Dans Commentaire, n° 80, hiver l997-98, Ernst Nolte et François Furet
s’accordaient sur la légitimité du débat sur ce sujet. Leur
correspondance a depuis été publiée en volume (Plon, 1998 ; Hachette
Littératures, collection Pluriel, n° 971, 2000). Le 5 septembre 1996,
Ernst Nolte écrivait à François Furet :
« Il faut répondre aux arguments révisionnistes par des arguments et
non en engageant des procès. [...] Je me sens provoqué par [le
révisionnisme], et je ne me vois pourtant pas m’associer à ceux qui
veulent mobiliser les procureurs et la police contre lui. [...] Je
considère comme fondamentalement fausse l’affirmation selon laquelle, si
l’essentiel est incontestable, aucune affirmation particulière n’aurait
plus besoin d’examen, et tous les doutes ne pourraient provenir que
d’intentions mauvaises. Je crois qu’on menace au contraire le noyau de
la chose lorsque on veut soustraire l’écorce à la discussion, non pas
certes le caractère factuel de ce noyau mais le rang et l’importance
qu’on lui accorde. »
Ce à quoi François Furet répondait le 30 septembre 1996 :
« Rien n’est pire que de vouloir bloquer la marche du savoir, sous
quelque prétexte que ce soit, même avec les meilleures intentions du
monde. C’est d’ailleurs une attitude qui n’est pas tenable à la longue,
et qui risquerait d’aboutir à des résultats inverses de ceux qu’elle
prétend rechercher. C’est pourquoi je partage votre hostilité au
traitement législatif ou autoritaire des questions historiques.
L’Holocauste fait hélas partie de l’histoire du XXe siècle européen. Il
doit d’autant moins faire l’objet d’un interdit préalable que bien des
éléments en restent mystérieux et que l’historiographie sur le sujet
n’en est qu’à son commencement. »