Chère Madame,
Quelle joie que de laisser de côté les invectives et de recourir à des
fleurets mouchetés ! Dois-je tout de même contrer mollement quelques
piques que vous m’adressez - de bonne guerre certes, je ne vous ai pas
ménagée ? Tout d’abord, je vous rappelle que quand on livre au public sa biographie, même incomplète, les lecteurs vont forcément s’en
inspirer dans leurs réflexions. J’ai régulièrement droit à des
interpellations sur ma qualité d’universitaire, et même quand celles-ci
sont quasi-injurieuses, je ne les fais pas effacer pour autant.
Il était cruel de ma part de vous reprocher de toucher à tout, puisque
je m’arroge le même privilège et n’apprécie guère les spécialistes étroits.
Cependant, mes correctifs s’appuient sur des titres sérieux - votre
analogie avec l’empire romain ne tient pas la route, et je n’ai pas
besoin de ressortir ma thèse, sous la direction de feu Charles Pietri,
sur la fin du IVe siècle pour me justifier.
Comme vous avez eu la bonté de me renvoyer à « L’année dernière à Marienbad »,
je devrais être flatté (en réalité, pour l’ambiance onirique , j’aime mieux
« Rendez-vous à Bray » d’Alain Delvaux) mais pour Bouvard et Pécuchet, vous
faites fausse route. D’abord votre remarque sur Wiki est inutile - j’ai
donné suffisamment de séminaires sur la littérature française du XIXe
siècle pour comprendre de quoi il s’agit, et puis mes opinions et valeurs se
trouvent plutôt chez Barbey D’Aurevilly ou même Paul Bourget .
Mais permettez-moi de vous rappeler que nos intervenions sur AV ne sont pas toutes des dissertations mûries mais bien souvent des réactions ad hoc, des mouvements d’humeur, des digressions. Comme au bon café du commerce. Aussi m’arrive-t-il de commenter sans la moindre prétention.
En revanche, je pense que les articles qui servent de support à la discussion devraient apporter quelque chose de nouveau. Vous vous méprenez sur le sens de ma critique - il ne s’agissait pas de comparer votre traduction commentée aux « soldes d’été », mais plutôt à ces feuilletons qui meublent les quotidiens. Il y en a eu de fort divertissants au Monde, mais il ne s’agit pas d’articles de fond.
En tout cas, nous voici d’accord sur un point (outre votre goût pour les puros que je partage, à en croire votre photo). Nous pouvons oublier à l’avenir nos personnes pour ne confronter que nos idées.
Bon dimanche...