Intéressant tour d’horizon, merci à l’auteur.
Assez d’accord avec ça : « Les médias ont sans doute trahi la société ..., une sorte de censure s’exerce, non pas en interdisant mais en effectuant des choix sur ce qui doit être montré. Néanmoins, le Net a permis de contourner ces choix et les marges s’expriment sur la Toile. »
A la question que pose Bernard Dugué :
« Le mot de la fin sera livré sous forme d’une énigme. Les classes moyennes françaises sont-elles encore révolutionnaires ? »
Je répondrai : y a-t-il encore une classe moyenne suffisamment forte pour faire une révolution, étant donné le laminage incessant auquel elle est soumise et la destruction délibérée de l’ascenseur social ?
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« Le capital, dont Marx rappelait qu’il était incapable de résister à l’appel de « ses intérêts les plus bornés et les plus malpropres », s’est donné avec Sarkozy le fondé de pouvoir le plus visible, le plus caricatural et le plus détestable – quand le choix de nos amènes socialistes étaient d’une bien meilleure rationalité stratégique de long terme : ceux-là n’ont-ils pas fait avancer la cause du capital dans une parfaite tranquillité au seul prix d’avoir à trémoler régulièrement « justice sociale » et « égalité » entre deux trains de déréglementation (et ne s’offrent-ils pas d’ailleurs à reprendre du service sur le même mode exactement) ? Mais voilà où mène l’hubris des possédants : à tout vouloir ils risquent aussi de tout perdre. La volonté de puissance déboutonnée par trois décennies leur a donné à croire qu’ils n’avaient plus à admettre de borne à leur désir d’accaparement et que Sarkozy était bien l’homme de cette situation-là. Mais la retraite (a failli être) le « pont trop loin », où se mêlent tout à la fois le refus d’une réforme inique, le rejet d’un pouvoir politique insupportable, mais aussi le dégoût absolu du spectacle de la finance, la contestation frontale sinon du capitalisme lui-même du moins de sa forme présente, et pour finir la défense d’une certaine forme de vie. On pouvait difficilement faire plus magistrale erreur de tir. Tragique erreur dans le choix des mots, dont Gérard Mordillat qui signe la préface d’une réédition du Capital [16]) donne a contrario l’exacte formule : « La France n’a pas besoin de réformes, elle a besoin d’une révolution ». (Frédéric Lordon, Le point de fusion des retraites, 23/10/10)