Il s’agit pour 2 ou trois grands semenciers de prendre le monopole absolu de la fabrication de semences et de plants.
Ce n’est pas si simple que cela pour ces grands semenciers ...
"Au
Gujarat [Nord-Est de l’Inde], toute l’industrie des semences s’est
transformée en un gigantesque laboratoire pirate au sein duquel des
agriculteurs mélangent et croisent des variétés locales avec des OGM
pour développer leurs propres hybrides (non agréés) de coton
transgénique. Ceux-ci sont ensuite empaquetés et vendus clandestinement
aux paysans : ils les délivreront d’un parasite, le ver de la capsule
du coton, ou bollvorm. C’est la conséquence d’événements qui se sont
déroulés il y a deux ans, quand le Gujarat a donné naissance au "Robin
des bois de la biotechnologie", D.B. Desai. Celui-ci a créé et vendu
une version non agréée de semences de coton Bt [modifié avec un gène de
la bactérie Bacillus thuringiensis], alors que le coton commercialisé
sous le nom de Bollgard en Inde par Mahyco Monsant Biotech [un
joint-venture de Monsanto] faisait l’objet d’essais laborieux depuis
sept ans. Tout a commencé en 2001, quand le biologiste indien proposa
aux paysans sa variante de la technologie OGM, qu’il appela Navbharat
151, et ce à un prix abordable (il vendait ses produits 400 roupies [7
euros] les 450 grammes, tandis que Monsanto les vendait 1 600 roupies).
Peu de temps après, une multitude catastrophique de parasites
s’abattirent sur les champs de coton et détruisit les cultures
classiques. Au contraire, la résistance des plants OGM déclencha
l’euphorie des paysans, qui, depuis, considèrent Desai comme un
demi-dieu. En dépit de l’ordre du Comité indien d’agrément du génie
génétique [Genetic Engineering Approval Committee, (GEAC), qui autorise
ou interdit les OGM dans le pays] de brûler ces plantes, les pouvoirs
publics, craignant de faire face à des émeutes, ont fermé les yeux.
Lorsque la controverse a finalement éclaté, Desai est entré dans la
clandestinité, mais des centaines d’agriculteurs avaient multiplié et
revendu ces lignées à d’autres cultivateurs. "Il y a maintenant un
Desai dans chaque maison et des semences de Bt dans chaque ferme",
affirme avec satisfaction V.B. Patel, agriculteur dans le Mansa, au
cœur de l’industrie des semences de coton de l’Inde du Nord.
Aujourd’hui, de petits cultivateurs et des hommes d’affaires
entreprenants ont repris le flambeau pour tirer profit de la demande
suscitée par Desai. Dix marques sont disponibles, dont Rakshak,
Maharakshak, Viraat, Agni ou encore Navbharat 151 [...]
Indian Express, repris par Courrier International n° 660 du 26 juin 2003