III. Califat Muslim Brotherhood ?
La prop-à-gland occidentale se recyclant rapidement et offrant du prêt-à-penser sur commande a décidé d’occulter ou d’ignorer toutes les données précédemment citées et de se concentrer sur les seuls Frères Musulmans, acteurs parmi d’autres (dont les COPTES (on peut s’étonner qu’alors que les Chrétiens d’Orient soient devenus depuis peu un des nouveaux axes de l’islamophobie : que les Coptes -pourtant participant largement au mouvement- soient largement ignorés alors que dans une Egypte démocratique ou plus démocratique : leur poids politique serait à lui seul un obstacle conséquent à un hypothètique raz de marée Muslim Brotherhood)) : voient leur influence autant que poids politique réel largement surestimé en invoquant un 1979 bis et en faisant des parallèles plus que douteux entre l’Iran de 1979 et l’Egypte de 2010.
Alors rapide réflexion. Bon, nous n’allons pas rappeler les différences évidentes entre Iran et Egypte, ni que nous ne sommes plus en 1979 mais au cas où : l’Iran est perse et de fait de culture indo-européenne : ce qui n’est pas anodin puisque la révolution de 1979 n’aurait sans doute pas été possible sans un des éléments constitutifs classiques du modèle indo-européen : le Clergé : clergé qui en Iran a toujours eu un poids politique éminent et cela bien avant même que Zoroastre décide de prêcher : le clergé chiite quant à lui n’en était pas à sa première révolution en Iran puisqu’il fut un des éléments centraux de la dite Révolution Constitutionnelle d’Iran au début du XXè siècle (1905/1911) : or comme chacun le sait le Sunnisme ne connaît pas de clergé tel que le Chiisme et dans le cas de l’Egypte : l’islam connaît différentes centres : Al Azhar pour l’orthodoxie, les Frères Musulmans dans le rôle d’opposants perpétuels au régime, puis les tendances salafistes, wahabbites, et alqaïdaïstes-en-tout-genre (pour faire simple)…
Alors bien que les mollahs de Téhéran semblent réclamer des royalties concernant les évènements qui secouent le monde arabe (bien distinct du monde indo-iranien : Pakistan, Afghanistan inclus) en invoquant des révolutions islamiques inspirées de la leur : sans doute avec l’espoir de terrifier un Occident déjà hyper-parano dés qu’il s’agit d’islam ou d’Islam : il est fort peu probable que la théocratie chiite iranienne apprécie le cas échéant une théocratie sunnite dans un pays de la taille et de l’importance de l’Egypte : l’hypothèse la plus probable est que dans une telle perspective les mollahs reconsidèrent leurs positions vis-à-vis d’Israël cernés qu’ils seraient (ils le sont déjà) entre un Pakistan nucléaire, une Turquie en plein éveil « islamo-stratégique » et un néo-calife au Caire.
Bref, mise à part l’humour particulier des ayatollahs iraniens : la menace du califat Muslim Brotherhood en Egypte demeure dans le champ du binarisme : binarisme non pas lié à la réalité du monde arabo-musulman mais plus à l’absence de compréhension de la phase qu’il traverse ou de la nouvelle ère qui s’enclenche (cela indépendamment de la réussite ou non des révolutions ou révoltes en cours).
L’humour des politiques et téléctuels occidentaux n’ayant rien à envier à celui des ayatollahs : de ce côté ci du Monde il semble que l’on considère soudainement que les Arabes ne seraient pas prêts ou matures pour la démocratie et que côté M.O, P.O, ben au final mieux vaut qu’Israël reste la-seule-démocratie-de-la-région-blabliblabla- bref la perspective de pays arabes démocratiques ou démocratisables semblant une pure abstraction n’ayant pas vocation à se réaliser : nous voilà donc avec la promesse de la restauration du Califat (quant aux candidats : les dépôts de candidature sont déjà en cours semble-t-il) .
Bref cessons l’ironie : le fait est que bien que ce soit là sans nul doute une subtile autant qu’intelligente stratégie : les Frères Musulmans sont loin d’être les acteurs principaux ou centraux de la révolution égyptienne (il est fort possible qu’ils le deviennent face à l’obstination de Moubarak : raison étant qu’ils se sont « grillés » emportés sans doute par l’ivresse de la jeunesse de la place Tahrir et que donc que comme la plupart des éléments ou organisations visibles : en cas d’échec ils seraient les premiers à subir la répression ; ensuite accordons leur le bénéfice du doute et considérons que effectivement ils espèrent le jeu démocratique pour enfin jouir de ce « pouvoir » et assise populaire qu’on leur prête : so dans tous les cas si la situation stagne : leur implication ne pourra que se renforcer : le jusqu’au-boutisme ne leur étant pas réservé bien entendu : d’étranges alliances sont en cours : scénario libanais ?).
