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Commentaire de docdory

sur Quand l'État dénature la relation médicale


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docdory docdory 25 août 2010 13:17

@ Lucillo

Rappelons un peu ce qu’était la médecine au début du siècle ( soit bien avant la convention entre les médecins et l’assurance maladie )
Le médecin apposait une affichette libellée en francs qui aurait dit , en euros , quelques chose comme ça :
 honoraires des consultations :
- patrons : 80 euros
- employés : 40 euros
- ouvriers : 20 euros
( C’était une époque ou l’on pouvait distinguer, du premier coup d’oeil, le patron de l’ouvrier et de l’employé ! )
Il était sous entendus que les indigents ( que l’on appelerait maintenant RMI stes ) étaient soignés gratuitement, mais de toutes façons ne pouvaient pas se payer de médicaments chez le pharmacien )
Les médicaments de cette époque étaient très peu chers, souvent tirés de plantes, faisaient l’objet d’expérimentations des plus sommaires, certains étaient efficaces , d’autres ne servaient à pas grand chose.
Le médecin pouvait soigner ( un peu ) l’insuffisance cardiaque avec de la digitaline, l’angine de poitrine avec de la trinitrine, les crises de goutte avec de la colchicine, la douleur avec de l’aspirine , de la poudre d’opium ou de la morphine, la diarrhée avec de l’élixir parégorique , l’asthme avec de la théophylline, dont l’injection prenait 20 minutes, faire des anesthésies locales avec des dérivés de la cocaïne, ou des anesthésies générales au gaz hilarant ou au chloroforme. Il pouvait soigner les bronchites avec des sirops, la tuberculose au sanatorium, et il pouvait faire quelques vaccins ( tétanos, diphtérie, BCG ), l’insomnie avec du véronal, les troubles psychiques avec du bromure ou des plantes. Tout cela ne coûtait pas bien cher, ne soignait pas grand chose.
L’espérance de vie ne dépassait guère une cinquantaine d’années, un bon quart des enfants n’arrivaient pas à l’âge adulte et bon nombre de femmes mouraient en couches. Il n’y avait pas d’antibiotiques, les gens mouraient souvent de pneumonies, de banales infections urinaires, les cancers étaient presque tous mortels car diagnostiqués avec un grand retard du fait de l’absence de moyens d’imagerie ( à l’époque , passer une radio simple était plus difficile que passer une IRM de nos jours ). La vie était un cauchemar de souffrances pour la moitié de l’humanité, et la mort était, pour presque tous, une délivrance.
Pour ceux qui devaient s’arrêter de travailler pour cause de maladie grave, c’était la perte de ressources financières en quelques jours et la misère noire pour leur famille au bout quinze jours
Mais, la médecine, à l’époque, était totalement « libérale », selon le modèle parfait de relation médecin-malade que vous ambitionnez de voir revenir .
Ce « modèle » libéral de la relation médecin-malade existe encore de nos jours sous sa forme « parfaite » dans quasiment tous les pays d’Afrique intertropicale et dans bon nombre de pays d’Asie et d’Amérique du Sud, et bien entendu aux Etats Unis d’Amérique, sous une forme vaguement améliorée.
Dans pays les plus sous-développés,, les pauvres qui veulent soigner leurs enfants peuvent toujours vendre leur rein,ce qui leur rapportera à peine de quoi soigner une tuberculose ou une appendicite chez leur progéniture, et qui est une pratique ignoble que pourtant vous encensiez dans un de vos mémorables précédents articles !
Concrètement, dans ce « modèle » libéral, ne peuvent se payer des soins coûteux que les riches, ou que les gens qui peuvent se payer une « assurance » privée ( assurance privée qui est surtout une assurance de revenus confortables pour les actionnaires desdites assurances ), c’est à dire souvent les mêmes.
Les trois quarts des citoyens, dans ce système, sont totalement exclus, de par leur situation financière, du bénéfice des principaux progrès médicaux.
Pour illustrer le « bénéfice » du modèle libéral de la relation médecin malade, il n’est pas de meilleur exemple que l’incroyable baisse d’espérance de vie, la plus grande jamais observée et chiffrée dans l’histoire de la santé publique, qui a suivi le remplacement du système de santé étatisé de l’URSS par un système entièrement libéral, celui que vous préconisez, qui est celui de la Russie actuelle : une baisse de six ans de l’espérance de vie ! Qui dit mieux ???
Par ailleurs, aux USA , la relation médecin malade est infiniment plus perturbée par les contrôles délirants et draconiens pratiqués par les assurances privées qu’elle ne l’est en France par ceux de la sécurité sociale . Ces contrôles, qui s’apparentent à un flicage permanent et qui nécessitent, pour mes homologues d’outre Atlantique, des heures quotidiennes de remplissage de paperasseries assurantielles , sont bien plus pesants et tâtillons que ne le sont, ici, les contrôles de la sécurité sociale. Si vous vous imaginez que mes confrères états-uniens jouissent d’une aussi grande liberté de prescription que la mienne, vous vous fourrez le doigt dans l’oeil jusqu’au coude !






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