Bonsoir, Thierry CH.
Comme je le disais à propos de mon précédent article, il y a plusieurs formes d’égalitarisme, de même qu’il y a plusieurs formes de socialisme, de libéralisme, de christianisme ou de patriotisme... En ce qui me concerne, moi, je crois avoir expliqué ce que j’entends par égalitarisme : non pas une doctrine qui promeut la disparition des différences, le nivellement par le bas ou l’égalité mathématique des richesses, mais une théorie selon laquelle les rapports de domination (entre gouvernants et gouvernés, hommes et femmes, « races », classes sociales, etc.) sont non seulement inutiles, mais nuisibles. En gros, ce que j’appelle égalitarisme se rapproche assez du courant libertaire (même si, au sujet de l’Etat, je ne sais pas trop quoi penser : je ne suis pas sûr que sa disparition totale soit souhaitable).
Quant à l’intention des bolcheviques, je crois qu’il faut distinguer entre ceux qui étaient sincèrement favorables à l’égalité, et ceux qui ne l’étaient pas. Ce qui est sûr, c’est que la tendance autocratique l’a emporté assez rapidement sur la tendance autogestionnaire et ultra-démocratique présente à l’origine dans les soviets. Cela est dû, en partie, aux circonstances (guerre civile, position très minoritaire des bolcheviques dans la société russe de l’époque, etc.), mais cela tient aussi à la croyance en un rôle historique de l’élite révolutionnaire, chargée de faire le bonheur du peuple malgré lui.
Tout cela montre qu’il ne suffit pas d’avoir de « bonnes intentions » : il faut aussi se donner les moyens d’arriver à ces fins. Toute démocratisation de la société doit elle-même se faire de manière démocratique. En tout cas, l’échec des régimes dits « communistes » ne prouve pas l’absurdité de l’idée égalitaire, pas plus que la dictature de Robespierre n’a prouvé l’impossibilité d’instaurer un régime républicain.