Marcelle
Le 2 août 2010 à 12 h 15 min |
« Bien sûr, tout n’est pas rose à la cité des Oiseaux-bleus-qui-chantent-sur-leur-branche, mais ici, on se serre les coudes entre communautés, et la solidarité n’est pas un vain mot. »
« Dans la ZUP des Petits-Poneys-soyeux, les vendredis ont un goût de paradis : Mohamed, respectable imam que chacun ici se plaît à appeler Momo, délivre ses pieux conseils aux grands frères du quartier, au premier rang desquels Muhamad, que ses copains d’enfance surnomment Mumu. Mumu, chômeur de longue durée mais citoyen investi, n’hésite pas à prendre sur son temps libre pour donner des cours du soir aux petits, dont le sympathique et vif Méhémet, Mémé pour les intimes. Sur le banc, Momo, Mumu, Mémé et les autres devisent. Trois générations unies, pour le vivre-ensemble. »
« Dans le grand ensemble des Jeunes-Filles-en-fleurs-des-îles, la vie n’est pas toujours un long fleuve tranquille. Mais ici, malgré la pauvreté et les difficultés, on sait garder sa dignité. Un exemple parmi tant d’autres : le vide-ordures, bloqué depuis l’Aïd par une carcasse de mouton, ne fonctionne plus, et l’office HLM n’est toujours pas intervenu ! Qu’à cela ne tienne, ici, on a la débrouille dans le sang ! On se ré-approprie les méthodes ancestrales, les déchets sont jetés par les fenêtres et, grâce à la municipalité socialiste et à l’insistance des citoyens, deux emplois-jeunes ont pu être créés : Aziz et Fatou ont tiré un trait sur les quelques bêtises d’un passé difficile, et se chargent désormais du service de RASVF (ramassage actif sous vos fenêtres, NDLR). Bientôt, grâce à une formation accélérée de 28 mois, ils seront à même d’opérer un tri sélectif, et de séparer les épis de maïs des emballages de X-Box. Les Jeunes-Filles-en-fleurs-des-îles seront bientôt bios, en plus d’être équitables. »
« Dans la cité des 5000-Poètes-écrivant-des-vers-libres, les habitants ont su faire d’une utopie – la vie en commun – une réalité. Ainsi, de la propre initiative des citoyens, les ascenseurs ont-ils été reconvertis, pour l’agrément du plus grand nombre, en sanitaires. Bébert, 82 ans, Alzheimer, qui a vu les premières tours de l’ensemble sortir de terre, se souvient : « Avant, depuis le terrain de boules jusqu’à chez moi, au dernier étage, il fallait que je prenne l’ascenseur et que je monte pour aller faire mes besoins (sourire gêné, NDLR). Aujourd’hui, c’est bien plus pratique et convivial, on a les toilettes ouvertes à tous au rez-de-chaussée. » Et Bébert sait bien que ce progrès, il le doit aux « jeunes gens », comme il dit. Son épouse, Josiane, 78 ans, Alzheimer, se rappelle elle aussi : « Quand nous avons emménagé ici, je devais toujours porter mes sacs de courses moi-même. Mais à présent, c’est fini : il y a toujours trois ou quatre jeunes braves garçons qui m’en débarrassent bien gentiment, sans même que j’aie à le leur demander. »
« À la Claire-Fontaine-où-l’eau-est-si-belle, tranquille groupe d’HLM à taille humaine, Karima est heureuse et épanouie, comme l’atteste son œil rieur, qui ressort d’autant mieux qu’il est souligné de khôl et d’un voile sombre. « Vous m’auriez rencontrée au début de l’année, vous ne m’auriez pas reconnue : j’étais triste et renfermée. » Il faut dire qu’il y a encore quelques mois, Karima s’appelait Leatitia, et n’avait pas encore embrassé la foi du Prophète qui, selon ses dires, « [lui] a tout donné, la paix et la sérénité ». La jeune femme témoigne : « Je faisais des efforts pour m’intégrer, mais je m’y prenais mal, les petits me traitaient de fille facile, et les grands m’ont fait comprendre que c’était la réalité. [Un temps de silence]. Mais la famille de Karim m’a acceptée, de mon côté j’ai changé, j’ai écouté l’imam et… voilà, j’aurais bientôt des jumeaux ! » Un bonheur n’arrive jamais seul, à la Claire-Fontaine… »
