« Le dilemme des prisonniers » a été énoncé et ainsi nommé par Albert W. Trucker, professeur de mathématiques à Princeton. Dans ce jeu à deux joueurs :
« ... Un magistrat d’instruction souhaite obtenir les aveux de l’un ou l’autre des deux hommes qu’il suspecte être les complices d’un meurtre. Le magistrat leur fait la proposition suivante : »Celui qui se fera le dénonciateur de son complice sera relaxé, l’autre écopera vraisemblablement de vingt ans. Toutefois, si vous avouez tous les deux vous serez l’un comme l’autre condamnés à cinq ans. Et si aucun de vous ne passe aux aveux, vous serez condamnés de toute façon, mais sous un chef d’inculpation mineur, et chacun fera un an de prison".
Sur ce, les prisonniers sont enfermés dans des cellules séparées, d’où ils ne peuvent communiquer et arrêter une stratégie commune.
« Le dilemme vient de ce que si chaque prisonnier opte séparément pour les aveux, en raisonnant qu’il ne fera dans le pire des cas que cinq ans de prison, et que dans le meilleur il sera libre, tous les deux écoperont alors à coup sûr de cinq ans. Cette situation présente pourtant une incitation à un comportement moins individualiste, puisque si les deux prisonniers se font mutuellement confiance dans la dénégation, ils n’encourront au pire qu’une peine d’un an d’emprisonnement chacun. Dans le même temps, une telle situation fait surgir l’éventualité de problèmes. Chaque prisonnier doit, par exemple, envisager la possibilité d’un double jeu. Non seulement la coopération complique parfois le jeu, mais elle peut en outre rendre la situation réellement insoluble ».
Paul Watzlawicz souligne l’émotionnel :
« Tel est leur dilemme et il n’a pas de solution. Même si les prisonniers trouvaient le moyen de communiquer pour prendre une décision commune, leur sort dépendrait encore du degré de confiance qu’ils ont l’un en l’autre : sans confiance, le cercle vicieux ne cessera de recommencer. Et en réfléchissant plus avant, chacun ne manquera pas de se rendre compte que cette confiance en l’autre dépend largement de la confiance qu’il inspire à l’autre, qui est à son tour déterminée par le degré de confiance qu’ils ont l’un pour l’autre, et ainsi de suite ad infinitum. Dans les relations humaines, et le mariage en particulier, la communication est d’habitude toujours possible, mais il peut arriver aux partenaires de vivre un »dilemme des prisonniers« chronique, s’ils ne se font pas assez confiance pour choisir les solutions les plus avantageuses pour tous deux ».
Il existe logiquement dans ce jeu une solution avantageuse, mais elle demande des partenaires également intelligents, compétents en communication et confiants l’un en l’autre... ce qui écarte déjà beaucoup de paires de joueurs et donne une idée du « pourquoi tout va mal » alors que tout devrait aller comme sur des roulettes.
On peut donc fortement douter de la rationalité des choix des individus, n’en déplaise aux économistes libéraux...