d) le Renseignement égyptien : personnifié par le nouveau Vice President, Omar Soleiman, ancienne tête des mukhabarat. Branche de l’Armée, les mukhabarat de Soleiman, orientés plus sur le traitement des non-Egyptiens et donc moins haïs que les mubahith destinés aux travaux domestiques et donc à la dissidence égyptienne, les mukhabarat ont une position décisive et centrale pour le futur : un peu comme les swing states américains (auxquels ils sont étroitement liés d’ailleurs autant qu’avec Israël). Les mukhabarat sont d’un côté des obsédés de la stabilité& du contrôle (un peu normal) mais de l’autre des ennemis, si ce n’est jurés, affirmés de Gamal Moubarak et de sa suite d’arrivistes (la plupart ayant été très rapidement éjectés avec le remaniement ministériel récent, de même que nombre d’entre eux se sont vus interdire tout exil soudain depuis ces derniers jours).
Pour conclure sur cette partie : si des passerelles sont possibles (et elles le sont) ou se forment entre les mukhabarrat et l’Air Force égyptienne avec des leaders du mouvement civil anti-moubarak et les éléments anti-moubarak au sein de l’Armée : nous aurions alors ce que Obama qualifierait de transition ordonnée.
II. Paysage économique, et Opposition
Comme dit précédemment, les reactions au capitalisme neoliberal et prédateur du clan Moubarak ont entrainé la naissance d’une tendance “capitalisme patriotique/nationaliste” en Egypte : éminemment représenté par Sawiris, sans doute un des plus riches hommes d’affaires égyptiens qui dés lundi dernier s’est joint aux anti-moubarak et a demandé l’éjection du raïs . Ces adeptes du capitalisme made in and for Egypt forment cette classe supérieure la plus menace par les menées du clan Moubarak&Co, bien plus tourné sur les business juteux et enrichissement ultra-rapide donc privilégiant les investisseurs occidentaux, chinois plutôt que de supporter l’économie nationale et ses acteurs égyptiens. Ce qui de fait, fonde une alliance objective entre les acteurs privés du “capitalisme patriote” et l’Armée égyptienne et forme une opposition dans les plus hautes et riches sphères de la société à l’encontre du clan Moubarak&Co.
A cette alliance objective des “capitalistes patriotes” doit-on aussi ajouter l’émergence et la formation d’organisations de type syndical et de mouvements ouvriers organisés principalement cette fois dans les couches de population jeune : au final nous avons donc une configuration économico-politique où armée égyptienne, capitalistes nationalistes et syndicats/mouvements ouvriers et jeunesse (2008, 2009 et 2010 ayant été parcourus de mouvements de grève massive, de sittin’ : bref répétition live de 2011 donc pas vraiment imprévisible au final) se retrouvent avec pour ennemi commun Moubarak&Co et Police : schéma connu en Egypte puisque le même que celui apparaissant dans la lutte contre les Britanniques au début du siècle dernier.
Enfin, pour compléter cette répétition de l’histoire égyptienne avec les mêmes acteurs : le monde paysan : dans la course néolibérale du clan Moubarak&Co : les tentatives d’éviction des petits propriétaires terriens ont vu nombre de révoltes paysannes locales : ici répétition des révoltes paysannes connus sous la domination ottomane puis britannique.
Là où l’analyse classique ou monomaniaque des spécialistes ès monde arabe ou Egypte se voit rapidement invoquer une lecture pré-mâchée oscillant entre références au Nassérisme et bien entendu limitant l’opposition aux seuls et omniprésents Frères Musulmans : nous avons en Egypte une opposition multiforme émanant de toutes les sphères de la société : au sein de l’Armée, au sein des classes les plus riches, au sein du monde ouvrier et paysan et bien entendu de la jeunesse : au final l’islam, le rapport entre séculier et religieux est loin d’être considéré actuellement comme la priorité : les mouvements actuels répondent aux préoccupations actuelles et notamment à la protection de l’économie égyptienne : oscillant entre demande de protectionnisme dans le champ industriel et de protection des petits propriétaires terriens, ainsi que d’investissements économiques supportant une économie de type capitaliste&patriotique.
Au final, derrière les appels des jeunes “facebook”, c’est toute une mécanique à dimension nationale (ce qui n’est pas peu dans une population dépassant largement les 80 millions officiels) qui s’est mise en branle.
Pour conclure ici : dans le vaste mouvement secouant l’Egypte : trois grandes lignes ou tendances : en premier lieu, nous trouvons les “internationaux” : tendance laïque, inspirée des principes universels, ouverts sur le monde ou tout au moins adoptant les normes globalement acceptées ; seconde tendance elle organisée autour du petit monde de la Justice en Egyptienne : très éduquée, disposant d’une longue pratique autant que solide culture juridique souvent utilisée à l’encontre même du régime Moubarak : nous dirons que cette tendance surtout formée de juristes, avocats, etc… est bien plus egyptocentrée-conservatrice et se fonde plus sur sa pratique de la résistance-au-quotidien et le corpus légal égyptien que sur la norme occidentale en matière de droits ; enfin la dernière tendance trouvera pêle-mêle ONG, altermondialistes, féministes, mouvements ouvriers et paysans : bref obédience néogauche/progressiste voir gauchiste (dirons certains ici).
Bref il y aurait beaucoup à dire mais voilà l’équation actuelle qui fait que d’emblée le clan Moubarak se retrouvera acculé très rapidement maintenant que sa faiblesse est devenue évidente : nous avons une alliance objective dans l’absolu et donc possiblement réalisable à court terme entre des éléments issus de toute la société égyptienne qui se retrouvent tous unis, quand bien même serait-il riche bourgeois d’Alexandrie, général, avocat, paysan ou prolo, conservateur, progressiste, religieux ou féministe, face à une entreprise d’accaparement de la nation égyptienne : entreprise qui en elle-même porte les germes de la chute de Moubarak dans un pays comme l’Egypte où le Nationalisme a toujours été une donnée clé.
27/02 12:25 - Ariane Walter
Je vous remercie, jack, de me rappeler de le faire. En fait, actuellement, je suis en train de (...)
27/02 11:12 - jack mandon
Bonjour Ariane, Nos petits états d’âme ont peu d’importance, quand on prend (...)
07/02 10:26 - Ariane Walter
Oh ! la ! la ! Kerjean, je suis toute shamy, oui !! Je demande à la modération s’ils (...)
05/02 19:17 - stephanie
05/02 15:23 - Ariane Walter
L’article est en effet en modération et accueilli favorablement. il sortira sans doute (...)
05/02 12:46 - Ariane Walter
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