousses,
au bout de combien de temps risquent-ils de s’écrouler ?
Pour finir vos 110 GW en France, d’après ce qu’on peut lire sur le
fonctionnement de la centrale-pilote de Soultz, ne sont pas des W
renouvelables : on ponctionne une réserve. Et au vu du renouvellement de
cette réserve (0.05 W/m², voir plus haut) je vous ai montré plus haut
qu’il est d’ore et déjà trop faible pour la consommation planétaire
(d’un facteur 5, en supposant qu’on exploite toute la surface émergé et
immergée de la planète).
Tout ca, s’ils ont de bons ingénieurs, ils devraient pouvoir
l’optimiser j’imagine. C’est un beau projet, le genre de trucs sur
lequel je pourrais aimer travailler. Je suis relativement content que ce
soit en France que l’on semble pilote en ce domaine, comme dans
l’hydraulique, le marémoteur et le nucléaire. Néanmoins, l’énergie
miracle et renouvelable que vous représentiez semble finalement peu
efficace, et pas renouvelable.
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petit calcul :
Le flux surface géothermique moyen (la quantité de chaleur instantannée
passant
au travers de la croûte terrestre) est de : Ps=0.05
W/m²
La surface de la Terre est de : S=5.10e14 m² (océans compris)
La puissance thermique total de la terre est donc :
P=Ps*S= 2.55e13 W = 25 TW
La civilisation humaine a dépensé en 2005 : 11 Gtep = 4.62e20 J
soit une puissance de Ph=1.46e13 W = 14 TW
Cela signifie que vous devriez, pour alimenter l’humanité, construire
une
machine qui recouvrirait la moitié de la surface de la planète (émergée
et
imergée), et cela, avec l’hypothèse d’un rendement de 100%. En réalité,
avec
votre différence de 200°C dans l’hypothèse d’un forage à 5000 m vous
risquez
d’arriver, mettons, maximum 35% de rendement (i). Il vous faudrait
couvrir 1,5
fois la Terre. Sans compter le fait que beaucoup de personnes sur terre
aimeraient consommer plus d’énergie : triplement de l’énergie consommée
d’ici 2050 ? 4.5 fois la Terre ?.
Maintenant vérifier le danger environnemental (sur la base de 50% de la
surface
terrestre, c’est conservatif)
Outre l’impact certain de construire une machine capable d’exploiter 50%
de la
surface terrestre, vous multipliez par 1,5 le flux thermique qui
s’échappe de
la planète. Si l’on résonne très grossièrement, cela signifie que vous
multipliez par 1,5 la vitesse de refroidissement de la planète.
Cette vitesse est très faible, a priori, le flux géothermique a été
divisé par
deux en 4.5 milliards d’années [source]. Cela signifie que vous aurez
presque
le même impact sur le refroidissement de l’énergie primitive de la terre
que
4.5 milliards d’années de rayonnement vers l’espace...
Pour l’aspect renouvelable, regardons les sources de chaleur dans la
terre :
* énergie dit « primitive » de formation de la terre, par chute de
comètes et de météorites
* énergie provenant de la radioactivité naturelle
on constate de manière évidente, qu’il est impossible de la restaurer...
Le
géothermique n’est pas renouvelable, on consomme une énergie qui était
là
avant : c’est une énergie fossile.
Qu’on fasse du géothermique profond localement, dans les endroits
exceptionnels
(islande) c’est une très bonne idée : ca participe au cocktail
énergétique, à la sécurité énergétique et à la relocalisation des
sources
d’énergie. Mais il va falloir se faire à l’idée que le géothermique
profond
restera minoritaire...
Rien n’est magique !