« À l’ombre des tours des Chauds-les-Marrons-Chauds, un groupe de jeunes s’efforce de recréer du lien social, de retisser tant bien que mal un tissu citoyen défait par une ghettoïsation indigne et des aides par trop insuffisantes. À leurs pieds, les crachats attestent d’une conversation longue et pleine de vie, mais aussi de l’intensité de leur foi, même hors période du Ramadan (cette année, à partir du 10 août au coucher du soleil, NDLR). Si Youssouf, échaudé par le harcèlement d’un État policier, est d’abord un peu méfiant, il accepte finalement de parler à notre équipe : « On n’a pas de terrain de golf, pas de piscine olympique, pas d’hippodrome. Pour le 14-Juillet (la fête de tous les Français, sans distinction d’origine, de race, de religion, NDLR) y a même pas de feu d’artifice, on est obligé de se débrouiller par nous-mêmes. » La débrouille, toujours la débrouille. Fatou renchérit : « La mairie ne nous donne aucun équipement, si on veut intégrer l’équipe de foot, on doit trouver nous-mêmes les Nike et les I-Pod. » Bien maigre consolation, pour ces déshérités de la France qui ne peuvent compter que sur eux-mêmes. Et pourtant, Moktar, jeune quadragénaire à la Rolex et au sourire rutilants, apprécié et respecté de tous, tient à souligner que « quand on veut, on peut » : « J’ai commencé tout jeune, comme stagiaire, pratiquement. Au début, je gagnais à peine de quoi faire vivre ma famille au bled, et puis… » Le jeune homme, modeste et discret, ne s’étend pas, mais on comprend que la valeur-travail lui est chevillée au corps. D’ailleurs, son entreprise d’import-export a reçu cette année le label Diver-cité. Tardive reconnaissance de la part d’un État discriminant, mais dont Moktar, éternel optimiste, s’accommode avec bonne humeur : « Vieux Moktar que jamais. » Une philosophie de la gagne et de l’espoir qu’il s’efforce d’insuffler aux plus petits, à l’ombre des tours. »
« Juin 2010, 18 heures. Au cœur de la cité Arc-en-Ciel-de-mes-Rêves, c’est la fête des Voisins. L’occasion de déguster un délicieux thé à la menthe et, autour de bons petits plats hauts en couleur – mafé, tagine, colombo, brochettes de sauterelles braisées à l’aigre-douce… –, de discuter en toute convivialité. La conversation, dans toutes les langues du monde, est aussi animée qu’enjouée. Il faut dire qu’à la place de la poussiéreuse bibliothèque du quartier, brûlée cet hiver à la suite de la garde-à-vue de deux adolescents pourtant excellents joueurs de foot, se dresse désormais le CCMAM, le centre citoyen de multicultures africaines du monde, tout juste inauguré par le monsieur le Maire (PC), Fadela Amara et le ministre de l’Intérieur, monsieur Hortefeux, désireux de faire amende honorable après sa triste sortie sur les « Auvergnats ». Pour les habitants du quartier, c’est le renouveau, enfin. Le documentaliste, Rachid El-Imam, témoigne : « Les gens sont enthousiastes, il y a une vraie demande, j’ai beaucoup d’inscriptions, surtout pour la séance de lecture du vendredi, et l’atelier “le livre saint expliqué aux enfants”. » Il ajoute en riant : « Il faudra bientôt agrandir le centre ! » Mais pour cela, la foi en la culture pour tous est insuffisante, il faut des moyens supplémentaires. L’harmonie d’un quartier est à ce prix, finalement bien faible au regard de l’ambiance, chaleureuse et bon-enfant, qui règne aujourd’hui. »
Moi aussi, je veux ma carte de journaliste.
19/08 14:08 - Freefry
Olivier, je n’ai pas trop de temps pour le moment, j’écouterais vos chansons et (...)
19/08 13:34 - olivier cabanel
19/08 13:23 - olivier cabanel
eric, mais je ne suis là pour convaincre personne, j’essaye de faire un travail (quel mot (...)
19/08 13:09 - olivier cabanel
freefry je m’en doutais, je suis heureux de trouver sur ce fil quelqu’un qui (...)
19/08 13:01 - olivier cabanel
birdy, l’arnaque gauchiste ? c’est tout ce que vous avez trouvé ? pas brillant. (...)
19/08 13:00 - olivier cabanel
w auriez vous une lecture sélective, en ne retenant que les arguments qui vous arrangent, je (...)
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