Nous avons déjà résumé plus haut quelques éléments de la situation égyptienne : fait notable : les manifestations en cours n’ont pas vu comme déjà dit une présence affirmée des barbus, ni n’a-t-on entendu scander « l’islam est la solution », de même que le discours des Frères a mis égyptien avant musulman, nous passerons sur l’absence de confessionnalisation du mouvement qui voit Coptes et Musulmans (toutes tendances confondues) s’associer, de plus l’acceptation de El Baradaï, le discours relativement posé voir neutre des Frères Musulmans peuvent soit être interprété comme de la pure rhétorique stratégique soit d’une façon plus subtile révéler un élément de taille , bien peu analysé dans les médias occidentaux : à savoir, tout simplement, l’impact de ce mouvement-révolution sur le mouvement des Frères Musulmans : en effet, les derniers jours autant discours que « figures » du mouvement islamiste ont opéré un subtil basculement : l’élément « jeune », plus libéral ou réformateur semblant prendre le dessus sur la vieille garde : ce qui ne serait pas anodin ni même inexplicable puisque que la promiscuité des sittin’ ne se limitent pas à de simples sessions de thé&pâtisseries partagées mais bien souvent à de véritables forums de discussion politique : échanges d’idées, débats,etc…bref de la démocratie en formation, en live après des années de silence obligé.
Enfin, rappelons que ce mouvement, cette révolution a réussi en quelques jours ce que les Frères Musulmans ont été incapables de faire en prés de 90 ans : cette donnée sera sans doute intégrée par les cadres du parti, au risque (pour eux !) de se voir tomber en même que le régime : une nouvelle donne remplaçant l’ordre ancien dont les Frères Musulmans étaient une composante depuis prés d’un siècle.
Ensuite, chacun aura note l’absence de leaders visibles des Frères Musulmans : aucune figure ne s’étant imposée comme représentant les Frères avec la Révolution du Lotus : ce qui est là une différence notoire avec 1979 et l’Iran : si les sceptiques aiment à rappeler que les mollahs se sont associés avec laïques, démocrates, etc en 79 pour ensuite les envoyer au bourreau ou en exil, un élément capital de la Révolution Iranienne fut la figure de Khomeyni : figure charismatique autant qu’ayatollah : c’est-à-dire autant figurant s’imposant comme visage de la Révolution iranienne, autant qu’ayant derrière lui tout l’appareil-clergé chiite : cette configuration n’existe pas en Egypte : aucune figure charismatique des Brothers ne s’impose (Baradaï ayant reçu l’appui des Frères Musulmans), aucun clergé.
Quant à son pouvoir, influence, assise populaire, etc…et bien encore faut-il rappeler qu’entre 2005 ( et élections où le mouvement avait raflé 88 sièges au Parlement égyptien : soit 20%) et aujourd’hui : la répression a été autant féroce qu’efficace et que le parti Frères Musulmans de 2010 n’est plus celui de 2010 : sans compter qu’entretemps la génération qui a lancé cette révolution populaire s’est formé en dehors des structures politiques habituelles ou traditionnelles (Frères Musulmans inclus) : usant de l’internet ; a été confronté aux spectacles de l’Irak, de l’Afghanistan et a eu le temps de considérer d’autres formes politiques, d’opposition, dissidence que l’islamisme : qui pour elle appartient autant à un monde qu’elle souhaite enterrer que ne l’est le raïs de 82 ans.
Bien entendu, on pourra toujours invoquer la jurisprudence Lénine ou Khomeiny : mais ici différence de taille : cette jeunesse qui a osé défié puis affronté le régime égyptien a pu malgré son jeune âge avoir des démos live de sociétés de type islamistes : avantage inconnu des Russes pionniers du Bolchévisme : ou des Iraniens de 79 ; enfin l’islamisme est une option ou l’option lorsqu’il y en a aucune autre a priori…aujourd’hui, une troisième voie s’ouvre semble-t-il : une voie que les Egyptiens ouvrent sans penser ni aux US, ni à l’Occident, ni à Israël mais juste à l’Egypte…
27/02 12:25 - Ariane Walter
Je vous remercie, jack, de me rappeler de le faire. En fait, actuellement, je suis en train de (...)
27/02 11:12 - jack mandon
Bonjour Ariane, Nos petits états d’âme ont peu d’importance, quand on prend (...)
07/02 10:26 - Ariane Walter
Oh ! la ! la ! Kerjean, je suis toute shamy, oui !! Je demande à la modération s’ils (...)
05/02 19:17 - stephanie
05/02 15:23 - Ariane Walter
L’article est en effet en modération et accueilli favorablement. il sortira sans doute (...)
05/02 12:46 - Ariane Walter
Agoravox utilise les technologies du logiciel libre : SPIP, Apache, Ubuntu, PHP, MySQL, CKEditor.
Site hébergé par la Fondation Agoravox
A propos / Contact / Mentions légales / Cookies et données personnelles / Charte de modération