Monsieur Armand,
En effet :
la dépersonnalisation entre dans ce
processus : à l’évidence : nous en sommes au point où focaliser sur tel
ou tel aspect n’est plus suffisant : seule une perspective globale :
à savoir dresser l’inventaire de tous les éléments et avatars de ce modèle en cours
de formation : la ligne directrice étant bien au final la négation de l’Humain :
ce qui n’a rien d’étrange vu la logique hypermatérialiste et à dimension strictement
économique de ce système : donc par définition apolitique, aculturel mais aussi anti-humain.
La dépersonnalisation
est en elle-même une manifestation de cette réduction a minima de l’humain à un être strictement économique : dont seule
l’utilité quelque soit la finalité ou les besoins n’a d’intérêt pour ce monstre
naissant. Mais dans le même temps : c’est aussi l’entrée dans le post-héroïsme des sociétés européennes,
et cette volonté manifestée dans ces mêmes sociétés d’évoluer dans un espace autant sécurisé que stérile
(comme un lab) autant que parfaitement ordonné qui a supporté l’émergence de
cette monstruosité : bref éliminer de l’Environnement où nous évoluons au
quotidien tout bruit, toute violence, tout désordre,etc…bref pour ainsi dire
toute manifestation de vie : silence, calme, propreté,etc…l’Etat tendant,
lui-même, à être réduit à des attributs négatifs servant ces mêmes desseins :
Sécurité, Salubrité, Immunité, etc…au
final, le confort artificiel d’une serre
sécurisée et climatisée : quelque
chose entre le bunker et l’hospice.
Et pour revenir et
à cette obsession sécuritaire
(fondée ou non) autant qu’à ce processus de dépersonnalisation soit au final de déshumanisation : et bien réflexion plus large : dans cette
obsession autour de la problématique Insécurité qu’on peine à définir :
puisqu’elle peut être autant celle liée à
la violence, que l’insécurité économique, existentielle, environnementale, etc…il
faut se rappeler que autant l’anxiété et de la peur que cette insécurité ou le
sentiment d’insécurité produit : induisent un état de haute suggestibilité chez l’individu : or cet état hyper-suggestif
est l’un des moyens de contrôle des relations sociales : une des bases en
fait du social management.
Et c’est en
partant de cette question de l’insécurité en la reliant à l’ensemble des
manifestations pratiques et quotidiennes de ce système indéfini qui se met en place que l’on peut se rendre compte
autant de sa cohérence que de la logique qui le sous-tend : bref nous
avons là bien une Intelligence en
action : quelques exemples d’un ensemble de méthodes qui renforcent
encore plus cette société de contrôle : méthodes qui ne sont point
occultes, dissimulées, etc…mais évidentes puisqu’elles forment en partie
si ce n’est en tout ce que l’on ose appeler culture post-moderne :
appauvrissement généralisé du langage (via médias, sms, mass’culture, etc…) induisant
désensibilisation et réduction de l’empathie,
l’ information-poubelle incapacitant
la formulation d’opinion/jugements singuliers ou empêchant l’émergence d’une
compréhension d’ensemble par surplus d’informations inutiles ,l’élimination des idées individuelles
par la répétition hypnotique de slogans, séquences logiques, prêt-à-penser, l’incitation à la dépendance par
l’introduction de sports, jeux ou shows TV aux règles aussi obscures que
débiles, l’inversion logique dans le
discours politique/médiatique des relations de causes à effets,etc…
au niveau individuel : nous observons : l’accroissement de la
sensibilité à la stimulation émotionnelle, qui produit un phénomène de désorientation mais aussi réaction émotionnelle plus qu’intellectuelle
face à telle information ou situation : favorisée par la junk food (impactant le système
nerveux), le prolongement de l’activité
physique et mentale (concurrence et
compétitivité accrue, culte du Corps, captation de l’attention par toute une
production médiatique/informatique d’ordre strictement consommatoire,,etc…)
et à l’opposé la diminution du temps de repos et de sommeil (consommation accrue de stimulants, impact négatif de la TV ou du Net,
etc…).
tout cela dans
une logique de suppression de
l’individualité : bref du dressage
ou du clonage avant l’heure dans une logique de rentabilité immédiate autant
que perpétuelle : soumission à des codes vestimentaires
ou à des modes aussi aculturelles qu’à durée de vie limitée :
incitation permanente à se conformer aux injonctions à consommer ;
acceptation automatique de croyances ou vérités
médiatiques :
produisant découragement face à toute possibilité de questionnement. S’ajoute à
cela la perte de la faculté à évaluer objectivement l’information ; destruction de l’intimité : culte de la Transparence et dictature Psy :
confession des faiblesses personnelles et création d’un sens faussé de
l’identité par la focalisation sur les défauts des autres.
et la liste
pourrait continuer encore quand à tout cet ensemble d’outils et de moyens qui
peu à peu sape l’héritage de toute l’humanité passée : incitation à l’adoption de comportements puérils et
irrationnels et désinihibition par la stimulation permanente des pulsions
désiristes, régression et désorientation
par sollicitation à l’acceptation de règles régulatrices de vie présentés comme
simples et consensuelles ; promotion de l’acceptation de l’autorité sous
couvert de promesses d’avancement ou de pouvoir (méthode Sarkozy et son fameux
concept du mérite)…
pour en finir
avec cette liste : on pourrait aussi évoquer l’encouragement à l’enfermement et à la passivité induisant rupture
dans le rapport au Réel : tout un décor virtuel présentant donnant l’illusion de la sociabilité, de
l’interaction et du choix.
Pour conclure :
dépersonnalisation, dressage ou domestication :
déshumanisation : séparant l’Homme autant du reste de l’Humanité que
du Réel : bref isolement : garantie de s’assurer le contrôle :
avant on divisait pour mieux régner à l’échelle de groupes ou communautés :
aujourd’hui, technologie aidant : on éclate la société, neutralise l’empathie
et la sociabilité, isole l’individu : au final fragmentation autant à l’échelle
sociale qu’individuelle : divide and rule n’a jamais eu une
telle dimension à aucun moment de l’Histoire...c’est cela qu’il faut entendre.