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Commentaire de easy

sur Fatalisme et développement


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easy easy 17 novembre 2010 23:17


C’est un sujet intéressant.

Il y a à considérer ce côté Inch’Allah.
(« Si Dieu veut » étant davantage sa déclinaison préférée des Juifs sépharades ou des Pieds-Noirs que des Croisés)

Mais il y a à considérer également des tas d’autres détails qui semblent différer de ce fatalisme car inviquant moins directement Dieu.
Ca concerne plus globalement le principe de connaissance qui, dans l’absolu, va vers le « tout savoir » et de là, car il faut bien que ça serve à quelque chose, « tout maîtriser »

Le champ sémantique de « maîtrise » recouvrant, comme par hasard, aussi bien le fait de savoir que le fait de contrôler ou piloter.
Et la maîtrise conduit à la précision. Peut-être que les pharaons, les empereurs de Chine et les rois de France avaient parfois concu de mesurer sous la seconde. Mais il semble évident que bien d’autres peuples, parfois capables de prédire des éclipses (ce que je suis infoutu de faire) n’ont jamais pensé à mesurer ni les nanosecondes ni les picogrammes.
Cette névrose de la maîtrise de tout et de toutes choses peut être confondue avec l’activisme dont nous parle Emmanuel Martin puisqu’on voit bien que les secteurs géographiques où règnent ces deux attitudes se superposent.

C’est donc un ensemble de visions des choses qui font les grandes différences culturelles, pas seulement le fatalisme, sauf, à le prendre au sens très large, avec toutes ses implications.

Autant dire tout de suite que Yann Arthus Bertrand ne mettrait pas longtemps à relever que le secteur géographique non névrosé de la maîtrise est plus économique des ressources, donc plus durable que le secteur névrosé où l’on est capable de mesurer une partie pour mille d’ozone à 30 km d’altitude.


C’est que la maîtrise a apporté certes des émerveillements de type prométhéens mais que de casseroles !
Sous Louis XIV, on s’appliquait à greffer des plants différents et on parvenait à produire jusqu’à 70 sortes de poires différentes. C’était bien la maîtrise qui offrait cette abondante variété n’est-ce pas ? Et bien 250 ans plus tard, on en est à ne plus cultiver qu’une poignée de variétés, toujours selon un principe de maîtrise. Sous Louis XIV on voulait maîtriser la variété, aujourd’hui on veut maîtriser la rentabilité. Même principe pour les pommes, les vaches et les haies qui ne sont plus que de thuyas.
C’est également le souci de maîtriser la rentabilité qui provoque la chômage des temps modernes.


On a les nerfs quand on est en Tanzanie, qu’on a pris RDV avec un marchand de langoustes et qu’il arrive...trois jours plus tard ou quand le visa attendu tel jour ne l’est pas encore une semaine après. Les boules.

Oui mais le stress, il est ressenti par qui ?
Par l’homme pressé, ponctuel, seulement ponctuel et précis, rectifiera-t-il. OK un point pour l’Occidental en matière de ponctualité, mais c’est lui qui se bourre d’anxiolytiques quand il manque 300€ à son objectif de CA hebdomadaire.

Bon, je ne vais pas en rajouter au fardeau de l’homme Blanc, tant il se voit déjà dans le mur du développement.


Je vais dériver sur autre chose.
Ici, chacun irait vite à dire qu’on ne peut bien faire qu’en mesurant précisément, en utilisant par exemple un mètre ruban de chez Casto, un pied à coulisse, un palmer, un chronomètre. Alors que c’est loin d’être toujours le cas. 
Un tailleur fera l’ourlet le plus précis en le préparant sur son client, directement, sans jamais rien mesurer. On peut faire un quatre quart sans jamais connaître le poids absolu de chacun des ingrédients. Un charpentier peut monter une charpente sur place en n’utilisant que deux ou trois fois son mètre. Un luthier peut fabriquer des violons sans jamais se servir d’instrument de mesure, un cordonnier, un potier, pareil. Ils font par report de tracé, par gabarit, par moulage.

(il se pourrait qu’Einstein, Freud, Schweitzer, Gandhi, Van Gogh et Marx se soient servi d’un seul instrument de mesure au cours de leur vie, une montre)

Ici, nous avons souvent le réflexe de croire qu’on ne peut faire ou contrôler que de façon absolue alors qu’en fait, on peut faire beaucoup de choses de manière relative tout en étant autant sinon plus précis

Emmanuel nous parle aussi de la responsabilité plus grande du proactif. Oui, mais ça débouche aussi sur la judiciarisation à outrance. Ici, on fait désormais procès à tout propos. Il fait trop chaud, on fait procès à l’Etat qui n’a pas installé de la clim chez les ptits vieux. Une vague emporte des maisons, on accuse les édiles qui ont délivré les permis. On accouche d’un trisomique, on fait procès au gynécologue. Maman donne un petit milliard à son copain, on lui fait procès...


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