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Commentaire de Franz Ferdinand Von FritzenSouchern

sur La langue arabe, son histoire, son originalité et son influence


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cher Paradisial, je ne suis point ce cher Gazi, et je ne peux que regretter sa disparition de cette virtuelle agora …comme bien d’autres, d’ailleurs.

Sinon, oui, vous avez eu raison de me reprendre sur le nabatéen, il est bel et bien issu du nord. Dans mon esprit je pensais au royaume et au site de Pétra, et avais confondu dans ma tête qu’il étaient au Yémen alors que c’est en Jordanie qu’ils sont sis.

Par contre, sur ce point précis, il y a bien une certaine constance pour les périodes anté-islamiques : les groupes arabes que nous retrouverons au Nord de la péninsule arabique ou dans la steppe syrienne, voir ailleurs encore, sont principalement issus de l’espace sud-arabique et donc yéménite : principalement des groupes qahtanites : les Arabes musulmans eux marquent essentiellement les migrations de la famille adnanite (principalement : groupes bédouins les accompagnants), centrale et septentrionale…soit.

Quant à la notion de langue syncrétique je ne retire point cet adjectif.

Cher Paradisial : vous pouvez choisir de conserver cet adjectif de syncrétique : cependant il est purement arbitraire et n’a que peu à voir avec la linguistique : l’hébreu a ses spécificités et caractéristiques tout comme l’araméen ou l’arabe et ne résulte pas d’une fusion intersémitique. Que les historiographes ou archéographes du passé aient été atteints d’hyperconcordisme biblique, selon votre formule, n’a que peu à voir avec l’analyse scientifique ; ici la linguistique comparée et non la théolinguistique exégétique. smiley

Effectivement que la proximité est manifeste : ce sont toutes des langues du groupe sémitique, groupe qui connaît une constance plus importante et donc des variations moindres que par exemple le groupe indo-européen : sans nul doute la proximité des divers groupes sémites et leur évolution dans un espace géographique somme toute beaucoup plus restreint (avant expansion islamique) que l’espace dans lequel les IE évolueront : proximité donc encore plus renforcée par des échanges, transferts, influences,etc…constants et réciproques au cours des siècles, millénaires d’existence de ces langues est évident : encore plus soutenue par ce que Zarins définit comme le complexe nomadique pastorale arabique circulaire : bref l’évolution des groupes nomades sémites entre espace syro-mésopotamien et arabique.

Il n’empêche que chacune de ces langues a connu une évolution propre généralement conjointe à l’ethnogénèse des groupes concernés puis à l’évolution historique de ces groupes : illustrée autant par les variétés d’hébreu que d’araméen ou d’arabe.

Vous avez noté ces fameuses racines trilitères, et bien mon cher Paradisial, si vous vous étiez penché sur les autres langues du groupe sémitique, voir même celles du groupe afro-asiatique qu’en auriez-vous déduit ?  il y a au sein de chacune des langues évoquées (hébreu, araméen, arabe) des contraintes spécifiques qui relativisent la portée des échanges, et donc l’impact des transferts : c’est d’ailleurs en raison des contraintes propres à l’arabe et à l’araméen que la thèse Luxenberg se voit largement infirmée (notamment son hypothèse d’une origine araméenne quant aux diacritiques en arabe).

Bref, pas de syncrètisme mais une origine commune : l’hypothètique proto-sémitique : hypothèse supportée par la proximité entre groupe sémitique et autres groupes de la famille afro-asiatique : à quelle conclusion auriez-vous donc abouti, cher Paradisial, si en plus d’hébreu et d’araméen vous vous étiez à d’autres langues sémitiques ou afro-asiatiques ? m’est d’avis que la Tour de Babel ne serait pas loin…

Bref petits exemples rapidement : tiens nous avons parlé des Araméens, d’Aram…alors petit exercice de linguistique comparée (rien à voir avec étymologie d’Aram, juste autour de la phonétique ici) :

 Racine semitique : *ʔaram- soit une place fortifiée qui nous donne l’hébreu ʔarm-ōn- (forteresse, palais) et bien nous la retrouvons en tchadique occidental sous la forme *ram soit village, ville ou place, et en tchadique central sous la forme *ʔV-rVm- soit maison,

On la retrouve aussi dans une langue parlée au Nigéria : le kulere sous la forme ràm qui

signifie aussi place ou village… 

autre exemple : la racine sémitique *bayt- pour maison que l’on retrouve en hébreu, arabe ou araméen avec peu de variations mais aussi encore en tchadique sous les formes : occidentale *bay- (construire), ou *bit- hutte, pièce, abri, pareil en tchadique central avec une variation *bi- pour construire, enfin en tchadique oriental sous la forme *bay- pour construire…et comme vous êtes maghrébin, et bien la racine berbère *but- pour maison (de boue plus précisémment)  

soit…simples illustrations du fait que la proximité ou parenté dépasse largement la simple famille sémitique et que donc cette notion de syncrétisme ne s’applique pas : des langues syncrétiques (formule un peu hasardeuse) vous en avez sous la forme des créoles ou pigdins : l’hébreu n’appartient pas à cette catégorie…en tout cas l’hébreu classique ou biblique.  

Pour conclure, votre conclusion me semble bien arabo-centrée et peu objective : de même que ce podium linguistique m’est bien étranger comme concept : il est assez rare que des langues étrangères nous apparaissent plus mélodieuses que notre langue maternelle, quelle qu’elle soit : tout cela demeure une question de sensibilité cher Paradisial…par contre, dans la perspective du proto-sémite, l’arabe apparaît bien comme la langue sémitique ayant la plus grande proximité avec cet hypothètique proto-sémite : ce qui renforce donc l’hypothèse d’un foyer proto-sémite originel en Péninsule arabique : ou tout au moins dans un espace étendu entre espace sud-arabique  et Afrique orientale : renforcé encore plus par les peintures rupestres néolithiques dites de style arabo-éthiopien.

Sur ce, salutations les meilleures à vous aussi cher Paradisial…

 

 

 


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