• AgoraVox sur Twitter
  • RSS
  • Agoravox TV
  • Agoravox Mobile


Commentaire de Lord Franz Ferdinand Of F. In S.

sur Quand les éditions Larousse falsifient l'histoire...


Voir l'intégralité des commentaires de cet article

Lord WTF ! Lord Franz Ferdinand Of F. In S. 26 septembre 2010 23:46


M. Armand,

 

J’entends bien votre propos, je dirai que le paradoxe ou dilemme palestinien est que le nationalisme palestinien en se fondant dans et sur le panarabisme et le nationalisme arabe a tout simplement fait perdre l’identité propre des Palestiniens (bon, j’imagine que ce schéma peut s’appliquer dans une certaine mesure dans nombre de situations : en Afrique du Nord avec la question berbère, centralisme jacobin, etc...).

 

Bref : l’idée étant que le choix d’une identité arabe convenait certes aux politiques (clans) panarabes de l’époque, autant que l’exacerbation du caractère musulman convenait et convient toujours au panislamisme mais qu’en définitif : plutôt que de s’être construit une identité : les Palestiniens ont perdu la leur sans que le panarabisme n’aboutisse à quoique ce soit de concret, et sans que l’islamisme ne mène à autre chose qu’une impasse.

 

Il y a plusieurs dates clés, souvent l’on applique une seule grille de lecture mettant la problématique palestinienne en relation soit avec la Nahda, les mouvements panarabes ou panislamiques soit avec le Sionisme : alors que la mécanique s’enclenche bien plus tôt : un siècle avant 1947 : 1848 rétablissement du Patriarchat Latin de Jerusalem (en conséquence de la Guerre de Crimée)…

 

Fait anodin semble-t-il alors que c’est bien à partir de ce moment que la crispation identitaire sur le fait religieux s’enclenche : les conséquences sont toujours visibles et effectives aujourd’hui : nous passons d’une situation où les Palestiniens de l’époque ne s’identifient que peu à la religion : à un tel point que lorsque le Patriarchat Latin est rétabli : les prêtres peineront à trouver leurs chrétiennes brebis dans le très syncrétique troupeau palestinien : la pratique religieuse autant peu orthodoxe que souvent trés syncrétique révélant sous les strates chrétienne ou musulmane : une longue tradition aisément reliable à la religion sémique levantine antique (pour faire simple : religion cananéenne) : dans le même genre que les religions de type vaudou, santeria, etc…révèlent leurs origines africaines sous la couche chrétienne…

 

Mais conséquence terrible : début de l’identification non plus à une identité traditionnelle connue sans être définie, que personne ne questionnait puisque nul besoin à l’époque, mais à l’appartenance religieuse : renforcé par l’intense activité des missionnaires ( protestants très actifs dans le secteur) autant que par la naissance/théorisation du panislamisme conjointe à celle du panarabisme. L’apparition du sionisme dans la donne ne fera qu’encore plus renforcer cette identification religieuse chrétienne, musulmane, juive.

 

A cela nous ajouterons ce que vous avez évoqué l’importation du modèle état-nation qui dans la région s’inscrira avant tout dans le panarabisme : le nationalisme panarabe phagocytant toutes les identités particulières : toute l’Histoire, toute la Mémoire est arabisée (plus tard elle sera islamisée : arabisation/islamisation qui d’ailleurs est bien utile à une certaine propagande côté israélien) : même un éminent contributeur à la compilation, recherche, etc… de ces racines antiques palestiniennes, se laissera leurrer par le mythe arabe : je parle ici de Tawfik Canaan qui, presque prophète pour le coup, écrivit à peu prés ceci vers 1927 : les caractéristiques traditionnelles/propres de la Palestine disparaissent si vite que d’ici peu la plupart seront oubliées…ce qui fut et le cas pour ces caractéristiques propres que pour l’identité palestinienne même...

 

A l’époque il attribuait cela ni au sionisme, ni au panarabisme mais à l’influence européenne : quand bien même on peut l’inscrire dans une forme de revivalisme cananéen que sionisme et panarabisme menaçait tout autant et bien plus :

erreur de jugement qui lui fit rejoindre la cause (pan)arabe sans voir que celle-ci était un danger aussi grand si ce n’est plus encore à cette identité palestinienne qui l’avait passé parmi d’autres des années à détailler, décrire, etc…

 

Un mouvement (panarabisme) certes entendable dans le mouvement d’émancipation des peuples que ce soit de la tutelle ottomane ou européenne mais fatale pour leurs identités propres des peuples qui ne se limitent pas aux simples concepts de nation, langue ou religion : l’arabisation forcée ultérieure assez récurrente (que ce soit au plan culturel ou linguistique) fut à la mesure du possible effet boomerang prévisible dés lors qu’il y a  répression de l’identité propre d’un peuple au-delà de nation, langue, religion (la question berbère nord-africaine montre que un moment ou l’autre : le couvercle risque de sauter…)

 

La donne a certes changé  depuis en Palestine et dans le monde arabe, mais au panarabisme a succédé le panislamisme et localement l’islamisme politique lui aussi a bien conscience de la menace du réveil identitaire : un simple exemple :

 

en anthropo, l’étude du folklore est un axe de recherche autant habituel qu’essentiel pour dresser le profil autant historique que culturel d’un peuple : dans le cas palestinien, d’autant plus important vu le nombre de strates, couches, etc…depuis l’Antiquité : bref il y a quelques années un simple recueil de contes folkloriques (Speak, Bird, Speak Again), compilation de contes folkloriques traditionnels palestiniens (sur plusieurs siècles) par deux anthropologues palestiniens subit les foudres du Hamas : rien de très grave qu’un recueil de contes ? et bien non, ces simples contes et traditions passés au crible de la recherche anthropologique vont à l’encontre du mythe arabe, arabomusulman qui sert autant le Hamas que ses opposants israéliens.

 

Reprenant votre citation de Barrès : Le nationalisme, c’est l’acceptation d’un déterminisme. Encore faut-il savoir si ceux qui l’acceptent ont quelque légitimité à représenter le peuple auquel ils imposent telle ou telle identité (dans le cas palestinien : c’est la guerre des clans et la victoire de certains qui a été l’agent déterminant : l’identité palestinienne ayant en définitif été niée) : cela ne se limitant pas à la simple question palestinienne.

 

Bon, le point positif est que cette identité palestinienne propre tend à être en avant : certes effet encore limité (quelques festivals, de plus en plus référence aux travaux des chercheurs sur la question, etc…) mais les modèles panarabe autant qu’islamiste ont montré et leurs limites et l’impasse à laquelle il menait…une identité mille-feuilles mais singulière vaudra toujours mieux qu’une identité monolithique fictive ou mythique…

 

 

 


Voir ce commentaire dans son contexte





Palmarès