Comme Pastori, je crois, que « l’augmentation des salaires » est une expression, une façon de penser, en train d’être dépassée. Au début du XXème siècle, l’ouvrier ne savait pas encore manier le discours égalitaire. Il a d’ailleurs très facilement accepté de servir de chair à canon. Il concevait certes d’obtenir un salaire plus élevé mais n’allait pas au bout du raisonnement en zappant sur le principal problème qui est celui de l’inégalité de pouvoir. (Quand on a le pouvoir, on décide des salaires, à commencer par le sien)
Les salariés du début du XXème se sentaient encore très gauches, je veux dire mal dégrossis, complexés par rapport à la classe au pouvoir qui sait tout, et concevaient donc mal voire pas du tout de la renverser. Ne concevant pas de se passer de chefs, la masse ne concevait pas de réclamer une égalité de pouvoir et se contentait de ne réclamer que quelques sous de plus sur la paye.
Or le jeu est pourtant clair ; dès qu’un patron doit augmenter les salaires de ses ouvriers, il augmente ses prix (en toute mesure de la concurrence ou parfois de la cartélisation) afin de préserver ses marges et la progression de sa fortune. Alors le patronat crée l’inflation et le salarié consommateur est marri.
Le salarié ne profite du « coup de pouce au smic », que pendant 2 jours ; au troisième, il est déjà revenu à la case de départ, celle de son infériorité fondamentale, celle de son manque de pouvoir
En un siècle, la situation a évidemment évolué. L’employé devient de moins en moins complexé. Il reste certes très souvent coincé en position d’infériorité de pouvoir mais il ne se sent pas vraiment inférieur aux chefs, pas autant qu’autrefois en tous cas.
Alors ses revendications changent. Elles portent désormais sur quelque chose de plus profond. Le salarié commence à réclamer de pouvoir décider de toute chose, au même titre que n’importe qui. Exit les chefs donc.
Dans les faits, l’employé reste très loin de pouvoir décider de son sort mais dans les esprits, l’idée fait son chemin.
Par exemple, la masse (qui est constituée d’employés) commence à penser que non seulement la monarchie n’est pas valable mais que même l’oligarchie ne l’est pas. Cette masse, qui s’exprime désormais sur les mêmes medias que les chefs, qui est à tu et à toi avec eux, qui les met en slip quand elle veut, commence à admettre que ce qu’elle avait consenti, par défaut, à appeler démocratie, n’était et n’est encore qu’une oligarchie. Cette masse commence à penser qu’il faut passer à une démocratie plus effective.
Retraçons rapidement notre Histoire.
Je pose que le garçon aurait été naturellement porté au machisme, à la position qu’illustre bien le coq et que la fille, peut-être parce qu’elle se satisfait de donner vie à des individus, serait naturellement restée à subir les choses.
Par urbanité, pour ne pas faire constamment le coup de poing, les garçons se sont résolus à privilégier le discours à l’épée. Mais ce discours était, c’était son essence, machiste.
Il y a des siècles de cela, l’organisation sociale allait donc vers la féodalité où une masse convient qu’untel est un costaud et qu’il peut donc la commander. Dans cette féodalité, autant les garçons convenaient de se hiérarchiser très fortement entre eux, (chaque rang supérieur tenant un discours d’autorité, de qualité, de valeur supérieure), autant les filles évitaient le discours et toute revendication au pouvoir (Dictateur ne s’est jamais conjugué au féminin)
Mais plus la hiérarchisation masculine était discutée entre garçons (par l’accès au savoir d’une plus grande proportion de garçons et par la révolte des peuples esclavagisés) plus les filles ont envisagé de participer au pouvoir, par le seul discours, pas par les muscles évidemment.
Le discours féminin le plus ravageur, le plus destructeur des fondamentaux féodaux, est à mes yeux, celui qu’avait tenu Harriet Beecher Stowe lorqu’elle avait écrit La case de l’oncle Tom (un des plus gros tirages au monde). Et Hugo et Zola et Tolstoï ont bien été obligés de suivre, de surenchérir dans cette entreprise de démolition du principe de féodalité.
Et Mao aussi.
Ainsi, dans le même temps où les garçons sortaient du principe de hiérarchisation entre eux (et par ricochet sur tout) et devaient tenir des discours de moins en moins coqs, les femmes ont accédé au savoir scolaire jusqu’au point où les écoliers ont pu constater que les écolières assises à leurs côtés apprenaient et savaient exactement les mêmes choses qu’eux. Les garçons ne pouvaient désormais plus se réclamer ni des biceps, ni de l’art de la guerre, ni du savoir, pour justifier à bon compte leur domination.
Alors Simone de Beauvoir, Simone Veil, Marguerite Yourcenar ont pu discourir à rang égal avec les autres philosophes. Mais étant bien compris que le discours, désormais de plus en plus mixte, devenait de moins en moins machiste, de moins en moins féodal.
Mixité, mixeur, on s’est mis à tout mixer jusqu’aux boissons aux 12 fruits. L’époque des cocktails est celle de la mixité et du mixage de tout.
Alors en plus du mélange des genres, il y a eu le mélange des âges.
On ne pouvait pas démolir la féodalité et tout niveler par le savoir uniformément réparti entre tous et conserver l’autorité par la vieillesse.
L’âge des sages a expiré et les enfants savent tenir le même discours, désormais encore plus neutre ou égalitariste que jamais, que les adultes. En fait, la sape de l’ancienneté est telle que les vieux en sont réduits à imiter les jeunes, tant sur leur dialecte que sur leurs manières.
De ce nivellement de tout et de toutes choses par la cocktailisation des ethnies, des genres, des âges, des bouffes et des cultures, il ne peut ressortir qu’une réclamation de tous les employés pour un nivellement des pouvoirs.
Dans les décennies qui viennent, les employés ne se contenteront plus du désuet « coup de pouce au smic » , ils veulent avoir le pouce, l’index, le majeur, la main, le pouvoir.
Mais étant partagé entre tous, il ne s’agira pas du même pouvoir que celui d’un Mohamed VI, d’un Sarko ou d’un Kadhafi, il s’agira d’un pouvoir issu du grand mixeur. Il s’agit d’un pouvoir au goût pour l’instant inconnu mais dont on peut prédire qu’il sera...indéfinissable.
Dans cette analyse rapide, j’ai zappé l’émergence d’un nouveau pouvoir dès le début du XIXème siècle, celui qui n’est fondé que sur la très grande fortune. Lui aussi sera contesté.
23/02 23:25 - papi
@pastori Ni aux simples d’esprit !! pastori vous n’avez rien à (...)
23/02 20:50 - epicure
trichet patron d’une banque indépendante uniquement du pouvoir des peuples, mais pas de (...)
23/02 16:42 - frugeky
Ce que je dis ne s’oppose en aucun à un revenu pour ceux qui n’ont pas de boulot, (...)
23/02 14:48 - lloreen
Bonjour et merci de votre article. Mr Trichet s’adresse à ses« coreligionnaires » du (...)
23/02 13:26 - Kalki
25 million d’actif 4 millions de chomeur ( + 3 millions ) 8 millions de travailleur (...)
23/02 12:54 - easy
Comme Pastori, je crois, que « l’augmentation des salaires » est une expression, une (...)
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